ISTANBUL (Reuters) — La Turquie a annoncé hier une série de sanctions contre la Syrie, imitant la Ligue arabe et les puissances occidentales, pour protester contre la répression des manifestations antigouvernementales orchestrée par le pouvoir syrien. La Turquie va ainsi suspendre sa coopération stratégique avec Damas et bloquer toute livraison d'armes à la Syrie. Elle n'exclut pas de prendre de nouvelles mesures à l'avenir, a expliqué le ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu. Les avoirs syriens en Turquie seront gelés, de même que les relations avec la Banque centrale de Syrie, et les crédits turcs destinés à la Syrie sont interrompus, a-t-il dit. «Tant qu'un gouvernement légitime, en paix avec la population du pays, ne sera pas en place en Syrie, le mécanisme de la coopération stratégique de haut niveau sera suspendu», a dit le ministre, jugeant que le régime syrien était «dans une impasse». Le chef de la diplomatie turque a précisé qu'Ankara avait évité avec un «soin méticuleux» d'infliger des sanctions pouvant frapper le peuple syrien. La Turquie a été «extrêmement prudente», a dit le président Abdullah Gül. «Les besoins vitaux, comme l'eau et l'électricité, ne seront absolument pas inclus dans ces mesures», a-t-il dit. Le commerce bilatéral entre les deux pays s'est élevé à 2,5 milliards de dollars l'an dernier (1,9 milliard d'euros). Leur frontière commune fait 900 kilomètres de long. Déserteurs La Turquie était il y a peu un proche allié de la Syrie et son Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, entretenait une relation forte avec le président Bachar Al Assad. Mais le président syrien n'a pas écouté les appels à la modération formulés par Ankara et la répression du mouvement de contestation s'est intensifiée au fil des mois, jusqu'à ce qu'Erdogan l'appelle à quitter le pouvoir. La Turquie accueille désormais des déserteurs de l'armée syrienne et le principal groupe d'opposition politique. «Nous souhaitons au peuple syrien de réussir dans cette lutte légitime», a dit Davutoglu. Les sanctions turques font suite à celles annoncées dimanche par la Ligue arabe à l'encontre de la Syrie. Ahmet Davutoglu s'était rendu en personne à une rencontre des ministres des Affaires étrangères de l'organisation panarabe le week-end dernier au Caire. D'ores et déjà, la compagnie de raffinage pétrolier turque Tupras a mis un terme à un contrat d'achat avec la compagnie nationale des pétroles syrien Sytrol, a annoncé hier le journal turc Haberturk, citant le PDG de Tupras, Yavuz Erkut. Le contrat, qui était en vigueur depuis 1995, a été rompu au début du mois de novembre, précise le journal. Par ailleurs, toutes les compagnies aériennes des Emirats arabes unis suspendront la semaine prochaine leurs liaisons avec la Syrie, a annoncé le gouvernement de Dubaï sur Twitter. La compagnie de Dubaï, Emirates, et celle d'Abou Dhabi, Etihad, sont parmi les plus importantes de la région. Les liaisons de Turkish Airlines avec Damas ne seront pas interrompues, a précisé Ankara.