L'objectif premier de la création de la Caisse générale de compensation (CGC) en 1970 était de soutenir les catégories de la population à revenu limité en intervenant sur certains produits de base, comme le pain et dérivés, le lait et autres produits alimentaires, voire le cahier scolaire, pour en réduire le prix et le rendre abordable. Au fil des ans, les fonds alloués à cette caisse ont été consolidés, vu l'augmentation des prix des produits de base dont le coût de fabrication a été revu à la hausse suite à la majoration des produits des matières premières notamment. Cependant, cette caisse ne profite pas uniquement aux catégories à revenu faible, mais à tout le monde, y compris les personnes aisées et les professionnels dans certains secteurs qui n'hésitent pas à acheter des produits compensés – comme l'huile végétale, la semoule et la farine – afin de préparer des produits de consommation vendus au public. Depuis quelque temps, la question de la CGC est soulevée en vue de trouver les solutions les plus appropriées à même de bien cibler les catégories à revenu limité sans alourdir davantage ses charges dans la mesure où les fonds alloués à partir du budget de l'Etat qui est, lui-même, soumis à des pressions importantes. Diminution de la production locale Cela n'empêche que les charges de la CGC ont enregistré en 2010 une baisse de 27% pour se situer à environ 584 MDT représentant 0,9% du PIB contre respectivement 800 MDT et 1,4% l'année précédente. Presque la totalité de ces charges a concerné la subvention destinée aux céréales et ses dérivés et aux huiles végétales avec des montants respectifs de l'ordre de 467 MDT et 113 MDT. Le menu de base des Tunisiens étant constitué de pâtes et de pain avec utilisation de quantités importantes d'huiles végétales pour la préparation ou la friture, il n'est pas étonnant de constater des fonds si colossaux affectés à ces produits qui sont aussi utilisés par les personnes aisées et les professionnels. Un relèvement des prix des dérivés des céréales a même été effectué en juillet 2010, et ce, avant la décision de leur baisse à partir de janvier 2011 qui a concerné aussi les prix d'autres produits, comme le sucre dont la subvention n'est pas supportée par le budget de la CGC. Le financement des charges de compensation a été assuré totalement à partir d'une dotation budgétaire de 730 MDT, dont 146 MDT sont reportés à l'année 2011 au profit de l'Office des céréales pour lui permettre de couvrir les charges de compensation des premiers mois de l'année. Les dépenses destinées à la compensation des produits de base ont connu au cours des dernières années une croissance considérable due, d'une part, à la hausse des cours sur le marché mondial et, d'autre part, à la diminution de la production locale à cause des conditions climatiques défavorables. C'est ainsi qu'en 2007 les charges de la compensation ont été de l'ordre de 600 MDT représentant 1,4% du PIB pour être portées à plus de 1.000 MDT en 2008 et 2% du PIB. Pour contrecarrer, un tant soit peu, cette évolution, des dispositions avaient été prises consistant notamment en l'encouragement de la production locale des céréales en augmentant le prix de base à la production pour le rapprocher des prix pratiqués sur le marché mondial. Un système de veille a été même mis en place en vue d'observer la fluctuation des prix à l'extérieur et profiter de l'occasion de leur baisse pour acquérir les quantités de blé, dont la Tunisie a besoin, notamment en blé dur, blé tendre, orge et huiles végétales. Révision des droits de douane L'objectif était d'orienter la compensation vers la consommation des ménages en vue de maîtriser le volume des quantités des produits ciblés. Le secteur privé avait été autorisé d'importer certains produits comme les huiles végétales et l'orge destinée à l'alimentation animale avec révision des droits douaniers ou leur suppression, le cas échéant. Les autorités publiques avaient, en plus, renforcé le contrôle économique sur le marché local pour assurer la transparence des transactions commerciales et éviter toute hausse de prix illicite qui peut porter atteinte au budget des consommateurs. Un recensement a concerné les boulangeries en vue de définir les besoins en farine compensée pour chacune d'elles et de faire le diagnostic sur l'état des lieux du secteur. Il a été décidé, en outre, d'assurer une plus grande transparence dans les circuits de distribution de la farine compensée. Une liste des boulangeries autorisées à s'approvisionner en farine compensée a même été établie et une carte d'approvisionnement en farine compensée pour chaque boulangerie active avait été prévue. Cette carte comporte des données sur la quantité, la catégorie et les sources d'approvisionnement. Les boulangeries ont fait l'objet d'une réorganisation pour que chaque catégorie se spécialise, soit dans la fabrication du grand pain, soit de 70% de grand pain et 30% de baguette, soit dans les baguettes seulement. Le prix de la farine est ainsi défini selon chaque catégorie. Les entreprises publiques, les restaurants et les hôtels ont été amenés à s'approvisionner en baguettes. Les grandes surfaces ont été également encouragées à fabriquer leurs pains en bénéficiant de la farine de qualité. Un contrôle a été effectué par les services compétents pour s'assurer que le système d'approvisionnement fonctionne correctement et selon le plan mis en place. Pour ce qui est de l'huile végétale, la compensation est destinée uniquement pour la consommation des ménages et non pas pour les entreprises publiques, les hôtels, les restaurants et autres unités industrielles qui sont orientés vers l'utilisation de l'huile non compensée. Le contrôle a été renforcé, là aussi, au niveau des circuits d'emballage, de distribution et d'utilisation de ce produit à commercialiser dans des bouteilles en verre. D'autres huiles, comme celles du soja et du maïs, sont vendues dans des bouteilles en plastique dans les grandes surfaces et dans les autres points de vente à un prix plus élevé que la traditionnelle huile végétale qui ne doit pas être vendue en vrac. Autant de dispositions qui visent à orienter la compensation progressivement vers les catégories qui en ont vraiment besoin et permettre ainsi d'alléger un peu les charges de la CGC qui sont en accroissement continu, lié notamment aux cours pratiqués sur le marché mondial. La rationalisation de la consommation– qui nécessite des campagnes de sensibilisation et d'information auprès du grand public – peut avoir des effets bénéfiques à terme, surtout qu'on constate dans plusieurs quartiers un gaspillage énorme des produits de consommation, comme le pain et ses dérivés, payés au prix fort.