Presque tous les vecteurs médiatiques en Tunisie, et d'autres ailleurs, sont restés branchés sur la question de Nidaa Tounès : éclatera, éclatera pas ? Cependant, les avis sont restés partagés concernant le rôle à jouer par le fondateur du parti, maintenant Président de la République, et par l'actuel président du parti, en même temps président de l'ARP. Il y avait certes la question de la neutralité qui se posait pour le premier, à double titre d'ailleurs : d'un côté de par son statut institutionnel qui le place au-dessus des partis, de l'autre de par son statut familial puisque son fils est partie prenante dans le conflit. Nous avions souligné, pour notre part, ici même, que l'intervention des deux présidents était impérative au vu des répercussions, certes pas forcément constitutionnelles mais d'ambiance générale et de climat social, que les problèmes du premier parti, en classement électoral, peut avoir sur le pays. Aujourd'hui, il nous plaît de constater cette intervention et d'en examiner la portée. Il est d'abord une évidence : le retour quasi-unanime à la logique du respect du président fondateur et d'un strict alignement sur les principes de base qu'il a posés en assise première au Nidaa. D'ailleurs, le président de la République n'a pas pris parti, il a responsabilisé tout le monde et a appelé au dialogue et au recouvrement de l'unité. Il y a aussi, dans les mêmes termes du respect, l'approbation de la lettre adressée par le président du parti appelant à un report de la réunion du Comité Constitutif, prévue le 12 novembre 2015, et cela pour plus de concertation en vue d'un rapprochement des vues et d'une probable réconciliation. Au résultat, l'ambiance paraît s'être détendue, à plusieurs indices dont notamment la performance de Hafedh Caïd Essebsi dans une première apparition télévisée, sur Nessma TV. Au-delà des insinuations sur lesquelles il y aura à gloser pour certains commentateurs, il y a des affirmations claires : le fils du président ne convoite aucune première responsabilité, ni dans le parti ni dans la haute hiérarchie de gouvernement, tout en soulignant son droit légitime à faire de la politique comme tout citoyen tunisien en possession de ses moyens intellectuels et des conditions requises à cet effet. Il n'a pas manqué de souligner son inconditionnelle discipline à toute décision présidentielle, séparant le familial du politique, et à toute option de travail permettant au parti de bien prendre pied sur ses fondements, loin des manipulations et des stratégies visant son instrumentalisation pour des ambitions personnelles. Il a ajouté par ailleurs que, depuis deux jours, il recevait de sérieuses menaces de mort. Ce passage de HCE, un jour après celui de Faouzi Elloumi, lui aussi vice-président du Nidaa, sur la même chaîne, laissant entendre une autre division possible, avec un troisième regroupement autour de lui, n'a pourtant pas annoncé le report de la réunion du 12, celle du CC du parti. Faut-il croire que cette réunion se limitera, si elle a lieu, à une évaluation de la situation et à une appréciation des nouvelles donnes à même de favoriser la réconciliation par le dialogue ? Il y a plusieurs raisons de le croire surtout que, contrairement à la vingtaine de démissions supplémentaires dans le groupe parlementaire du Nidaa, annoncées par Faouzi Elloumi, on a plutôt un renoncement à la démission d'une députée des trente-deux, Jihène Aouichi. Si c'est le cas, on dirait que c'est tant mieux pour ce parti, tant mieux aussi pour le pays, mais qu'il y aurait bien de leçons à en tirer.