Les députés représentant les différents groupes parlementaires ont souhaité intervenir lors de la séance plénière tenue hier à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) consacrée à l'audition des ministres de la Justice et de l'Intérieur à propos des déclarations du collectif de défense des martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi. Le député Samir Dilou (Ennahdha) a souligné la nécessité pour la justice de préserver son indépendance et de se tenir à l'écart des pressions, que ce soit de la part du pouvoir exécutif, des médias, des partis ou encore de la société civile, relevant que «les audiences se déroulent désormais sur les écrans de télévision, ce qui va à l'encontre de la confidentialité de l'enquête». Le député Mohamed Ben Salem (Ennahdha) a indiqué que le «but de présenter les preuves est d'éclairer la justice et non de chercher, à tout prix, de condamner le mouvement Ennahdha». Il a rappelé que Mustapha Khedher (accusé par le collectif de défense des martyrs Brahmi et Belaid de diriger une organisation secrète liée à Ennahdha et qui serait responsable de ces deux assassinats) a été arrêté alors qu'Ennahdha était au pouvoir, «ce qui montre l'absence d'une quelconque volonté de dissimuler la vérité». De son côté, Fathi Ayadi (Ennahdha) a estimé que «l'accusation systématique du mouvement Ennahdha d'avoir organisé les assassinats n'est qu'une preuve de l'échec des adversaires politiques». Selon lui, ce qui se passe aujourd'hui n'est qu'une anticipation des élections de 2019 dans le but d'envenimer la situation avant l'adoption du budget de l'Etat de 2019. L'échange des accusations, a-t-il dit, a porté atteinte au climat politique et contribué à consacrer le manque de confiance envers les politiques. Pour sa part, Mbarka Aouania, veuve de Mohamed Brahmi (Front populaire), a critiqué les précédentes déclarations du ministère de l'Intérieur par la voie de son porte-parole qui a démenti les déclarations du comité de défense des deux martyrs au sujet de la «chambre noire» et des scellés. Pour elle, le ministre de l'Intérieur a, volontairement, dissimulé la vérité, s'interrogeant sur la raison pour laquelle un procès-verbal n'a pas été signé par le ministère de l'Intérieur lors de la réception des documents le 19 décembre 2013. S'adressant au ministre de la Justice, Aouania l'a appelé à révéler sa position quant aux déclarations du ministère de l'Intérieur au sujet des autorisations judiciaires et du vol des scellés du dossier Belaïd et Brahmi. Rim Mahjoub (Allégeance à la patrie) a estimé que «l'existence d'une organisation hors Etat représente un danger pour la sécurité du pays», rappelant que le mouvement Ennahdha avait eu un appareil secret reconnu par l'ancien dirigeant du mouvement, feu Moncef Ben Salem, dans son livre «les années de braise». Par ailleurs, elle a appelé le ministre de la Justice à reprendre l'interrogatoire du dénommé Mustapha Khedher après la découverte de nouvelles informations. La députée a également demandé à la présidence du gouvernement d'ouvrir une enquête au sein du ministère de l'Intérieur sur les documents en sa possession en lien avec «la suspicion quant à l'existence d'un corps de sécurité parallèle et à l'infiltration des institutions de l'Etat». Le président de la République, a-t-elle encore proposé, doit convoquer le Conseil de sécurité nationale dans les plus brefs délais, d'autant qu'il s'était engagé à dévoiler la vérité. De son côté, Zouheir Maghzaoui (mouvement Echaâb) a estimé que la responsabilité morale dans les assassinats incombe à ceux qui étaient au pouvoir en 2013, en allusion à la Troïka.