Par Khemaïs FRINI (*) La perspective d'une Assemblée nationale constituante est de nature à exacerber les clivages idéologiques entre les Tunisiens à un moment où ils ont plus que jamais besoin d'unité. Le peuple a vécu dans une paix civile et religieuse remarquable depuis l'indépendance et dans une tolérance maximale les uns vis-à-vis des autres, quelles que soient leur culture et leur appartenance. La Constituante présente le risque d'ébranler cet édifice sociétal. En contrepartie, elle n'apportera rien de consistant aux attentes du peuple et de la jeunesse. Ces attentes sont certes d'ordre politique (transparence des élections, séparation et verrouillage des pouvoirs…) mais aussi et surtout sociales et économiques. C'est pourquoi il est préférable que les Tunisiens, une fois qu'ils auront adopté le régime qu'ils désirent, passent directement sans tarder à la construction du pays. Maintenant que la controverse sur le code électoral levée, une commission technique d'une dizaine d'experts peut rédiger, dans un délai d'un mois, une Constitution largement inspirée de celle de 1959 dans sa première version avec deux ou trois variantes à choisir pour le peuple au cours d'un référendum qui aura lieu précisément le 24 juillet (présidentielle, mixte ou parlementaire). Des élections présidentielles et/ou parlementaires selon le régime choisi par le peuple devraient avoir lieu en novembre 2011. Cela dit, nulle part dans le monde entier, qu'il soit démocratique ou totalitaire, on a vu un pays en état d'urgence, de facto, avec des frontières quotidiennement menacées et dont l'armée est en état d'alerte et une partie de sa population exposée au danger d'une guerre qui se déroule à ses frontières. Nulle part on a vu un pays démolir les fondements de son Etat et procéder à la suspension de la Constitution pour une longue durée. Voilà, à mon avis, une raison majeure pour revoir la feuille de route de la transition démocratique.