La troisième séance plénière de l'ANC, consacrée aux débats, article par article, de la Constitution, a tourné court, ébranlée par une polémique opposant Habib Ellouz, membre du conseil de la choura et élu Ennahdha à l'ANC, et Mongi Rahoui, du Front populaire. En fait, le rythme des travaux de l'ANC, déjà ralenti par des débats oiseux, n'avait pas besoin de cet énième clash qui confirme, si besoin est, que les constituants ne réussiront pas leur mission de terminer leurs discussions et d'adopter la Constitution à la date butoir du 14 janvier. Ce différend entre l'islamiste et le démocrate laïc a été déclenché suite aux déclarations du premier qui accuse le second d'être « un ennemi de l'islam ». « Nous avons adopté, a-t-il annoncé aux médias, cet article (Art.1, NDLR) qui énonce l'Islam en tant que religion de l'Etat, avec l'approbation de tous, sauf de Mongi Rahoui ». Ellouz ajoute fort maladroitement : « et le peuple tunisien prendra position sur ce type de personnes. » Cette déclaration a été jugée irresponsable et perçue comme un appel au meurtre. Toute la séance matinale du dimanche 05 janvier a été consacrée à cet incident. Pour se justifier, Habib Ellouz a encore une fois indiqué qu'on avait mal interprété ses propos et que ceux-ci avaient été sortis de leur contexte, affirmant qu'il ne visait nullement à « statuer sur le fait que l'élu (il évitera ostensiblement de prononcer son nom) était apostat. Ce rôle est dévolu aux seuls savants », a-t-il précisé. En réponse, Mongi Rahoui a dit avoir reçu des informations émanant du ministère de l'Intérieur selon lesquelles sa vie serait en danger. Plusieurs députés ont affirmé leur soutien à Mongi Rahoui et ont appelé à la révision de l'article 6, adopté la veille, pour y intégrer l'interdiction de « takfir » (accusation d'apostasie). Habib Ellouz a été poussé par Sahbi Atig, chef du bloc Ennahdha à présenter les excuses que tout le monde réclamait. Il s'est plié aux injonctions, mais en s'excusant auprès de ses collègues du retard que ses propos ont occasionné aux travaux de l'Assemblée.