L'évaluation des politiques publiques a trois objectifs : donner une plus grande légitimité aux pouvoirs publics, consacrer le principe de redevabilité et débattre sur les choix des politiques publiques. L'évaluation des politiques publiques a constitué le thème de la 2e édition de Tunisia Economic Forum, organisé le 7 avril par l'Institut arabe des chefs d'entreprise (Iace). Une thématique qui pose des problématiques majeures au niveau des différentes étapes d'élaboration des politiques publiques et aussi les lacunes au niveau de l'application et du suivi. Pour Mohamed Ennaceur, président de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), «l'évaluation des politiques publiques est une consécration de la démocratie participative. Il est impératif de consacrer la complémentarité entre les politiques publiques et les consensus sociaux, traduits au sein de l'ARP en premier lieu et par les autres acteurs concernés». De son côté, Sami Rezgui, professeur à l'Université de La Manouba, indique que l'évaluation des politiques publiques a trois objectifs, ceux de donner une plus grande légitimité aux pouvoirs publics, consacrer le principe de redevabilité et débattre sur les choix des politiques publiques. Des objectifs qui devraient répondre, également, aux attentes du public et à ses besoins réels. Ahmed Bouzguinda, président de l'Iace, indique qu'il est important d'instaurer la culture de redevabilité et d'assurer un rôle plus actif du secteur privé par l'amélioration de l'environnement des affaires. L'évaluation des politiques publiques est, ainsi, fondamentale, surtout avec la détérioration de la productivité et de la compétitivité de l'économie tunisienne. "Plus on améliore l'environnement des affaires, plus elles contribuent à la compétitivité de l'économie", indique M. Bouzguinda. Lacunes Pour ce faire, l'Iace s'est penché sur l'élaboration d'un ouvrage sur la réforme des politiques publiques, en axant sur le cadre conceptuel de l'évaluation, les acteurs, les méthodes et expériences comparées, la réforme du Code d'investissement, la réforme du secteur bancaire et les politiques actives d'emploi en Tunisie. Il existe actuellement en version électronique et sera imprimé en tenant compte des recommandations tirées de la 2e édition de Tunisia Economic Forum. Selon l'Iace, la notion d'évaluation des politiques publiques est totalement absente du vocabulaire juridique. Trois principaux organismes sont théoriquement chargés de l'évaluation des politiques publiques, s'agissant de la Cour des comptes, le Contrôle général des services publics (présidence du gouvernement) et le Contrôle général des finances (ministère des Finances). Un nouveau organisme a été créé en 2013, soit l'Instance générale de suivi des programmes publics (Igspp). D'autres organismes contribuent également à la mission d'évaluation des politiques publiques dans les administrations centrales. Toutefois, les rapports élaborés par ces institutions sont essentiellement des rapports de mission de contrôle, d'audit et de suivi, et non des rapports de missions d'évaluation. A ce niveau, Abdellatif Kharrat, président de la Cour des comptes, indique que certaines difficultés entravent les missions d'évaluation. "La Cour des comptes a pour missions de contrôler en toute transparence et indépendance et aussi apprécier les politiques de gestion. Mais les politiques publiques ne sont pas toujours exprimées dans des stratégies et des objectifs clairs. Ajoutons à cela que les systèmes d'information ne sont pas toujours dotés des outils nécessaires pour l'évaluation", affirme-t-il. Mesures On estime que la nouvelle institution, l'Igspp, qui a réellement démarré en 2015, pourra renforcer cette démarche d'évaluation des politiques publiques, s'appuyant, selon son président Badreddine Braiki, sur une approche participative. Cette approche s'appuie sur la préparation des différentes structures à l'auto-évaluation et l'insertion de l'évaluation dans le processus de gestion. "Nos principales missions consiste en l'aide à la décision, l'amélioraton des méthodes de gestion des politiques et la contribution à l'institutionnalisation de l'évaluation des politiques publiques", précise-t-il. Il ajoute qu'une application nationale pour le suivi des projets nationales est en cours d'élaboration par le Centre national de l'informatique (CNI), facilitant la soumission de rapports instantanés. La présidence du gouvernement a, ainsi, signé un accord-cadre avec le CNI au mois d'octobre dernier. Un deuxième accord-cadre sera signé prochainement avec le ministère du Développement et de la Coopération internationale. Des mesures qui devraient être consolidées par une vision globale des politiques publiques et aussi des visions sectorielles. L'Iace compte, ainsi, publier des rapports annuels consacrés à des thèmes spécifiques, tels que l'emploi et la gouvernance. Des rapports qui ont pour but de contribuer à l'effort d'évaluation des politiques publiques.