Pour le responsable de la Chambre des fabricants de boissons alcoolisées, la Tunisie est appelée à se conformer à la législation européenne et mondiale Par le décret N° 1768 du 10 novembre dernier et selon l'article 40 de la loi de finances 2016 qui est entré en vigueur le 1er janvier, le gouvernement a décidé de faire baisser la taxe sur la consommation des alcools forts. De ce fait, le taux de la taxe pour le whisky, la vodka et le cognac est passé de 648 % à 50 % et, pour le gin, de 348 % à 50 %. Selon Mme Rym Ben Ali, directrice à la Direction générale des études et de la législation fiscale : «On a suivi une logique de révision des droits de consommation qui n'est pas spécifique aux boissons alcoolisées. Il était question aussi des ouvrages en métaux précieux, des roues, des climatiseurs. En ce qui concerne les boissons alcoolisées, on a remarqué que la taxation était forte. Cette nouvelle loi vise essentiellement à contrecarrer la contrebande qui ne déclare pas sa marchandise». Un marché réglementaire et transparent Et notre interlocutrice d'ajouter : «On veut limiter le marché parallèle et le remplacer par un marché réglementaire et transparent. De plus, les producteurs locaux des alcools forts ont profité de cette situation», Suite à cette révision des droits de consommation, M. Aymen Jabnoun, chef de service à la direction générale des études et de la législation fiscale, a noté que : «Les boissons alcoolisées en Tunisie proviennent essentiellement du marché clandestin. La quantité qui est importée est dérisoire. Je suis d'accord qu'on n'a pas fait une distinction entre les différents degrés des alcools. Dans tous les cas, s'il y aura une révision de la taxe, cela va se faire en vertu de la nouvelle loi. Nous avons simplement essayé de nous aligner sur les prix du marché noir». Les responsables au niveau de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica) ont cependant exprimé leur mécontentement à propos de cette nouvelle loi. Pour M. Mohamed Ben Cheikh, président de la Chambre nationale des fabricants de boissons alcoolisées: «Cette nouvelle loi est injustifiée», explique-t-il. Dans tous les autres pays du monde, la législation relative à la taxation de l'alcool stipule que la taxe de droit à la consommation d'alcool soit calculée par rapport au volume et au degré d'alcool : plus le degré d'alcool est élevé, plus la taxe est importante. Chez nous, on taxe les alcools faibles et on détaxe les alcools forts. Notre secteur emploie environ 3.000 agriculteurs, ce qui représente 15 mille postes d'emploi et 5 mille autres dans la transformation et l'industrie. M. Ben Cheikh rappelle qu'en Tunisie «il y a une vingtaine d'entreprises productrices de boissons alcoolisées qui rapportent à l'Etat environ 350 millions de dinars de taxes. Et puis, les producteurs de vin et de bière vont faire face à des difficultés car ils vont vendre et produire moins. Actuellement, l'Etat perd les taxes sur les chiffres d'affaires de la bière et du vin, dont la production est en train de baisser». Les alcools de luxe en Tunisie sont pour la plupart importés. En effet, chez nous, il existe seulement trois entreprises productrices d'alcool fort. «La valeur ajoutée des producteurs tunisiens d'alcool fort est nulle, puisque toute la matière première est importée, à savoir les arômes, le sucre, l'alcool éthylique..., estime ce spécialiste. Et le Tunisien, en général, consomme l'alcool, non pas pour le déguster ou pour le plaisir, mais pour se saouler. L'Etat est tout simplement en train d'encourager les gens à consommer de l'alcool fort, parce que la bouteille de Pastis par exemple est vendue à 12 dinars. Ce type d'alcool a, en outre, un impact négatif sur la santé publique et le milieu social. La consommation abusive de ce produit pourrait aboutir à une cirrhose, une alcoolémie ou des comas éthyliques».