• 325 professionnels attaqués en l'espace d'une année Au total 306 agressions ont été enregistrées contre les journalistes tunisiens et les professionnels dans le domaine en l'espace d'une année. Ce chiffre a été révélé, hier, par le premier rapport annuel sur les agressions contre les journalistes présenté lors d'une conférence de presse assurée par l'Observatoire du Centre de Tunis pour la Liberté de la Presse (CTLP). Le bilan est le moins que l'on puisse dire lourd. Il reflète les menaces auxquelles sont confrontés les professionnels, d'où un grand risque de limiter la liberté d'expression et de la presse. La police, les citoyens, le ministère public, les fonctionnaires de l'Etat, les sympathisants des partis politiques au pouvoir et de l'opposition, les membres des ligues de protection de la révolution, les groupes salafistes…se sont lignés tous pour s'acharner sur les journalistes lors des 11 derniers mois. Quelques 306 professionnels ont été ciblés par les agresseurs toutes les franges confondues. Malheureusement la liste énumérée par l'Observatoire du CTLP est longue. Elle regroupe en effet plusieurs profils tels que les chefs des entreprises dans lesquelles travaillent les professionnels de la presse, les syndicats, les magistrats et les juges d'instruction. Le bilan est certes, négatif du fait que les journalistes ne sont pas protégés contre les différents types d'agression, en dépit de l'existence du décret loi 115 qui assure l'immunité du journaliste. Négligée totalement par le régime au pouvoir, ladite loi n'a pas été appliquée depuis sa promulgation juste après la révolution. Cela laisse le champ libre aux agresseurs pour qu'ils commettent leurs actes en toute impunité pour prendre plusieurs formes. Les types d'atteintes D'ailleurs, le rapport a recensé 14 types d'atteintes, dont 18 menaces de mort et trois cas d'emprisonnement. La violence physique occupe toujours la tête de la liste. Elle émane essentiellement par des agents de la police qui sont classés les premiers en termes d'agresseurs. Vu la concentration des médias dans le Grand-Tunis, la majorité des atteintes contre les professionnels de la presse ont été enregistrées dans ces villes. Les régions viennent en deuxième position et c'est la ville de Gafsa qui est touchée le plus par ce phénomène. Au total, 25 cas de violence contre les journalistes ont été recensés entre octobre 2012 et septembre 2013 à Gafsa. Pour ce qui est des médias audiovisuels les plus touchés, c'est la chaîne télévisée Al Hiwar Attounsi qui a été ciblée le plus. La télévision nationale Al Watania 1 et Nessma Tv occupent respectivement la deuxième et la troisième position. La radio régionale de Tatouine est classée première en termes des radios et le journal Assahafa occupe la tête de la liste pour ce qui est de la presse écrite. Recommandations Nul ne peut nier que les professionnels des médias font l'objet d'acharnement de tous bords. Les partis politiques, les citoyens, et les agents de police longtemps réprimés par l'ancien régime, ne sont guère habitués à composer avec cette vague de liberté. Ils réagissent le plus souvent violemment contre les professionnels de l'information et de la presse. Pour lutter contre ce fléau, le Centre de Tunisie pour la Liberté de la Presse présente un ensemble de recommandations dont la promulgation de textes législatifs pénalisant toute personne qui menace de mort les journalistes et l'obligation du ministère public à faire des enquêtes profondes et de manière rapide contre ceux qui menacent de mort les professionnels de médias. Le centre recommande également aux journalistes de faire le suivi des plaintes qu'ils déposent contre leurs agresseurs tout en lançant un appel aux politiciens pour qu'ils cessent les campagnes de dénigrements et les incitations à la haine contre les professionnels du secteur pour que ces derniers ne soient pas une cible directe menacée de mort. Deux ans se sont écoulés depuis la révolution. Aucun objectif n'a jusque là été réalisé à cause des attitudes des gouvernements provisoires qui se sont succédé au pouvoir. Deux ans durant, la liberté d'expression a fait l'objet d'une pression de la part des politiciens au gouvernement qui ne croient pas à ce principe fondamental de la démocratie tout comme d'autres acteurs sociaux. En contrepartie les journalistes et les professionnels de la presse ne lésinent pas sur les moyens pour accomplir leur mission dans des conditions très difficiles voire dangereuses. Leur credo enraciner la liberté de la presse et préserver le seul acquis de la révolution. Sana FARHAT Chiffres clés -306 agressions contres 325 professionnels ont eu lieu entre octobre 2012 et septembre 2013. -237 journalistes de sexe masculin ont été agressés -88 journalistes femmes ont subi une forme de violence -22 établissements médiatiques ont été attaqués Les différents types d'atteintes *74 agressions physiques *53 arrêts du travail *47 poursuites judiciaires *32 cas de violence verbale *28 cas de harcèlement *18 menaces de mort *13 arrestations *9 cas de censure *6 cas de piratage *5 cas d'intervention politique *5 cas d'agression contre les établissements médiatiques *4 cas d'intervention administrative *3 cas d'emprisonnement