Le Courant démocratique est prompt, à l'évidence, à dénoncer, à instruire les affaires, à juger, à prononcer les verdicts et à exiger leur exécution illico presto. Au nom de quoi ? Au nom de qui ? Au nom des positions et des revendications de son chef qui resteront dans les annales, du temps où il n'avait pas encore fait défection de son CPR ? Ou au nom de ses trois députés siégeant à l'Assemblée et qui ne représentent qu'une infime partie de la masse électorale souveraine ? L'un d'eux, en tout cas, s'est illustré dans la salle où son parti tenait une conférence de presse — à défaut de l'hémicycle — décrétant que «tous ceux qui les ont attaqués (Ndlr : en tant qu'opposés à la loi antiterroriste) sont les ennemis de la démocratie». Voilà une belle leçon de liberté d'expression et du droit à la différence qui peut se résumer en une phrase : «Si tu n'es pas d'accord avec moi et que tu le dises, tu es totalitaire et dictatorial». Et pourquoi pas hitlérien... Une leçon qui se hisse au rang de cours magistral quand son chef renchérit que plusieurs élus de la majorité «n'ont pas eu le courage de s'abstenir ou de voter contre ladite loi» et qu'ils lui en ont fait la confidence, prenant les Tunisiens pour des niais capables de croire que M. Abbou est devenu un curé de paroisse auprès duquel des élus chercheraient l'absolution en lui confessant leur péché majeur en tant que représentants du peuple: voter contre leur âme et conscience. Point étonnant, ce «cours», venant d'un adepte d'une école qui a souvent semé rumeurs, flou, doutes et fausses informations comme celle qu'il a osé proférer en traitant La Presse de «Journal de Nida Tounès». Allons donc M. Abbou... Heureusement que les urnes vous ont relégué à votre juste place. Et à lui d'apprendre enfin — ou de réapprendre — que le gouvernement qu'il veut appeler «à intervenir pour y opérer des changements» (Ndlr: comme ne le faisaient même pas Ben Ali et son clan), n'a pas la latitude d'intervenir dans la ligne éditoriale de notre journal, ni dans sa rédaction en chef. Ce qui n'entre même pas dans les prérogatives du PDG de l'entreprise. Pourtant, Abbou est très bien placé pour le savoir, du temps où il était ministre de la Troïka qui n'avait eu aucune influence sur La Presse. Et ce n'est pas faute d'avoir essayé...