Le premier projet de cette note a été présenté dans les différents gouvernorats et fait l'objet de concertations entre les quatre partis au pouvoir Le taux de croissance sera porté de 1,5 à 5%, les investissements de 77.048 à 125.000 MD, le chômage sera réduit de 15% à 11% et le revenu par tête passera de 8.283 à 12.400 DT. Une première lecture du document, mis hier à la disposition des journalistes, donne l'impression qu'il s'agit d'un programme électoral plutôt que d'une note réaliste ou encore de quelqu'un qui regarde si haut d'un endroit si bas... Le pays passe, en effet, par une crise économique aiguë qui frôle la dépression, alors que les projections pour le futur proche sont, à première vue, assez ambitieuses. Mais Yassine Brahim, ministre du Développement et de la Coopération internationale, semble maîtriser son sujet et avoir les idées claires en tête, bien que cette note ne constitue qu'un tout juste début pour un long parcours qui commence à presque zéro, mais qui ambitionne de placer le pays dans l'orbite des économies prospères et équilibrées. Le ministre fait état, en effet, d'une période tampon, où la croissance sera modérée aux alentours de 3% durant l'exercice 2016 et 2017. Ensuite le pays prendra son envol. Il s'agit au fait d'un envol hypothétique, car il n'aura lieu que si (et seulement si) «les conditions sécuritaires se stabilisent et que chacune des parties prenantes prenne ses responsabilités et y contribue...», affirme M. Yassine Brahim qui, malgré la morosité et la difficulté par lesquelles passe le pays, ne s'est pas empêché de tracer une trajectoire enthousiaste, tout en pensant aux moyens et à la faisabilité. «Il y a eu plus de 80 études sérieuses, réalisées depuis 2011 et sur lesquelles se sont basées les experts pour proposer un document de plus de 100 pages et qui servira de base pour le futur». Le premier projet de cette note a été présenté dans les différents gouvernorats et fait l'objet de concertations entre les quatre partis au pouvoir. Mieux encore, «aujourd'hui, la note d'orientation est soumise au grand public et des copies ont été adressées aux organisations nationales telles l'Utica et l'Ugtt», elle pourrait donc encore évoluer. «Elle a été toujours évolutive», confie le ministre, «même au niveau des experts qui l'ont réalisée». Le vrai paradoxe Le courant des événements qu'a connus le pays depuis 2011 a voulu que le pouvoir soit partagé, voire décentralisé. C'était inscrit dans la Constitution du 26 janvier 2014. Or en émettant une note aussi stratégique et importante dans un contexte où l'on ne sait encore comment cette décentralisation du pouvoir va être réalisée, ni quelles seraient les prérogatives des régions, le ministère du Développement prend le risque d'imposer des dispositions qui ne relèvent guère des priorités de certaines régions. Le risque est encore plus grand de revoir le pouvoir central décider pour la plus petite localité du plus lointain gouvernorat. Pourtant, chaque région a sa vérité, ses priorités, ses potentialités, etc. Soit. Le cadre régissant la décentralisation n'est pas encore prêt. «Il relève du débat politique», rappelle Yassine Brahim, précisant que la note trace juste l'orientation et c'est à chaque région de traduire cela sous forme de programmes en fonction de ses priorités et ses spécificités. Par exemple, dans le domaine de l'eau, le stress hydrique est un phénomène partagé par tous les gouvernorats, bien qu'à des degrés différents, il faudra que chaque région définisse des plans d'action pour y remédier. Et cela est vrai pour tous les domaines, l'industrie, la santé, l'éducation, l'énergie, le transport, etc. «Chaque région est appelée à instaurer un équilibre dans le développement entre les localités», a souligné le ministre. Cela étant, la note d'orientation 2016-2020 s'articule autour de trois axes. Le premier est consacré à un diagnostic de la situation ayant conduit à la saturation de l'ancien modèle de développement. Le deuxième dresse les lignes directrices du projet sociétal de la nouvelle Tunisie, et ce, dans tous les domaines. Et le troisième axe concerne les objectifs et les politiques permettant sa mise en œuvre. La mise en œuvre des réformes prévues par cette note devraient permettre de passer à un nouveau modèle de développement qui ambitionne d'être plus inclusif, plus créateur d'emplois et de richesses, plus équitable et surtout plus équilibré. L'espoir est permis !