Le député d'Al Horra, Sahbi Ben Fredj, vient de publier une synthèse des conclusions de la délégation du bureau exécutif de l'Association des magistrats tunisiens (AMT), suite à l'enquête qu'elle a mené après les alertes qu'il a lancé sur les énormes pressions subies par la justice pour enterrer l'affaire de Chafik Jarraya. Ainsi, et après avoir entendu le Premier président et le procureur général de la Cour d'appel de Tunis, l'AMT a précisé que le président de la Cour a expliqué qu'il a usé, pour sa décision de transférer le dossier de la 9ème chambre à la 10ème chambre, d'un document daté du 15 septembre 2016 et d'un autre daté du 5 septembre 2017 et qui stipulent que la 10ème chambre est la seule spécialisée dans les affaires judicaires militaires. C'est dans ce cadre qu'il a décidé d'un nouveau système le 29 nombre et qui entrait en vigueur le 4 décembre, sur la base duquel l'affaire de Chafik Jarraya a été transférée deux jours avant la date de l'audience consacrée aux recours de la défense fixée pour le 6 décembre.
Pour sa part, le procureur général a indiqué qu'il a confié l'affaire d'accusation dans le dossier Jarraya à la 9ème Chambre, comme c'est le cas depuis des années étant chargée de l'instruction dans les différentes affaires militaires. Ceci dit, il a fait remarquer que les deux documents présentés par le Premier président de la Cour d'appel de Tunis, et sur la base desquels il avait transféré le dossier Jarraya, ne comprenaient aucune signature ou tampon du tribunal, donc sans effet juridique outre son contenu explicitement contraire au Code des procédures. Pire, l'AMT a reçu du procureur général un document daté et signé le 15 septembre 2016 (la même date que celle du document présenté par le Premier président), mais qui ne stipule pas que la 10ème chambre est la seule habilitée à traiter les affaires judicaires militaires. C'est pour cette raison qu'il a refusé catégoriquement le transfert de l'affaire Jaraya, en rappelant que la loi lui confère une liberté totale dans la distribution des affaires sur les différentes chambres. La délégation de l'AMT a reçu un document écrit attestant que la 9ème Chambre de mise ne accusation traite d'habitude, les affaires militaires, sans exclusivité.
Ainsi et suite a ses investigations l'AMT affirme l'illégalité de la décision du président de la Cour d'appel de Tunis de transférer l'affaire Jarraya. Pour l'association, cette décision renforce les soupçons d'ingérence dans le processus judiciaire et dans les décisions judiciaires. Elle estime que les principes et fondement d'une justice juste et indépendante interdisent «de choisir un juge en particulier pour traiter une affaire en particulier».
Ainsi, un organe d'enquête impartiale, composé de magistrats, a confirmé ce qu'avait dénoncé le député une semaine auparavant. Sahbi Ben Fredj souligne l'importance du fait que le ministère public bouge pour mettre au jour les détails de ce scandale et déterminer la responsabilité de tous ceux qui seront révélés par l'enquête.