Dans le cadre des festivités de la fête du Travail, le ministère des Affaires sociales a organisé hier une journée pour rendre hommage aux travailleurs des secteurs public et privé et décerner des prix aux travailleurs qui se sont distingués le plus cette année. En présence de la Cheffe du gouvernement, Najla Bouden, du ministre des Affaires sociales, Malek Ezzahi, du secrétaire général de l'Ugtt, Noureddine Taboubi, du président de l'Utica, Samir Majoul, et de la vice-présidente de l'Utap, Ines Bessaâd Naggar, la cérémonie a pris des airs d'entente entre l'ensemble des partenaires sociaux. Mais dans les discours, chacun a trouvé le moyen de glisser ses revendications et d'affirmer publiquement ses divergences vis-à-vis de certaines questions. Lors de son long discours, somme toute classique, le ministre des Affaires sociales, Malek Ezzahi, peut-être pour ne pas créer des tensions inutiles, a supprimé un passage entier dans lequel il évoquait «le rétablissement de la trajectoire de la révolution» et «la construction d'une nouvelle République, amorcée suite aux décisions du 25 juillet». Cette phrase que l'on peut lire dans la transcription du discours distribuée aux journalistes n'a en effet pas été prononcée par le ministre. Des réalisations malgré le contexte De son côté, dans une langue arabe toujours aussi approximative, la présidente du gouvernement, Najla Bouden, a tenu à insister sur le contexte sanitaire, économique, social et institutionnel dans lequel a commencé à opérer son gouvernement. Elle a estimé que malgré ces contraintes multiples aggravées par une conjoncture internationale délicate, son gouvernement a tout de même eu l'audace d'entamer un certain nombre de réformes pour améliorer le climat des affaires, le système fiscal et l'efficacité des entreprises publiques. Toutefois, la Cheffe du gouvernement donne le ton et précise que la révision des salaires se fera, mais dans la limite que peuvent offrir les finances de l'Etat et la viabilité des dettes. Du haut de son pupitre, se tournant vers le secrétaire général de l'Ugtt, la Cheffe du gouvernement évoque clairement le sort des entreprises publiques. «L'Etat n'a nullement l'intention de céder les entreprises publiques à caractère stratégique, qui seront restructurées à la lumière des missions d'audit, dit-elle. Cependant dans les secteurs concurrentiels, l'Etat prendra ses responsabilités en assurant son rôle régulateur à travers la mise en place d'un cadre législatif et réglementaire efficace». Bouden affirme qu'une liste de ces entreprises stratégiques sera arrêtée prochainement et que de nouvelles bases de gouvernance seront établies dont la création d'une structure de gestion des participations. Hémorragie des entreprises publiques Dans son allocution, Samir Majoul, le président de l'Utica, ne manque pas lui aussi de pointer du doigt la gestion des entreprises publiques. Selon lui, il est grand temps de stopper l'hémorragie des entreprises publiques, qui «dans certains secteurs détiennent le monopole, mais continuent toutefois à épuiser le budget de l'Etat, au lieu d'être des locomotives de l'économie et de la croissance». Pour le patron des patrons, le repli de l'économie, l'investissement en berne et la crise des liquidités doivent être contrés par de vraies réformes qui doivent être engagées le plus rapidement possible «pour éviter le pire après avoir abusé des tranquillisants». Dans son rôle de défenseur des entreprises privées, Samir Majoul a critiqué la campagne anti-spéculation qui avait été menée par le gouvernement à la veille du Ramadan, estimant que des abus avaient été enregistrés de la part des autorités et de la police, à l'encontre d'honnêtes entrepreneurs travaillant en toute légalité. Il a noté que contrairement aux idées reçues, c'est le manque de matières premières et non la spéculation qui a créé la pénurie. «La valeur du secteur privé organisé et son rôle de création de la valeur ajoutée ainsi que son rôle social, pour pallier l'incapacité des politiques publiques sont indéniables», martèle par ailleurs l'imposant président de l'Utica. Un dialogue honnête et impartial Pour sa part, le secrétaire général de l'Ugtt a préféré évoquer dans son discours la situation politique du pays, en insistant sur l'importance d'un dialogue «honnête et impartial» qui ne soit pas dicté par l'étranger. «Il ne peut y avoir un consensus imposé», précise-t-il, sans donner plus de détails quant à la participation ou pas de l'organisation syndicale au dialogue que s'apprêterait à lancer le Président de la République. Sur un autre plan, Noureddine Taboubi a mis en garde contre la diabolisation des cadres de l'Etat, sous la bannière de la lutte contre la corruption. «Cette guerre ne doit pas plomber les initiatives», déclare-t-il.