Créée en septembre dernier pour constituer un contre-pouvoir institutionnel, la Ligue des instances nationales indépendantes a tenu, hier matin à Tunis, sa première conférence annuelle, sous le signe « la citoyenneté nous rassemble ». La manifestation, placée sous le haut patronage du président de la République, a été, officiellement, ouverte par M. Youssef Chahed, chef du gouvernement. Intervenant au nom des partenaires de la Ligue, M. Ramy Salhi, directeur du bureau Maghreb à Tunis du réseau Euromed des droits de l'Homme, a dressé le bilan d'activité de la Ligue et son plan d'action à venir. Cette coalition se veut, à ses dires, l'union qui fait la force, dans un cadre commun et de partenariat mutuellement bénéfique. « La semaine prochaine, ces instances seront reçues au Palais de Carthage », déclare-t-il. En dépit des difficultés liées à la non-promulgation de ses décrets d'application, l'Instance nationale de lutte contre la traite des personnes a réussi à rendre public son premier rapport annuel. Sa présidente, Mme Raoudha Laâbidi, a fait valoir ce qu'elle a déjà réalisé et ce qu'elle est en train de faire en faveur des victimes du trafic des êtres humains. Un trafic considéré comme un acte criminel et d'esclavagisme, d'ailleurs classé troisième mondialement. Son instance opte pour devise « la Tunisie n'est pas une terre d'esclavage ». Bien qu'existant depuis 1991, le Comité supérieur des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas, semble-t-il, fait encore ses preuves. La composition de son bureau n'a été parachevée qu'en 2016, lance son président M. Taoufik Bouderbala. Mais, il a quand même poussé un ouf de soulagement : « Aujourd'hui, nous sommes parvenus à occuper une place au sein des instances onusiennes, où nous avons, pas mal de fois, présenté nos rapports sur la situation des droits de l'homme en Tunisie ». Il souhaite voir la nouvelle instance nationale des droits de l'homme naître dans les plus brefs délais. Il a formulé l'espoir qu'elle sera au-dessus de toutes les considérations. Pari sur la confiance du citoyen De même, l'Instance de protection des données personnelles, comme l'a indiqué son président, M. Chawki Gueddas, a connu des avancées. Depuis février dernier, se félicite-t-il, il a été décidé de lui confier la présidence des instances francophones similaires. Ancrer davantage la culture de la citoyenneté demeure, alors, un souci mondialement reconnu. Seul maître Chawki Tabib semble être satisfait de son parcours à la tête de l'Inlucc. Et d'ajouter que son instance a pu reconquérir la confiance des citoyens. Il a fini par lancer un message : « La lutte contre la corruption est une responsabilité partagée ». Du reste, c'est la bonne volonté politique qui manque, juge-t-il en conclusion. Les propos de M. Nouri Lajmi, président de la Haica, se sont limités à trois points essentiels : un cadre juridique régissant le secteur de l'audiovisuel, l'appui de l'Etat aux instances indépendantes et l'apport de la société civile dans la consolidation du processus démocratique. Le président de l'Isie, M. Nabil Baffoun, s'est focalisé, quant à lui, sur la nécessité de s'inscrire au registre électoral. En effet, plus de 3 millions en âge de voter ne se sont pas encore inscrits. Il a appelé à adhérer massivement à la campagne d'inscription d'électeurs qui commencera le 10 de ce mois. L'Isie, ajoute-t-il, a mis à disposition plusieurs bureaux mobiles et permanents dans les différentes régions. L'objectif est de réussir le rendez-vous électoral d'ici fin 2019. Née au forceps en 2016, l'Instance nationale de prévention de la torture (Inpt) peine à trouver son compte. Pourtant, elle a pu se rendre dans tous les lieux de détention, indique son président, Fethi Jarray. Son collègue Imed Hazgui n'a pas manqué de préciser que l'instance d'accès à l'information fait encore face à plusieurs défis d'ordre politique, législatif et culturel. Elle fait de son mieux pour diffuser la culture de la transparence et de la redevabilité. Ouvrant les travaux de la conférence, le chef du gouvernement, Youssef Chahed, a insisté sur le soutien qu'il faut apporter à ces instances pour qu'elles s'imposent en tant que vraies autorités publiques et indépendantes. Pour ce faire, il y a cinq défis à relever. Tout d'abord la légitimité, d'où il est important de créer une opinion publique qui plaide en leur faveur. Deuxièmement, leur indépendance financière, administrative et logistique. Soit une libre gestion budgétaire, à même d'exploiter à bon escient leurs propres ressources humaines. Puis, le défi de l'efficacité au niveau de l'action. Quatrièmement, leur pérennité et durabilité. Enfin, la bonne gouvernance qui exige le parachèvement du système normatif censé aider ces instances à réaliser leurs objectifs. « Nous ne ménageons aucun effort pour les aider à relever tous ces défis et faire en sorte que ces instances puissent améliorer leur travail et les conditions de leur fonctionnement », plaide le chef du gouvernement.