Les trompettes de la renommée ne sonnent, hélas, plus, pour notre Compagnie. Elle est même devenue une mauvaise compagne, avec toutes ses sautes d'humeur qui lui arrivent, ces derniers temps. L'avenir de ses navettes, du côté des deux rives de la Méditerranée, n'est plus assuré, n'est plus une responsabilité partagée. Jugez-en par vous-même : jeudi 24 mai dernier, à l'aéroport de Tunis-Carthage, alors que nous étions en partance pour Marseille, nous avons dû supporter un retard de trois, longues et pénibles, heures, dans une atmosphère survoltée, de manque d'information totale et de pénitence sadique. Pas d'eau, pas de sièges suffisants où s'asseoir et des rumeurs —la Tunisie est devenue le pays des rumeurs par excellence— persistantes d'une grève en bonne et due forme des techniciens de Tunisair. Et des agents, tentant de nous amadouer par des «Patientez, vous allez bientôt partir! Vous allez partir, Inchallah! Inchallah!...». Vers midi, c'est le branle-bas de combat dans la salle d'attente, car voici que les voyageurs, en partance pour Nice, nous bousculent, doublent les laissés-pour-compte du vol de Marseille. Un super-cargo est là, à proximité, qui va ravaler toute cette population ignorante du sort qui l'attend, une population désinformisée, déshumanisée. Nous embarquons, nous pénétrons dans la fourmilière, à destination de la ville des fleurs, mais pas de Marseille! «Marseille, capitale culturelle de l'Europe 2013» peut attendre. Et nous aussi. Et d'ailleurs, nous allons attendre encore une bonne heure sur la piste… d'attente! A cause de techniciens qui inspectent l'avion, de voyageurs retardataires et d'un travailleur qui a oublié… ses lunettes dans la salle d'embarquement. Et toujours pas d'eau ni de climatiseur dans l'avion… Et lorsque le super-cargo, moteurs en marche, est prêt à décoller, voici qu'il faut encore faire la queue, que les autres avions décollent d'abord. Enfin, bref, le nôtre, avec ses ailes de géant, prend les airs, comme un vieil albatros. Il sera figé durant encore plus d'une heure à Nice avant qu'il ne puisse repartir et atterrir à Marseille-Marignane vers les dix-sept heures… Au total huit heures de retard, pour une traversée qui n'aurait dû durer qu'une heure-trente minutes. Tunisair nous a vraiment menés en bateau cette fois-ci. Et comme j'étais assis sur la terrasse d'un café du côté du Vieux-Port de la ville des Phocéens, je me demandais comment serait le retour vers Tunis-Carthage, le vendredi d'après?!… Mystère et boule de gomme…