Ça a commencé avec l'idée d'une jeune étudiante, Dina Dallegi, qui fait partie de La Presse-Jeunes. Elle a pensé organiser 24 heures d'expressions artistiques sur et autour de la révolution. Elle a exposé son projet au metteur en scène et acteur Ghazi Zaghbeni qui lui a ouvert les portes de son espace culturel "Artisto". L'appel est lancé et plusieurs artistes n'hésitent pas à y répondre. Le rendez-vous, 24 heures Révolution... Exprimez -vous», est fixé du samedi 5 au dimanche 6 mars. Cet événement, dont les bénéfices iront au profit de familles nécessiteuses, à travers la réalisation de microprojets, a réuni une soixantaine d'artistes, entre amateurs et professionnels, qui, durant 24 heures non-stop, ont défilé avec générosité sur la petite scène de l'espace Artisto. Le ton était aux rencontres et aux échanges avec une diversité des disciplines (danse, théâtre, art vidéo, poésie, slam...). Outre les différentes performances, deux débats ont été inclus au programme, animés par des spécialistes, articulés autour des thèmes relatifs à la citoyenneté et «Les Nations unies et la révolution tunisienne». Le coup d'envoi de ces 24 heures in revolution a été donné par la performance musicale de Lobna Nooman (vocal) et Mahdi Chakroun (luth), une sorte de préambule à d'autres artistes comme Babaroots ou Abdelkader Ben Saïd, à la création Poubelle (théâtre), Tarak Rihabi et Laroussi Zbidi pour leurs contes en musique, à Sélima Karoui pour un happening et à des performances-danse de Néjib Khalfallah, du duo Ammar Ltifi-Sinda Jebali, de Fares Landolsi, de Mohamed Osmani Kilani et de bien d'autres. L'art vidéo était également au rendez-vous avec la participation de vidéastes tels que Med Yassine Jelassi, Maach Imen, Elyès Bouzien, Boomj ou Sihem Rekik. On n'était pas vraiment dans ce que l'on pourrait appeler de l'art révolutionnaire, une forme qui a commencé à émerger et à dévoiler un nouveau champ d'exploitation artistique qui transcende le seul souci esthétique, le diktat de la poétique ou l'unique expérience individuelle. S'agissant d'un art engagé au service de la révolution, l'individualisme (pas dans le sens de l'expression) se soumet au devenir commun. Une forme d'art que l'on a vu s'épanouir ces derniers temps à travers vidéos, textes, dessins, peintures, graffitis et qui s'est bien illustrée lors du happening ou de la performance collective du sit-in de la "Kasbah". Mais ceci est un autre sujet. Nous y reviendrons peut-être ultérieurement. Dans "24 heures Révolution...Exprimez-vous", il s'agissait plutôt d'agir "à froid", c'est-à-dire après un temps de recul. Une manière d'inscrire son expression et son "point de vue" artistique sur la révolution. Dans ce sens, Mohamed Hssine Grayaâ a donné la réplique aux médias de l'après 14-janvier. A travers sa performance "Li kolli mostamaâ" (à bon entendeur) et avec l'allure d'un cadavre, il s'est joué d'une nouvelle terminologie servie par les médias, que l'on a réitérée, rabâchée jusqu'à l'étouffement (pour mieux faire croire que la révolution est de l'acquis?). "La révolution a abouti!", répète l'artiste, comme pour faire écho à la ligne éditoriale de notre presse. "La révolution a abouti et je vais vous le prouver", reprend-il encore. Il s'exécute en découpant en morceaux le papier contenant des mots qu'il a relevés des titres (d'un même numéro!) d'un journal local: déviation, soulèvement, sit-in, manifestation, peuple, dégage, infiltré, milice, sniper, etc. Il en a résulté un texte à la réalité absurde qui n'a pas manqué de déchaîner les rires dans la salle...Le ton plus grave, la jeune Fatma Laazibi (Centre Neapolis) nous parle dans sa performance théâtrale "Weld ellil", des vertus du silence dans un pays où l'enfant de la nuit a osé dire non... Une manifestation qu'on peut qualifier de belle initiative et dans sa performance théâtrale "Weld ellil" qui fera, peut-être, des émules.