Le passage de la 5e à la 6e édition de Doc à Tunis, rencontres internationales du film documentaire, suscite bien des curiosités. Après les événements qui ont précédé et suivi le départ de l'ancien président, plusieurs manifestations culturelles en ont fait les frais et n'ont pu avoir lieu. D'autres y ont trouvé un terrain propice pour naître ou évoluer. L'équipe de Doc à Tunis dit avoir songé à une année blanche avant de changer totalement de perspective et d'opter pour " une édition spéciale ". Elle le sera dans le sens où le public pourra découvrir des extraits de films sur les " révolutions" tunisienne et égyptienne. Des réalisateurs comme Ridha Bahi, Mohamed Zran, Elyes Baccar, Olfa Chakroun et Dali Nahdi ont donné leur accord. De l'Egypte, on annonce déjà une œuvre de Sony Ghallab. Les sections habituelles du festival ne seront pas en reste avec beaucoup de films étrangers et méditerranéens, sur des thèmes devenus des constantes, comme la femme. Il y aura également une rétrospective du Syrien Omar Amiralay, décédé le 5 février 2011, et un hommage au documentariste tunisien Mustapha Hasnaoui, qui nous a quittés le 15 janvier 2011. Côté organisation, ce sont les jeunes qui sont mis en avant en cette 6e édition " spéciale‑". Des cinéphiles, des diplômés en cinéma et des jeunes qui ont suivi l'évolution de la manifestation ont répondu à l'appel pour la prendre en charge. L'équipe est orchestrée par Amina Azouz, une enseignante à l'Institut de presse et des sciences de l'information. Ce qui reste jusque-là marquant, c'est l'absence criarde de Syhem Belkhodja, imposante directrice des cinq premières éditions, à qui Doc à Tunis revient d'ailleurs de droit, puisque l'idée est enregistrée à l'Institut national de la normalisation et de la propriété industrielle. La conférence de presse de l'événement, prévue pour le 16 du mois, aidera peut-être à lever le mystère à ce propos. Il y a également de quoi se poser des questions sur le sort des autres festivals lancés par Syhem Belkhodja, à savoir " Les rencontres chorégraphiques de Carthage " et " Design et mode de Carthage ". Doc à Tunis semble être dans une étape transitoire, marquée de surcroît par son divorce avec son ancien directeur artistique, le documentariste Hichem Ben Ammar, qui, selon lui, avait annoncé son départ depuis l'année dernière. Le divorce a été bel et bien consommé, puisque Ben Ammar vient de mettre sur les rails ses " Caravanes documentaires " en organisant les Journées du documentaire les 9, 10 et 11 avril. Caravanes documentaires est un nouveau festival annuel qui débutera en octobre 2011, pour promouvoir le documentaire dans la Méditerranée arabe. Son principe consiste à projeter des films dans les régions de l'intérieur. Il est défini comme un " festival de découverte, démocratique et décentralisé ". De part et d'autre, on considère Doc à Tunis comme un acquis indéniable, qui doit évoluer et s'adapter au nouveau contexte tunisien et les Caravanes documentaires comme un plus qui viendrait enrichir la scène culturelle du pays. En fin de compte, et quels que soient les dessous de ce divorce et de l'organisation de cette édition de Doc à Tunis, le grand gagnant reste le public pour qui la palette de choix se diversifie. Attendons tout de même de voir le programme proposé et le déroulement de la manifestation.