Par Afif CHELBI (ministre de l'Industrie et de la Technologie) Le secteur de l'industrie et des TIC emploie près de 700.000 salariés, soit une source de revenus pour plus de 3 millions de personnes (près du tiers de notre population). 400.000 emplois sur les 700.000 relèvent directement de l'exportation. La Tunisie ne dispose pas de ressources naturelles et énergétiques abondantes, son économie, ses emplois dépendent de la force de travail, de l'intelligence de ses femmes et de ses hommes; ils dépendent également du maintien de relations de confiance avec nos partenaires et clients européens. Ces dernières semaines, les entreprises ont connu une baisse d'activité et pour certaines d'entre elles, des arrêts de travail et des dommages. Néanmoins, cela n'est rien par rapport aux martyrs de la révolution qui ont sacrifié leurs vies pour la liberté, et cela n'est rien par rapport aux acquis de cette révolution concrétisés par les premières mesures du gouvernement : amnistie générale, libération des prisonniers politiques, liberté des médias, mise en place d'un revenu minimum, création d'un fonds de développement régional…outre la création des trois commissions indépendantes, ouvertes à toutes les sensibilités sans exclusive aucune, qui auront un rôle primordial dans le processus de transition démocratique. De plus, et à la faveur du dévouement des industriels et des salariés qui ont pu, dans la majorité des cas, préserver l'outil de production, et ce, au péril de leur vie (ils sont demeurés dans l'entreprise alors que les balles des snipers fusaient), la quasi-totalité des entreprises a continué à travailler pour le marché local et pour l'exportation. L'approvisionnement du pays en produits alimentaires, en électricité, en produits pétroliers, en services télécoms a été assuré et il faut rendre un hommage appuyé aux travailleurs de ces secteurs qui se sont mobilisés jour et nuit à cet effet. Cependant, si quelques semaines de baisse d'activité sont gérables, une période plus longue serait dramatique pour des centaines de milliers de salariés et ne favoriserait en aucun cas l'instauration des rouages de la démocratie à laquelle nous aspirons tous. Aussi, il est de notre devoir de lancer un appel fort à toutes les composantes de la société civile pour la préservation de notre outil de travail et de nos emplois. Préservons notre outil de travail et nos emplois et nous pourrons alors viser des objectifs ambitieux de développement économique et social pour notre pays, car nous demeurons fermement convaincus que la révolution tunisienne a fait tomber la chape de plomb qui caractérisait l'économie tunisienne (pratiques non transparentes et corruption de l'ancien régime) et a ainsi brisé le «plafond de verre de l'antidémocratie» qui nous faisait perdre plusieurs points de croissance par an et donc plusieurs milliers d'emplois. Soyons donc à la hauteur des attentes de notre jeunesse qui a été à la pointe de cette révolution en assurant toutes les conditions requises pour lui permettre de contribuer dignement à la réalisation des aspirations de notre peuple au développement, à la liberté et à l'équité. En effet, que ce soit les investisseurs nationaux qui craignaient la spoliation de leurs projets ou les investisseurs internationaux rebutés par l'image antidémocratique de la Tunisie… tout cela constituait un frein évident au développement de l'investissement et de l'emploi. Le maintien et le développement de l'emploi, de la croissance et une meilleure répartition des fruits de cette croissance dans le cadre d'un nouveau contrat social sont à notre portée, et peu importe le libre positionnement de chacun, pour ou contre le gouvernement, qui n'est, rappelons-le, que de transition. Ce qui importe aujourd'hui, c'est la mobilisation et la reprise du travail de toutes les composantes de la société civile, et ce, dans l'intérêt national. La cellule d'assistance aux entreprises, à leurs responsables et leurs salariés, mise en place récemment au ministère de l'Industrie et de la Technologie, a contribué à résoudre certains problèmes conjoncturels, à engager le dialogue en collaboration avec notre partenaire syndical en vue de répondre aux légitimes aspirations des travailleurs et à aider à la reprise de la production, de l'approvisionnement du marché et des opérations d'exportation. Cette cellule d'assistance est, avec l'ensemble des structures du ministère dans les 24 gouvernorats, à la disposition des industriels et des salariés et à leur écoute pour les accompagner dans l'intérêt de tous car notre responsabilité collective nous impose à tous aujourd'hui de réussir cette formidable transition démocratique, conformément aux aspirations de notre peuple. La préservation et le développement de l'emploi sont les forces motrices de la croissance, d'une croissance équitable qui demeure la meilleure garante de notre révolution et de notre avenir démocratique.