NessmaTV nous étonnera toujours, elle reçoit l'une des personnalités les plus puissantes de la planète (peut-être un peu grâce à Silvio Belusconi, l'un de ses plus gros actionnaires) et la rencontre se passe en platitudes, en sentiers battus comme si on avait juste voulu se faire plaisir et... faire plaisir à Hillary Clinton! Celle-ci ne s'en est d'ailleurs pas privée en débitant des propos qu'on lit partout dans les journaux à propos de la Tunisie, de l'Algérie, du Maroc, du Sahara Occidental, de la Libye... Pourtant, une question qui était sur toutes les lèvres aurait dû être posée... pour secouer tout cela et mettre tout de suite la diplomate-en-Chef des USA devant les devoirs de la toute-puissance de sa position; le devoir d'engagement: Alors que nous sommes à quelques heures de la décision du Conseil de sécurité de l'ONU, si celui-ci vote l'intervention militaire cintre la Libye (ce qu'il a fait en bout de compte), le contre-amiral Harris, patron de la 6ème Flotte US, a-t-il des ordres pour des attaques immédiates contre les défenses aériennes libyennes? La Libye, actualité oblige! Pourquoi justement commencer par cette question? C'est tout simple, ce même 17 mars, des dizaines de citoyens tunisiens se sont rassemblés devant le siège du ministère des Affaires étrangères pour crier haut et fort leur opposition à la visite de la secrétaire d'Etat américaine, génériquement, à cause des positions américaines négatives vis-à-vis des causes arabes et particulièrement la cause palestinienne et du soutien inconditionnel des Etats-Unis à Israël mais, spécifiquement, à cause de l'absence de position ferme soutenant le peuple libyen. Ces manifestants disaient tout haut ce que pensent tous les Tunisiens, et Hillary Clinton le sait. Dans sa conférence de presse en compagnie de notre ministre des Affaires étrangères, elle a pourtant été évasive en parlant d'efforts internationaux visant à protéger les civils et à mettre fin aux exactions de Gueddafi et des décisions de la Communauté internationale en nous laissant sur notre faim quant à l'attitude des Etats-Unis qui, selon elle, soutiendront les décisions du Conseil de sécurité et tiendront à une large participation qui inclut les pays arabes. Un allié stratégique! Les officiels tunisiens avaient la tête ailleurs pour être en mesure de demander une attitude plus tranchante de Mrs Clinton. Ils ont tous parlé de l'amitié séculaire et du caractère stratégique qui caractérisent les relations tuniso-américaines en tenant à souligner clairement la volonté de la Tunisie d'ouvrir un nouveau chapitre avec les USA, plus diversifié, plus fort, plus clair... Foued Mebazaa a même demandé de l'aide à mots couverts en parlant juste des priorités de la période à venir, c'est-à-dire le développement équitable entre toutes les régions, le développement des plus défavorisées, l'emploi, l'amélioration des conditions de vie... Démocratie Hillary Clinton a joué à fond le jeu amitié et stratégie... souriant à la transition démocratique et aux élections libres et transparentes pour une Assemblée constituante, à la formation des partis politiques, au potentiel de construction démocratique et de développement économique en Tunisie et promettant le soutien des USA dans sa transition vers la démocratie... Economie, le gros dossier Hillary Clinton sait également que l'économie a toujours été la tasse de thé des Tunisiens et elle a eu des mots dans ce sens qui font la promesse de programmes pour de nouvelles opportunités d'emploi où l'Overseas Private Investment Corporation donnera de l'argent frais et des garanties qui ont valeur d'argent et encouragera les visites d'investisseurs américains en Tunisie. Le Congrès créera un Fonds pour les projets tuniso-américains pour épauler les privés qui se lancent dans l'Atlantique. Le gouvernement US serait aussi en train de penser à activer des mécanismes relevant de l'USAID. La Tunisie est aussi éligible pour contracter des prêts auprès du Fonds pour les défis du millénaire, a souligné H. Clinton. Société civile Un point qu'il faut mettre en évidence car les Etats-Unis en sont particulièrement friands: un nouveau partenariat entre la société civile tunisienne et des sociétés de technologie américaines, comme Microsoft qui soutiendra des associations des droits de l'Homme, de la démocratie et de l'éducation civique avec des ordinateurs, des logiciels, de la formation... Sur tout cela, sur le sens et l'avenir du concept d'un allié stratégique des Etats-Unis aussi bien que sur les détails de la pratique de la Démocratie, mais également à propos de très gros dossiers comme l'est de fait l'économie dans la Tunisie de l'après-14 janvier 2011 et même sur l'avenir de la Société civile avec les nouvelles règles issues de la légitimité de la Révolution (un concept qui existe bel et bien dans les jurisprudences internationales)... Sur tout cela donc, des questions auraient dû être posées clairement à Mrs Clinton car pour nous tous, ce n'était certainement pas le moment d'avoir une si haute personnalité à portée de la main et de ne pas être allés au bout de la logique de la Révolution. Pas ce fameux Dégage! qui a fait le tour de la planète mais un appel clair à l'adresse des grands de ce monde pour un Engage-toi! sans réserves.