Tout en accueillant la fête de fin du mois du jeûne, l'Aid el Fitr, avec la joie et la ferveur religieuse qu'elle mérite, beaucoup de citoyens ne cachent pas l'appréhension que cette échéance annuelle leur occasionne périodiquement tout simplement parce qu'elle signifie, pour eux, la libération des démons et des mauvais esprits tenus solidement enchaînés, durant le mois de Ramadan, par la Haute Puissance divine.
Quoique suivant une certaine tradition qui reste à vérifier, certains d'entre eux croient, fermement, qu'il s'agit des vrais démons de la race de Satin le maléfique, d'autres acceptent, volontiers, d'y voir le symbole des mauvais penchants de l'homme qui sont, de nouveau, lâchés et libérés, après leur sommeil prolongé, au cours du mois de Ramadan.
Abstention volontaire ou contrainte extérieure Ainsi, cette mère de famille dont le mari a un goût prononcé pour le vin, rend mille grâces au mois de Ramadan, pendant lequel la vente des boissons alcoolisées est prohibée. Et dire, que jusqu'à 1970, cette vente était libre, en Tunisie, durant le mois saint. Mais, c'étaient, alors, une autre époque et d'autres idées. Les gens signalent, aussi, d'autres mauvaises habitudes qui disparaissent, comme par enchantement, durant Ramadan, mais ils déplorent que des pratiques jugées négatives continuent d'être tolérées, pendant le mois saint, comme le jeu sous toutes ses formes qui a tendance, plutôt, à prospérer, à cette occasion, à la faveur des soirées prolongées dans les cafés et autres lieux similaires. Cependant, spécialistes et observateurs admettent que la violence criminelle et divers autres manquements à la discipline sociale reculent, au cours du mois de Ramadan, insistant sur l'utilité d'établir des statistiques comparatives, dans ce domaine, afin de pouvoir mesurer scientifiquement, l'impact de l'ambiance ramadanesque sur le comportement du tunisien et de l'homme en général. Selon eux, l'abstention volontaire de boire et de fumer, du jour au lendemain, sans préparation préalable ni contrainte extérieure, de la part des gens dépendants du vin et du tabac, à cette occasion, incite à repenser toutes les idées reçues sur les difficultés organiques et physiologiques liées au sevrage brutal contre les dépendances et les habitudes contractées. Toutefois, l'absence de contrainte extérieure, dans ce cas, n'est pas totalement reconnue par quelques uns de nos interlocuteurs pour qui l'ambiance ramadenesque constitue, en elle-même, une contrainte extérieure, à travers les mesures de prohibition qui l'accompagnent et la pose de toutes sortes d'entraves matérielles contre les tentations. En effet, dans la langue arabe le mot ''sawm'' et ''syam'' qui est synonyme des mots ''jeûne'' et ''jeûner'' en français, signifie, littéralement, '' arrêt '', ''arrêter'', '' retenir'', ''se retenir'', ''s'abstenir'', mais le tout est de savoir s'il s'agit d'un arrêt volontaire ou plutôt d'un arrêt imposé de l'extérieur par quelques moyens matériels.