La Tunisie n'a pas d'autres choix que la tenue des élections municipales dans les délais et conformément aux règles et normes requises, si elle veut redorer son blason, en convient la présidente de l'Association tunisienne pour l'intégrité et la démocratie des élections (Atide), Leila Chraibi Interrogée lors de la conférence de presse, tenue hier à Tunis par Atide et l'Association Kolna Tounes sur la libre administration, Chraibi est revenue sur les craintes de certains Tunisiens par rapport à la tenue des municipales dans les délais (mai prochain), en référence à la conjoncture politique, économique et sociale qui prévaut dans le pays. « Les élections municipales auront-elles lieu ou pas ? Je ne peux pas répondre à cette question. Toutefois, je peux confirmer que l'on fait face à des difficultés, à tort et à travers d'ailleurs et dans plusieurs régions. D'autant plus que le processus des échéances municipales était mal parti. D'abord au niveau de la loi, puisqu'on a accusé 6 mois de retard à cause de l'article relatif au vote des sécuritaires. Puis, il y avait le problème de l'Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) qui a souffert d'un grand bouleversement inhérent à sa composition. Sans oublier les partis politiques qui ont longtemps manœuvré pour retarder la tenue du scrutin, du fait que la plupart d'entre eux n'étaient pas prêts », se désole Chraibi. L'autre difficulté à laquelle fait face l'Instance électorale encore aujourd'hui est le manque d'effectifs d'après l'activiste associative. Ce qui constitue un obstacle de taille devant la tenue des élections dans des conditions propices à la réussite, admet-elle. « La loi stipule que l'Isie peut recruter du personnel pour une période bien déterminée, or il se trouve que l'on est toujours handicapé par cette défaillance à quelques mois du scrutin », dénonce le président de l'Isie. Faute de sensibilisation, un désintérêt général est perceptible du côté des citoyens quant aux élections municipales. Un état de fait imputé à la crise de confiance qui s'est installée entre les citoyens et les politiques, de l'avis de l'activiste. « De nombreux citoyens tunisiens ne croient plus à la politique et se méfient désormais de l'élite, eu égard au déclin perçu à tous les niveaux », précise Chraibi. Pour elle, la priorité des priorités n'est autre que la restauration de la confiance entre les électeurs et les politiques, afin de se rattraper avant qu'il ne soit tard. « Pour restaurer cette confiance, il faut d'abord procéder à un renforcement de l'Isie tant en matière d'effectifs qu'en logistique. Puis, il faut veiller au respect du principe de libre administration. Ce principe, stipulé par la Constitution dans l'article 132, plaide pour la confiance entre la municipalité et le citoyen à travers la participation des habitants de la commune à la prise de décisions concernant les projets municipaux et l'application de la démocratie participative au niveau local ». Or, « l'article 28 du projet du Code des collectivités locales dispose que «le cadre et les modalités de la méthodologie participative sont réglementés par un décret gouvernemental sur proposition du Conseil supérieur des collectivités locales et sur avis de la Haute cour administrative». Et Chraibi d'ajouter : « Cette démarche ne permet, toutefois, pas aux municipalités d'appliquer des mécanismes participatifs efficaces et adaptés aux spécificités de chaque municipalité. Car, dictés par le pouvoir central, les mécanismes participatifs respecteraient peu le principe de la libre administration, pilier de la décentralisation, et permettant à chaque municipalité de choisir le mécanisme qui lui convient ». La présidente de l'Atide appelle, au demeurant, au respect de la méthodologie participative qui doit être adoptée par le Conseil municipal et son administration en concertation avec les composantes de la société civile locale, pour une gouvernance locale adaptée à la réalité du terrain. Au lieu de se chamailler, les partis politiques et les acteurs de la société civile n'ont qu'à se pencher sur ces principes garants d'une bonne gouvernance locale, pour promouvoir l'image du pays sur le double plan régional et international, mais aussi pour jeter les fondements d'une véritable démocratie, d'après la président de l'Association.