«Fiction et pratique des arts» est le titre du treizième colloque qu'organise, du 20 au 22 mars 2011, l'Association tunisienne d'esthétique et de poétique (Atep). Cette association réunit des théoriciens (philosophes, théoriciens et historiens de l'art), des hommes et des femmes de lettres et des artistes. Les trois derniers colloques avaient porté sur des sujets toujours d'actualité : «Quelle pensée dans la pratique des arts», «Art et nouvelles technologies» et «Art et environnement». L'Atep qui est une structure de réflexion, d'échange et de débat à caractère scientifique a jusque-là réussi, malgré toutes les difficultés budgétaires que connaît une petite ONG, à tenir, malgré vents et marées, des colloques et des tables rondes et même à publier sous forme de livres scientifiques les actes de ces rencontres. L'association a pris également pour tradition de rendre, à chaque fois, hommage à un artiste. Elle a ainsi salué auparavant l'œuvre du peintre Aly Ben Salem et le travail des dramaturges Jalila Baccar et Fadhel Jaïbi. En ouverture du prochain colloque du 20 mars, l'Atep rend hommage au cinéaste Nouri Bouzid. Rachida Triki, philosophe et critique d'art, présente ainsi le colloque : «Dans les pratiques d'art, les dispositifs fictionnels remettent souvent en question nos attitudes en jetant le trouble entre réel et imaginaire; si l'héritage métaphysique a toujours opposé la fiction à la réalité, en montrant son rapport à l'apparence, ne devons-nous pas dépasser ce mode d'approche binaire et lui substituer un rapport autre par le biais de l'acte créateur ? Comment, en effet, expliquer l'émotion provoquée par les jeux du «faire semblant» (fictus) et son impact dans notre rapport au monde ? Ce qui est fictif est-il nécessairement dénué de sens ? C'est bien ce que les pratiques d'art contemporain semblent contredire : les images virtuelles et les mondes possibles révélés par l'usage des nouvelles technologies nous donnent à repenser notre rapport au réel. Les démarches créatrices qui questionnent fictivement l'environnement socioculturel et politique ne sont-elles pas un processus artistique de dévoilement et de désaliénation? Autant de questions qui seront soumises au débat». Citons parmi les axes proposés du colloque : le statut de la fiction dans les dispositifs artistiques actuels, les enjeux esthétiques de la fiction face à la construction du réel et la dimension pédagogique de la fiction telle que traitée par les arts. La Révolution tunisienne reviendra probablement à maintes reprises dans les discussions, les organisateurs ayant d'ailleurs prévu le soir de la première journée du séminaire une séance d'analyse des images des évènements qui ont agité le pays au mois de janvier dernier. Des théoriciens et des spécialistes de l'art de très haut niveau prendront part à cette rencontre, tels que Marc Jiminez, René Passeron, André Rouillé, Vincent Cespedes, Farid Zahi, Richard Conte, Patrick Vaudey et bien d'autres encore.