Le président d'Ennahdha Rached Ghannouchi continue sa mission de négociation sur les conditions de «partenariat avec Youssef Chahed». Sauf que la posture du chef du gouvernement a changé considérablement, ce qui lui permet désormais d'imposer ses desiderata, au regard du poids réel qu'il a acquis au Palais du Bardo Il est un fait qui distingue les communiqués publiés régulièrement par Ennahdha à l'issue des réunions périodiques du Conseil de la choura ou du bureau exécutif : il faut être un fin connaisseur de ce qui se passe au sein du parti nahdhaoui pour comprendre les termes utilisés dans ces déclarations, à l'instar du terme «partenariat» (la traduction de charaka) qui supplante celui de «consensus» (tawafok). Ainsi, le communiqué sanctionnant les travaux de la 22e session du Conseil de la choura tenus samedi et dimanche derniers à Hammamet a-t-il introduit un nouveau concept dans le lexique politique nahdhaoui : il s'agit du terme «partenariat» entre Ennahdha et Youssef Chahed. Et le président d'Ennahdha Rached Ghannouchi d'être chargé de poursuivre, avec l'assistance d'un groupe de responsables désignés par le Conseil de la choura, «les négociations avec Youssef Chahed en vue d'asseoir les conditions nécessaires à l'instauration du partenariat (charaka, en arabe) avec le chef du gouvernement. Et les observateurs de préciser que les termes choisis par les rédacteurs du communiqué montrent qu'Ennahdha est déjà en pourparlers avec Youssef Chahed pour établir avec lui une relation de partenariat qui va au-delà de l'épineuse question de son intention de se porter candidat à l'élection présidentielle ou d'annoncer publiquement qu'il y renonce afin que son gouvernement continue à bénéficier du soutien d'Ennahdha. Il semble que le parti nahdhaoui a opté pour une nouvelle stratégie: négocier les assurances que pourra lui garantir Youssef Chahed dans la mesure où il est presque acquis maintenant que le chef du gouvernement abordera les prochaines élections présidentielle et législatives en tant qu'acteur de premier plan, soutenu qu'il est par un bloc parlementaire «la Coalition nationale», qui compte 51 députés et qui a déjà annoncé sa future transformation en un parti politique soutenant Youssef Chahed, qu'il se porte candidat au Palais de Carthage ou que son parti remporte les législatives de fin 2019, ce qui l'habilitera à être choisi pour présider le prochain gouvernement. En d'autres termes, Ennahdha aurait compris qu'il n'est plus productif d'exiger ou d'imposer à Youssef Chahed de quitter le gouvernement au cas où il aspirerait à devenir le futur président de la deuxième République. Idem pour ses ministres qui veulent briguer des sièges au palais du Bardo. Et pour être plus clair, Ennahdha serait arrivé à la conclusion que Youssef Chahed a changé de posture et a acquis le statut d'un partenaire qui négocie désormais dans une position de force. Et c'est peut-être la raison pour laquelle les nahdhaouis ne parlent pas de «cet ultimatum tacite» qu'ils brandissaient à l'encontre de Youssef Chahed lui demandant de s'exprimer sur ses ambitions présidentielles au risque de perdre leur soutien. Les analystes auront remarqué que les participants à la dernière session du Conseil de la choura n'ont pas évoqué dans leur communiqué final la nécessité pour Youssef Chahed de répondre à la question : va-t-il se porter candidat à la présidentielle ou pas ? Ils ont insisté plutôt sur la nécessité pour Rached Ghannouchi et les négociateurs qui l'accompagnent dans ses entretiens avec le chef du gouvernement de veiller à renforcer les conditions de négociation en vue de la relation de partenariat que le parti établira avec le chef du gouvernement (considéré par le parti nahdhaoui comme l'un des grands favoris des futures élections). Mardi 10 octobre, le président d'Ennahdha a rencontré le chef du gouvernement dans le cadre de la mission de négociation qui lui a été confiée par le Conseil de la choura. Et la communication officielle répercutée par Ennahdha s'est contentée de réaffirmer les positions déjà connues du parti sans donner la moindre information sur les intentions ou programmes à venir de Youssef Chahed sauf son projet de procéder à un remaniement de son gouvernement après l'adoption par l'ARP du budget de l'Etat et de la loi de finances 2019, c'est-à-dire après le 10 décembre prochain. D'autres sources révèlent que le remaniement aura lieu en janvier 2019 mais personne ne sait quels ministres et ministères seront concernés.