Le 21 décembre de chaque année ne sera plus uniquement célébré comme le jour du solstice d'hiver. A l'initiative du CNC français, cette date devient la fête internationale du court métrage, un événement baptisé «Le jour le plus court» et introduit dans plusieurs pays, dont la Tunisie, qui connaît une effervescence indéniable en ce qui concerne la production de courts métrages. Et pour preuve, la programmation fut riche, entre Mad'art et le Colisée, en fictions et en animations proposées par l'Association des cinéastes tunisiens (ACT) et l'Association tunisienne pour le cinéma d'animation (Atca), en plus de courts métrages français. Au Colisée, le public a pu voir des œuvres où l'humour est omniprésent, même dans les situations dramatiques. Cette caractéristique est commune aux films français: «Donde esta Kim Basinger?» (où est Kim Basinger) d'Edouard Deluc ou encore «Citizen versus Kane» de Shaun Severi, qui sont des films à la fois drôles et à portée internationale. La part du lion a été consacrée aux jeunes Tunisiens, de plus en plus novateurs aussi bien au niveau des idées qu'au plan de la réalisation. A l'issue de cette manifestation, l'on se réjouit de constater une nette amélioration du niveau général des œuvres et une meilleure maîtrise du scénario et de l'écriture par l'image, par rapport à ce qui se faisait auparavant et que des manifestations comme Tunis Tout Court, organisée par l'Association tunisienne pour la promotion de la critique cinématographique (Atpcc), nous offraient l'occasion de découvrir. Depuis quelques années, l'on compte une cinquantaine de courts métrages produits par an en Tunisie. L'année 2011 est tout de même particulière, marquée par les événements du 14 janvier qui sont d'ailleurs, curieusement, peu présents dans les thèmes traités par les réalisateurs tunisiens. Néanmoins, ces derniers ont choisi de pointer du doigt des fléaux économiques et sociaux dans le pays, dont on ne peut nier le lien direct avec la révolution. Une approche qui témoigne d'une grande maturité et cela se constate dans plusieurs courts métrages qui sortent du lot, comme «L'offrande» de Walid Mattar, une critique ouverte quant à l'effet de la publicité sur les familles tunisiennes et «Pourquoi moi?» de Amine Chiboub qui parle de la dégradation des rapports sociaux, que ce soit dans le milieu professionnel ou familial. Il y eut également «Foutaise» de Bahri Ben Yahmed, «Soubresauts» de Leyla Bouzid, «La complainte du poisson rouge» de Oubeidallah Ayari et «Le peuple de Frankenstein» de Imed Issaoui. Ce dernier film offre une approche originale de la situation du cinéma en Tunisie, conséquence directe, selon le réalisateur, de la précarité dans tous les secteurs dans le pays. «Un peuple sans identité ne peut avoir qu'un cinéma bâtard», écrit-il sur un carton au début et à la fin du film. Il opte pour la thérapie de choc, avec des images sombres et des personnages qui le sont encore plus. Les amateurs de films d'animation n'ont pas été en rade avec le court métrage tunisien «L'mrayet» (les lunettes) de Nadia Raïs où l'on découvre «Bou Mrayet, un homme né dans un univers où les êtres portent des lunettes dès leur naissance. Un jour, Boum, qui travaille dans une firme chargée d'écrire le futur, enlève ses lunettes..., ainsi que le magnifique «Madagascar, carnet de voyage» de Bastien Dubois. En somme, une soirée avec une bonne sélection, variée, et qui donne une idée sur l'évolution des jeunes cinéastes en Tunisie, dont on espère voir les premiers longs métrages rapidement.