Par Samira DAMI L'affaire du film iranien Muhammad, le messager de Dieu, réalisé par Majid Majidi a suscité toute une polémique et notamment, une levée de boucliers de la part de certaines parties religieuses et politiques. D'autre part, sur les réseaux sociaux, le débat a été trés vif entre ceux qui ont condamné le film et ceux qui ont refusé catégoriquement la censure que subirait ce long métrage. Considérée comme l'une des plus grosses productions historique et religieuse jamais réalisée en Iran (40 millions de dollars, soit 150 millions de dinars) et dont le tournage a duré 8 ans, elle se focalise sur l'enfance du Prophète de l'Islam, de la naissance jusqu'à l'âge de 13 ans. Déjà, dès l'annonce de la projection du film, sur les réseaux sociaux, prévue pour le 27 septembre au Colisée, des parties religieuses et politiques (notamment le parti Tayyar El Mahabba dirigé par Hechmi Hamdi) ont jeté l'anathème sur ce film sorti en 2015 et interdit par l'autorité religieuse d'Al Azhar en Egypte et le Mufti de l'Arabie Saoudite. Seuls l'Irak et le Liban parmi les pays arabes ont, jusqu'à aujourd'hui, outrepassé l'interdiction et ont permis la projection du film. Ces autorités ont dénoncé et vivement condamné «la représentation du Prophète, car elle lui ôte la dimension sacrée et spirituelle, dont il jouit». Or, visiblement, aucune de ces parties stigmatisantes n'a vu le film car les journalistes et les critiques qui ont eu l'opportunité de le voir sont catégoriques : «le visage du Prophète de l'Islam n'apparaît jamais, seuls sa silhouette et son profil sont filmés. Il s'agit, donc, d'un biopic «sans visage» comme l'ont mentionné plusieurs critiques. Des parties opposées et adeptes d'une liberté d'expression totale ont, de leur côté, condamné «la censure» qu'aurait subi ce film de quatre heures et dont le but est, justement, de rompre avec «l'image violente de l'Islam propagée à travers le monde par les groupes djihadistes». Le réalisateur espérait, justement,«unir les musulmans sunnites et chiites qui se déchirent, actuellement, dans plusieurs régions du monde musulman». Tension et discorde Mais, renseignements pris, toute cette polémique s'est invitée avant la lettre d'autant que le groupe Gobantini, qui aurait reçu des menaces de la part d'une partie anonyme, affirme «qu'il n'a pas encore reçu le film, qu'il n'a pas encore signé de contrat et qu'il n'a pas encore déposé de demande de visa d'exploitation auprès du ministère de la Culture». Tandis que du côté du ministère de la Culture, Mounira Ben Halima, directrice du cinéma et des arts audiovisuels, nous a déclaré catégorique : «Nous n'avons reçu aucune demande de visa d'exploitation commerciale concernant ce film». Voilà une autre fausse polémique suscitée sur les réseaux sociaux, et que certains attisent et exploitent à des fins politiques pour le moins populistes et démagogiques s'érigeant en véritables autorités religieuses, s'empressant de polémiquer sur des œuvres d'art qu'ils n'ont de surcroît pas vues ou lues. Certes, il est vrai que l'art ne tolère pas la censure et peut susciter, de ce fait, des débats plus que houleux, mais il est sûr que toutes ces querelles anticipées attisent les tensions et créent la discorde surtout qu'il s'agit de l'hypothétique projection d'un film qui n'est pas encore parvenu au distributeur et que personne, parmi tous ceux qui l'ont condamné et vilipendé, n'a encore découvert. Et cela est d'autant plus insupportable que ce film vise à donner une image positive de l'Islam dont le monde musulman a bel et bien besoin, et aujourd'hui plus que jamais.