Après une éclipse qui a duré une vingtaine d'années, le groupe Imazighen est de retour, la jeunesse au cœur. Le come-back sur scène aura lieu le 31 de ce mois à 18h00 à la maison de la culture Ibn-Rachiq. Le groupe Imazighen a été créé en 1974 par Hamadi Ben Yahia, Béchir Dziri, et feu Hamadi Lajimi, à l'époque où, partout dans le monde arabe, naissait la chanson alternative, dite «engagée». Tandis que les Cheikh Imam et Ahmed Foued Nejm d'Egypte, les «Jil jilala» et «Ness el Ghiwane» du Maroc, Brassens et Ferré de France et d'autres groupes et chanteurs d'Amérique latine, exprimaient leur attitude envers la dictature, les guerres et les injustices et contre un monde de plus en plus préoccupé par l'«avoir» au lieu de l'«être», le groupe Imazighen s'est vite élargi, attirant un grand nombre de fans qui tiennent encore à jour leurs chansons. La ntig edh'dhil, la min azem, ya oum el ghid, n'har elli saadou, dhayemni k'sed et tounès el jamila un poème d'Aboul Kacem Chebbi, disaient tout haut ce que le peuple tunisien pensait tout bas. Derrière des mots simples et directs, le cœur des frères, Lotfi et Hamadi Ben Yahia, Lajimi, Dziri, Habib Ben Hamed, Zouheir Louchem, Yahia Sabri, Ali Saïdane, Med Bhar et Hakim BelgaIed, battait d'émotion. «Nous étions très jeunes», dit Hamadi Ben Yahia qui a bien voulu nous annoncer le come-back du groupe. Et de continuer : «Nous n'avions pas de formation musicale. Lajimi était alors à ses débuts au conservatoire». Mais le groupe tenait à être performant. Il répétait studieusement à l'impasse Sidi Della, chez Lajimi, ou à Bab Jedid chez les Ben Yahia. Il fallait oser. Hamadi nous apprend qu'à l'époque, Dziri, leur compagnon de route, écrivait des poèmes qu'il publiait au journal Al moujahed d'Algérie, parce que la censure battait son plein. On allait discrètement chercher les publications au consulat, et on était fiers de lire nos propos sur les colonnes d'un journal. Plus tard, il y a eu le fameux «changement». Ben Ali a carrément tué la chanson, entre autres par une certaine politique de récupération. Les groupes tels qu'Imazighen de Tunis, Aouled el manajem de Gafsa, Aouled Boumakhlouf du Kef, La recherche musicale de Gabès, Aghani el hayet de Dahmani, ont dû résister jusqu'au bout de leurs convictions. Comme quoi, il faut laisser du temps au temps. Après le 14 janvier 2011, quelques-uns de ces groupes ont fait leur réapparition. Non pas que la chanson engagée est redevenue à la mode, mais parce qu'il y a encore des maux à dire... «aujourd'hui, plus que jamais», confirme Hamadi qui ajoute : «Un certain danger nous guette et la bataille est encore plus rude, au niveau culturel». A part le fait que certains membres du groupe sont originaires de Douiret, (les berbères de Tunisie et dont les origines remontent à Mazigh, le fils de Canaan), le nom Imazighen, ne rappelle-t-il pas les Amazigh, pluriel de Amazigh qui signifie «homme libre puis noble» ? C'est donc motivés par la noblesse de la révolution et la valeur «liberté» que les Imazighen reviennent en scène. De nouvelles têtes (sauves) rejoindront les anciennes du groupe et dont il ne reste que quatre. Il s'agit de jeunes musiciens-chanteurs : Seïf, Emna, Amin et Dhoha. Envoyez la musique !