L'agence de notation Moody's a indiqué, à la date du 27 janvier 2023, que la note de la Tunisie était passée de Caa1 à Caa2. L'annonce de la dégradation de la notation de souveraineté a suscité la réaction de plusieurs personnalités et experts économiques. La nouvelle vient renforcer leurs inquiétudes. Le docteur en sciences économiques, enseignant-chercheur à l'Université de Carthage et expert consultant, Aram Belhadj, a estimé que la nouvelle notation reflétait la dangerosité de la situation. Il a affirmé que la note de Caa2 signifiait que la Tunisie était au bord de la faillite. « Pour rappel, il ne reste qu'une seule notation dans l'échelle de l'agence Moody's (Caa3) pour déclarer que la Tunisie est un pays en faillite (In default) et donc incapable d'avoir des financements étrangers. Pour ce qui est des solutions, le rapport était clair : - Parvenir à un accord final avec le Fonds monétaire international (FMI). - L'importance de mettre fin au flou politique au sein du pays - La nécessité d'un consensus autour des réformes du programme gouvernemental présenté au FMI. - Le renforcement des réserves en devises dans l'avenir proche. Que Dieu protège notre pays », a-t-il écrit, dans une publication Facebook du 28 janvier 2023.
Le même constat a été élaboré par l'expert et professeur universitaire en sciences économiques, Ridha Chkoundali qui a rappelé que suite à l'annonce, en septembre 2022, de la conclusion d'un accord entre la Tunisie et le FMI, Moody's avait substitué les perspectives négatives par d'autres positives. Il a estimé que le report, en décembre de la même année, de l'étude du dossier tunisien par le conseil d'administration de FMI a poussé Moody's à dégrader la notation de souveraineté du pays. Ridha Chkoundali a souligné l'importance de collecter des aides financières internationales et des inquiétudes quant aux risques de défauts de paiement. Il a évoqué, dans une publication Facebook du 28 janvier 2023, l'impact de la détérioration de la situation financière du pays sur la disponibilité des carburants et des produits alimentaires. « Les principales raisons de cette baisse de notation sont : - L'incapacité de la Tunisie à mobiliser des ressources extérieures en devises sous forme d'aides bilatérales malgré la conclusion d'un accord avec les experts du FMI. - L'ampleur des besoins de la Tunisie en financement extérieurs, notamment pour cette année puisque selon la loi de finances 2023, la Tunisie aurait besoin de quinze milliards de dinars sous forme de prêts étrangers (cinq milliards de dollars). - La baisse continue des réserves en devises au sein de la Banque centrale de Tunisie en raison du déficit commercial historique et sans précédent. Ceci a provoqué une hausse de la pression exercée sur les réserves en devises laquelle a conduit aux difficultés rencontrées par le gouvernement tunisien en approvisionnement en produits de base. Ceci renforce l'hypothèse de défaut de paiement. -La faiblesse de la gouvernance et l'étendue des contraintes sociales qui expliquent, en partie, les raisons derrière la situation actuelle de la Tunisie. - Le retard dans la conclusion d'un accord final avec le FMI qui accroît les doutes quant à la réalisation des réformes économiques nécessaires. Ceci aggrave les dangers liés à la balance des paiements et le rééchelonnement de la dette qui pourrait causer des pertes pour les créanciers du secteur privé », a-t-il écrit. Ridha Chkoundali a considéré qu'en cas d'absence de certitude d'un accord avec le FMI et donc d'absence d'aides bilatérales, il ne restait plus qu'à emprunter sur le marché national. Il a estimé que cette pratique pouvait causer des manques de liquidité et porter atteinte aux investissements. Ceci provoquera une baisse de la croissance économique, une hausse du chômage, une hausse de l'inflation et, le plus dangereux, un effondrement du système monétaire et une perte de la confiance des épargnants en la capacité des banques à conserver leur argent.