La situation des TPME (très petites, petites et moyennes entreprises) est de plus en plus compliquée, pour ne pas dire catastrophique. Les chiffres avancés par l'Association nationale des petites et moyennes entreprises sont carrément alarmants. Le point. Depuis la révolution, les entreprises tunisiennes n'ont pas cessé de guerroyer pour leur survie avec l'espoir d'un avenir meilleur. La crise du Covid-19 a mis à mal, non seulement les entreprises tunisiennes, mais une grande partie des entreprises mondiales. Or, ces dernières, du moins celles se trouvant dans des pays développés, ont pu bénéficier du soutien de leurs gouvernements. En Tunisie, et vu le manque de moyens, les aides étaient limitées et la majorité a dû compter sur elles-mêmes. Avec la vaccination des populations, les entreprises de par le monde s'attendaient à une belle reprise mais s'était sans compter sur la guerre en Ukraine qui a fait d'importants ravages avec une inflation record dans le monde entier jamais atteinte depuis des décennies, outre une explosion des prix des carburants, des céréales, des denrées alimentaires et de la matière première. Pire, les pénuries sur certains produits ou composants ont entravé des secteurs entiers. A titre d'exemple, la crise des semi-conducteurs qui a largement perturbé le secteur automobile.
Dans ce contexte, les entreprises tunisiennes se sont retrouvées dos au mur et sans soutien. Et les chiffres révélés par le porte-parole de l'Association nationale des petites et moyennes entreprises, Abderrazek Houas, vendredi 15 juillet 2022 au micro de Hatem Ben Amara dans l'émission Sbeh El Ward sur Jawhara FM, sont plus qu'alarmants, d'autant plus qu'il pense que « la situation est en train d'empirer ». M. Houas a affirmé que 140.000 TPME ont fait faillite et que 55.000 autres sont en train d'emprunter le même chemin, notamment à cause du manque de financement. Toujours selon lui, 1.900 grandes unités industrielles ont fait faillite entre 2011 et 2015. Et de marteler dans ce cadre que la Tunisie est devenue un pays consommateur et que le marché est inondé par les produits turcs. Il a souligné de ce fait que ces faillites ne sont pas enregistrées car les concernés n'ont pas les moyens d'engager les procédures de liquidation et certains espèrent se remettre sur pied. Il a par ailleurs assuré qu'il n'est pas nécessaire de chercher les chômeurs engendrés au bureau d'emplois, car ce sont des personnes qui ont dépassé la quarantaine et qui préfèrent travailler le jour au jour. D'autres sont en prison, notamment à cause de chèques sans provision. Le porte-parole a aussi indiqué que 10.800 personnes sont en fuite à l'étranger. Toujours selon lui, ils sont devenus des clandestins n'ayant plus droit à leur passeport étant recherchés et exploités à l'étranger à cause de leurs conditions précaires.
Ainsi et selon un sondage effectué par l'association sur un échantillon de 3.000 entreprises, 60% sociétés ont déclaré être en cessation d'activités, 92,1% se considèrent en situation de faillite. D'après cette même étude, 76,4% dirigeants ont été condamnés à la prison ferme avec exécution immédiate. 62% sont en litiges avec des banques, 16,1% avec les recettes des finances et d'autres avec des sociétés de leasing. Et de spécifier que les litiges sont moindres avec la CNSS car elle accepte de discuter avec les entreprises et de rééchelonner leurs dettes. Cette enquête indique aussi que les entreprises interviewées soutiennent la baisse de leur chiffre d'affaires de plus 62%. 42,2% d'entre elles ont renvoyé leurs employés.
M. Houas a assuré que les lignes de crédit, les mesures et décisions qui devaient bénéficier aux entreprises tunisiennes sont restées lettre morte. Rappelons que le 6 juin 2022, l'Institut arabe des chefs d'entreprises (IACE) avait souligné qu'aucun texte applicatif n'a été publié sur les douze prévus pour l'activation des mesures de la Loi de finances 2022. Idem, et après soixante jours de l'annonce du plan de relance économique le 1er avril dernier, seul un décret présidentiel relatif à une mesure sur les 42 annoncées a été publié, note l'institut.
Abderrazek Houas propose comme solution la mise en place de deux programmes : l'un sur cinq ans dont l'objectif est de fournir les financements aux entreprises et où l'Etat devrait ouvrir les marchés publics aux TPME ; et le second sur cinquante ans et vise à légiférer et changer les lois qui sont devenues archaïques et entravantes pour l'investissement, la production, et même pour l'administration. Il a aussi appelé à ne plus criminaliser la vie économique et à supprimer les peines privatives de liberté, en martelant que la Tunisie est le seul pays où lorsqu'on fait faillite on entre en prison.
Les TPME tunisiennes vivent une situation délicate. Les chiffres avancés par l'Association nationale des petites et moyennes entreprises sont plus qu'alarmants, car les TPME représentent 80% du tissu économique tunisien et la majorité des postes d'emploi.