Plus de 200 films ont été programmés aux Journées cinématographiques de Carthage, on a vu pour vous quelques-uns mais priorité aux Tunisiens, on ne vous parlera que d'un seul cette semaine : celui de Mohamed Zran, Vivre ici (Zarzis). La projection a eu lieu, dans la salle 7e art, qui était pleine, à l'image peut-être de toutes les salles au moment des JCC qui attirent les professionnels mais aussi les amateurs et les passionnés de cinéma, d'ici et d'ailleurs. Ceux d'ici (Tunisie) ont eu l'occasion de voir la ville de Zarzis autrement, à travers ce documentaire. Ceux d'ailleurs ont fait un voyage-découverte au cœur du Sud tunisien, et pour une fois, pas à dos de dromadaire. En effet, ce film n'a montré ni Sahara, ni henné, ni folklore. C'est une vision originale et propre à son réalisateur d'une ville qu'on devine chère à son cœur. Zarzis présente la réalité d'une ville tunisienne du Sud à travers une galerie de portraits, dont le principal est celui de Simon, le droguiste de la grande place. C'est un vieux monsieur de confession juive qui tient sa boutique depuis 50 ans: «50 ans derrière ce comptoir», affirme-t-il à un moment du film. Il incarne l'attachement infaillible à la mémoire collective locale. Une palette de jeunes fragilisés par les mutations illustre la deuxième voie. Un face-à-face qui trouve souvent dans le magasin de Simon,un lieu de croisement et de rencontre, une occasion propice d'échanger leurs points de vue ou de confier leurs intimes secrets. Tahar, l'instituteur, le progressiste qui s'enflamme joyeusement à commenter la situation dans le monde et à clamer sa position anti-mondialisation; Hédi, le peintre maudit, expulsé de France ; Fatma, la marieuse, l'entremetteuse, la messagère ; Béchir, le chauffeur de taxi, serviable, ami de tout le monde… Tout ce beau monde nous offre des discussions et des situations tantôt drôles, tantôt dramatiques de leurs vécus, de leurs expériences et de leur amour pour leur ville Zarzis. En présentant le film avant la projection, Mohamed Zran a tenu à mettre à l'honneur le compositeur de la musique du film, le jeune Tunisien Amine Bouhata, qui a été l'invité, il y a quelque temps, de notre rubrique «Génie de jeunesse». C'est que la musique est «du sur mesure», chose qui se fait rare dans notre cinéma. Un bon point pour le film, mais, ça aurait été parfait si Amine avait , un tant soit peu, dépassé le «rôle décoratif» et s'il avait puisé dans la mémoire musicale riche et belle de la région, même si le réalisateur a choisi de placer son œuvre loin des clichés, des cartes postales et de tout folklore.