Ces Jeux olympiques risquent de se transformer en cauchemar pour les Tunisiens. Pas vraiment nouveau En ce mois saint de Ramadan, il y a curieusement quelques points communs entre les feuilletons assommants dont on nous bombarde (il n'y a pas que la Syrie qui souffre et qui est en guerre) et les sorties de nos athlètes, dans les Jeux olympiques à Londres. Deux au moins : platitude et prévisibilité. En d'autres termes, très peu passionnants et, du début à la fin, connus d'avance. Dans ces Jeux olympiques où les athlètes, le président de la République, le ministre, des responsables de tous bords, le tourisme et on ne sait quel autre privilégié ou pistonné a fait le voyage à Londres (sauf les journalistes évidemment et ça, ce n'est pas nouveau !!!), les Tunisiens n'ont droit qu'aux rêves et aux chimères. Avant, il y avait la propagande et le «soutien infaillible du président de la République au sport et aux sportifs tunisiens»; aujourd'hui, nous sommes face à la dure réalité de notre sport : le néant ! ou presque... Des ministres, des discours, une armée de hauts cadres, des directeurs des sports d'élite et de l'argent jeté par les fenêtres. En face, des athlètes démunis, écrasés; des techniciens frustrés et une opinion publique flouée. Et puis, tous ces présidents de fédérations qui auraient dû être déférés à la Cour internationale de justice sportive pour crimes contre le sport et les sportifs. Dont certains (très rares) se sont retirés du circuit, alors que d'autres se sont recyclés comme de la vieille ferraille. Nous parlons, bien sûr, des années de plomb, de l'argent du sport détourné et des champions qui n'ont jamais vu le jour. Morts-nés comme les rêves de gloire et de médailles de tout un peuple réduit à regarder les autres gagner devant le petit écran. Une mauvaise loterie Prévisions, supputations, fantasmes : chères concitoyennes, chers concitoyens, ce n'est pas en une année et demie de révolution inachevée qu'on bâtit des champions et qu'on nourrit des rêves de médailles olympiques. Un champion, ça se construit comme un pays, dans le temps et avec beaucoup d'amour. Or, nos anciens gouvernants n'ont jamais vraiment aimé les champions et quand quelques-uns font l'exception, on s'empresse de les récupérer. Rappelez-vous d'Oussama Mellouli, champion du monde, promené à l'aéroport Carthage pour que Zaba... recueille des applaudissements. Pourtant, un champion, c'est le talent et Dieu sait combien ce pays est riche dans ce domaine. Mais c'est tout le reste qui ne suit pas. Quatre ans, c'est le minimum pour qu'un athlète fasse le grand saut de qualité après avoir maîtrisé les fondamentaux. Dans la réalité, les fondamentaux sont bâclés, alors que les quatre années, c'est le parfait délai pour que se perdent en chemin nos champions. Entre-temps, on les engage dans les championnats arabes, devenus pour des responsables incapables et malhonnêtes, nos Jeux olympiques à nous et leur planche de salut à eux. Cela pour dire qu'une médaille olympique c'est le talent, les moyens, l'encadrement, le travail et les performances. Pas la propagande, pas des rêves, pas les pronostics un peu fous et peu professionnels. Prenez l'exemple de Mellouli : c'est le seul athlète tunisien sur lequel l'Etat a véritablement investi. Avec l'encadrement américain, il est parvenu à devenir champion du monde et olympique. Combien d'athlètes tunisiens peuvent-ils faire valoir pareils moyens et pareil encadrement? Puis il n'y a pas que l'Amérique. Les Marocains Aouita, Guerrouj, Skah, Boutayeb et Al Moutawakil se sont entraînés à Ifrane, au Maroc, sous la direction de cadres marocains; idem pour les Kényans et les Ethiopiens; idem pour la Jamaïque et ses fantastiques sprinters. Nous avons les champions et les sites mais pas les responsables et rarement les techniciens du haut niveau. Alors qu'on continue à faire croire que nous sommes les rois des compétences dans tous les domaines sportifs et que nous exportons des cadres. Oui, nous les exportons mais pas aux USA, en France, en Italie ou en Allemagne. Mais à Oman, au Qatar, aux Emirats et au Bahreïn. Arrêtons de nous raconter des histoires, arrêtons de nous mentir! Mellouli, Ghribi, Houda Miled et peut-être un boxeur. Mais rien n'est moins sûr, de la pure loterie, alors que d'autres pays vivent de certitudes et prévoient plus ou moins le nombre de médailles et la qualité de métal qu'ils vont remporter. Croisons les doigts mais mettons-nous surtout au travail dès à présent et éliminons sans états d'âme les vestiges du passé qui continuent à faire leur petit commerce dans les instances de notre sport.