Mouvement dans le corps des magistrats militaires    Nafaa Baccari nommé directeur général de l'Agence nationale pour la maîtrise de l'énergie    Un conseil ministériel consacré à l'initiative de l'ESCWA relative à la conversion de la dette extérieure en investissements    La Tunisie mise sur la coopération économique africaine pour ouvrir de nouveaux marchés    Tennis de table – Championnats d'Afrique (U19) : Wassim Essid médaillé d'or    Pharmacie, pétrole, douanes : l'Inde et la Suisse dans le viseur de Trump    Vague d'indignation après le retour ignoré d'Ahmed Jaouadi    Kerkennah: parution de l'évaluation multidimensionnelle des risques qui pèsent sur l'archipel    Reconnaissance de la Palestine: l'Italie pose ses conditions    Le Comité National Olympique accueille avec fierté Jaouadi    Hafedh Laamouri : le vrai enjeu du système de sécurité sociale, c'est l'emploi, pas le vieillissement !    La SFBT publie son 10ᵉ rapport ESG : performance, responsabilité et engagement durable    Ahmed Jaouadi rentre à Tunis sans accueil officiel    Grave accident de la route à Mareth : deux morts et sept blessés    Orchestre du Bal de l'Opéra de Vienne au Festival d'El Jem 2025 : hommage magique pour les 200 ans de Strauss    Le Théâtre National Tunisien ouvre un appel à candidatures pour la 12e promotion de l'Ecole de l'Acteur    Ridha Zahrouni: « le retard de la réforme éducative impacte négativement la rentrée scolaire »    Données personnelles, IA, caméras : ce que changerait la proposition de loi déposée au Parlement    Pèlerins tunisiens : 24 000 consultations médicales prévues pour le Hajj 2025    Patrimoine arabe : la Mosquée Zitouna parmi les sites retenus par l'ALECSO    Tunisie : plus de 25 000 signalements d'enfants en danger chaque année    Comment le SMU Startup Fest propulse les jeunes startups de l'idée au marché    Vous voulez obtenir un prêt en Tunisie ? Voici tout ce qu'il faut savoir    Météo en Tunisie : ciel clair, températures entre 29 et 34 degrés    De Douza Douza à Jey Men Rif : Balti fait résonner Hammamet    Plastique : Démêler le vrai du faux à l'ouverture des négociations du traité mondial à Genève    Gouvernorat de Tunis : un plan d'action pour éradiquer les points noirs    Des ministères plus réactifs que d'autres à la communication du président de la République    Visa USA : une caution financière de 15 000 dollars pour certains pays    Un séisme de magnitude 5,7 secoue le sud de l'Iran    La police municipale dresse le bilan de ses dernières interventions    Place Garibaldi et rue Victor Hugo : Sousse repense son centre-ville avec le projet Femmedina    Jeux africains scolaires : la Tunisie brille avec 155 médailles, dont 34 en or    Israël : Netanyahu envisage une occupation totale de Gaza, selon des fuites    Photo du jour - Ahmed Jaouadi, le repos du guerrier    Elles ont osé : Portraits de tunisiennes qui ont fait trembler le patriarcat    Soupçons de manipulation de l'orientation universitaire : le service des crimes informatiques chargé de l'enquête    À quelques jours de l'ultimatum, Trump déploie ses sous-marins et envoie son émissaire à Moscou    Ahmed Jaouadi champion du monde à nouveau à Singapour dans la catégorie 1500 m NL (vidéo)    La Nuit des Chefs au Festival Carthage 2025 : la magie de la musique classique a fait vibrer les cœurs    Robyn Bennett enflamme Hammamet dans une soirée entre jazz, soul et humanité    Fierté tunisienne : Jaouadi champion du monde !    Au Tribunal administratif de Tunis    Najet Brahmi - La loi n°2025/14 portant réforme de quelques articles du code pénal: Jeu et enjeux?    Ces réfugiés espagnols en Tunisie très peu connus    « Transculturalisme et francophonie » de Hédi Bouraoui : la quintessence d'une vie    Le Quai d'Orsay parle enfin de «terrorisme israélien»    Mohammed VI appelle à un dialogue franc avec l'Algérie    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le compromis kantien
Philosophie et psychanalyse
Publié dans La Presse de Tunisie le 13 - 07 - 2018


Par Raouf SEDDIK
Nous avons eu l'occasion de souligner, dans les semaines précédentes, la forte relation qui existe entre la conception de l'âme et ses évolutions dans l'époque moderne et, d'un autre côté, les réponses apportées par les philosophes à la question des fondements de la connaissance. On peut dire, de ce point de vue, que la question des mathématiques joue un rôle déterminant, parce que ces dernières livrent le constat d'une connaissance où l'homme éprouve une certitude partagée. Mais la volonté d'étendre l'aire de certitude aux autres domaines de la connaissance, que ce soit aux réalités suprasensibles de la métaphysique ou aux réalités sensibles de la physique, cela induit des difficultés au sujet desquelles nous avons pu voir que rationalistes et empiristes se livraient un combat à l'issue improbable, sans parler des querelles qui existent à l'intérieur de chacun des deux camps : querelles au sujet desquelles nous ne nous sommes pas attardés, mais qui n'en existent pas moins. Il y a d'ailleurs un troisième parti, dans lequel nous placerions Pascal et Rousseau, et pour lequel le projet même de cette extension de l'aire de certitude est d'emblée contestable, parce qu'il correspond, selon eux, à une démission de la vocation religieuse ou morale de l'homme...
Or on peut considérer que l'ambition de Kant est de réinvestir le terrain éthico-religieux, comme fait Rousseau dont il était un grand admirateur, sans toutefois tourner le dos à la question des fondements de la connaissance, ni à celle des mathématiques comme expérience de certitude.
La découverte d'une «sensibilité pure»
La critique kantienne, qui ramène le domaine de la connaissance à l'intérieur de certaines limites — celles des «phénomènes» — et, par là, ouvre largement du champ à la « raison pratique » — celle qui ne s'occupe pas de ce qui est mais de ce qui doit être —, cette critique est celle-là même qui va tenter de trouver pour rationalistes et empiristes une position de compromis... Pareille position nous intéresse parce que, là encore, elle entraîne la psychologie sur une conception nouvelle de l'âme qui va servir de point d'appui, explicite ou implicite, à tout un courant théorique.
Quelle est cette position de compromis ? Kant admet avec Locke et Hume qu'il n'y a pas de connaissance sans sensibilité, mais il fait une différence entre la sensibilité au sens habituel du terme, qui produit sur l'intellect des «impressions » à partir d'objets externes, et une sensibilité «pure», qui précède toute impression. Il y a, dit-il, des «formes a priori» de la sensibilité. Elles renvoient à l'espace et au temps. Or, dans ce domaine de la sensibilité pure, il y a connaissance possible, bien que l'intellect ne se trouve affecté par aucun objet. Le tort des empiristes, du point de vue de Kant, est donc d'étendre à l'ensemble de la connaissance humaine l'expérience de la connaissance en tant qu'elle résulte de l'affection par un objet. La géométrie, l'arithmétique ainsi qu'une physique générale ou pure relèvent toutes de cette connaissance positive qui n'est pourtant le produit d'aucune affection par un objet, mais qui suppose cependant une sensibilité ou une réceptivité à travers ces formes a priori de la sensibilité. Kant prend soin ici de bien séparer cette connaissance pure d'une part de la logique d'autre part, que les philosophes empiristes avaient tendance à amalgamer, de manière à pouvoir soutenir que si ces connaissances se passent de toute impression sensible, c'est précisément parce qu'elles ne nous apprennent rien sur le réel, qu'elles ne sont donc pas vraiment des connaissances : elles ne seraient qu'une mise en ordre de l'entendement du point de vue de son fonctionnement correct. Or, fait remarquer le philosophe allemand, cette fonction de mise en ordre est vraie de la logique, mais pas des mathématiques.
Résumons-nous encore : toute connaissance empirique, portant sur des objets, requiert en effet une affection et il n'est pas question d'y faire intervenir, comme voudraient Descartes et ses successeurs rationalistes, des «idées innées» pour rendre compte de la possibilité d'une connaissance stable qui se distinguerait d'une simple conjecture ou opinion reçue. D'autre part, les connaissances dont l'objet se situe en dehors de la sphère de la sensibilité — celles de la métaphysique — sont des connaissances illusoires. La théologie, par exemple, ne peut pas être une science et il en est de même de la... psychologie ! Nous reviendrons bien sûr sur cette assertion qui semble en contradiction avec l'ensemble du présent propos...
Dans le même temps, il n'est pas vrai que l'âme soit, comme l'affirment les empiristes, une «tabula rasa». Il y a, disions-nous, des formes a priori de la sensibilité. Il y en a d'autres de l'entendement : ce que Kant appelle les «catégories» ou concepts a priori . Et, à vrai dire, il n'est nulle connaissance qui ne soit le fait d'une conjugaison entre les formes a priori de la sensibilité et les formes a priori de l'entendement. Il y a donc bien quelque chose d'inné en l'âme, qui précède toute expérience, mais il ne s'agit pas d'idées : il s'agit de structures fondamentales sans lesquelles aucune connaissance empirique ne serait possible et sans lesquelles l'esprit de l'homme ne pourrait pas non plus s'adonner, comme il le fait depuis la nuit des temps, à la géométrie et à l'arithmétique ni affirmer des vérités sur les principes généraux de la physique.
Il y a des propositions universelles et nécessaires : elles existent bel et bien, contre l'avis de Hume, mais cela, on le doit à ces structures fondamentales dont nous héritons, et non à des «idées innées» en nous. Ce sont elles qui confèrent à nos jugements leur valeur de réelles connaissances scientifiques, par delà leur caractère de simple constat factuel concernant tel ou tel événement... Mais il y a un prix à ce retour des propositions universelles et nécessaires : elles ne valent que dans le monde des phénomènes, qui n'est pas le monde en soi mais le monde tel qu'il nous apparaît dans le prisme de notre sensibilité.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.