Par Hédi BACCOUCHE M. Hédi Baccouche, ancien ministre du gouvernement de Bourguiba et Premier ministre après le Changement, a abordé la figure du Président Habib Bourguiba dans plusieurs de ses conférences qui ont été notamment publiées dans son ouvrage Eclairages sur la colonisation et la résistance en Tunisie et dans le Grand Maghreb(1). Il nous a donné son aimable autorisation pour en choisir des extraits et les proposer à nos lecteurs en guise d'hommage au Président Bourguiba à l'occasion de la commémoration du dixième anniversaire de sa mort. «Pendant cinquante-cinq ans, Habib Bourguiba a joué le rôle de leader en Tunisie et au Maghreb: il a, non seulement mené la lutte pour l'Indépendance, mais encore il a été le fondateur de l'Etat moderne. Le peuple tunisien a donc vécu des moments décisifs avec lui. Il s'agit d'une relation qui relève de la passion, si bien que je peux dire que le peuple tunisien, à certains moments de l'histoire, est Bourguiba et Bourguiba est le peuple tunisien. C'est que tous les Tunisiens, redevables de son combat, lui sont, d'une manière ou d'une autre, reconnaissants. C'est pour cette raison que la commémoration de sa disparition s'apparente à une fête nationale tant les Tunisiens célèbrent, dans un esprit de fidélité et de reconnaissance, la mémoire d'un père immortel. Puisque le Rassemblement Constitutionnel Démocratique est le parti garant de la mémoire de la nation, de l'histoire de ses combats, de la gloire de ses martyrs et de ses militants, il veille sur cette commémoration annuelle, suivant ainsi son Président et le Président de la Tunisie, M. Zine El Abidine Ben Ali, qui accorde au Président Bourguiba la place de choix qui lui revient dans l'histoire de la Tunisie. Oui, en effet, Habib Bourguiba est le Combattant Suprême qui a déclenché une révolution, mené un peuple et l'a conduit à l'indépendance. Bourguiba s'est opposé à la colonisation française depuis son jeune âge, lui qui a très tôt rejoint le Parti du Destour qui luttait alors contre le colonialisme qui tendait à imposer le pouvoir de la France sur la Tunisie, à exploiter ses richesses et à réduire en esclavage sa population, à l'aliéner aussi intellectuellement, politiquement, économiquement et géographiquement. Ainsi, le Président Bourguiba a mené courageusement le combat de la libération dont il a été le stratège, le maître d'œuvre et le champion. La victoire a été remportée, dans un premier temps, le 3 juin 1955 avec l'accès de la Tunisie à l'autonomie interne, ensuite dans un second temps par l'Indépendance totale qui est la suite logique et inévitable de la première. Il s'agit, de fait, d'une épopée immortelle réussie par le Président Bourguiba qui a su mobiliser les Tunisiens et les réunir autour d'un seul et unique combat pour lequel tous les sacrifices étaient consentis. D'où le succès du Néo-Destour à impliquer tous les représentants actifs de la société tunisienne, dont l'Union générale tunisienne du travail et à sa tête Farhat Hached, les organisations professionnelles, les agriculteurs et les commerçants, les associations des jeunes destouriens, les scouts musulmans, etc. La victoire du Président Bourguiba dans le combat pour la libération de la Tunisie me semble soulever trois remarques. Premièrement, les dangers qu'il a affrontés n'ont porté atteinte ni à son courage ni à sa volonté d'aller toujours de l'avant. Deuxièmement, il a réussi à obtenir la victoire dans des délais inattendus, personne ne sachant quand la France pouvait accorder son indépendance à la Tunisie. En effet, on pensait que le combat serait long et qu'il demanderait plusieurs générations de combattants et de martyrs. Troisièmement, cette victoire est le résultat d'une résistance difficile, opiniâtre et glorieuse à laquelle a participé tout le peuple tunisien sous la direction éclairée d'un homme qui, vingt-cinq ans auparavant, a fait un rêve et a tout fait pour le réaliser». —————————— Hédi Baccouche, Eclairages sur la colonisation et la résistance en Tunisie et dans le Grand Maghreb, Tunis, Centre de publication universitaire, 2007, 331 pages, 15 dinars tunisiens. Livre publié en arabe. Traduction personnelle de l'auteur de cet article