La société Yosr Développement serait à l'origine d'une vaste opération d'escroquerie, touchant quelques milliers de personnes. L'arrestation du PDG de la société, Adel Dridi, pendant quelques jours, a provoqué la panique de plusieurs clients qui ont manifesté devant le pôle judiciaire à Mohamed V, le 24 avril, puis devant le centre Galaxie à Tunis, un jour après. Plusieurs clients de la société Yosr Développement ont protesté, jeudi, devant le centre Galaxie contre l'arrestation de Adel Dridi. Ils ont réclamé des explications sur le sort de l'argent qu'ils ont déposé auprès de l'entreprise. La foule a fini par se disperser quand l'information selon laquelle Dridi a été relâché, et reprendrait du service dès le lendemain. Entre-temps, le centre Galaxie, qui abrite l'un des sièges de Yosr Développement, est resté fermé, de peur des représailles. Justement, la veille, des clients mécontents avaient menacé de le brûler, lors de la manifestation devant le pôle judiciaire de Mohamed V, dans la capitale. Yosr Développement est une Sarl qui a un matricule fiscal et un registre de commerce. Les activités menées par cette entreprise ne sont connues ni des employés, ni des clients. Pourtant, selon un des employés, ses clients se comptent par milliers, et seraient près de 50.000. Si elle a attiré autant de personnes, c'est parce qu'elle permet aux gens qui y déposent leur argent d'en tirer des bénéfices plus avantageux que ceux proposés par les banques. Le système fonctionne avec des «cartes développement mutuel». Pour la «carte 55» par exemple, qui coûte 55DT, le bénéfice est de 45DT pour un dépôt d'une valeur de 55DT. Le client inscrit à cette formule peut investir de l'argent jusqu'à 50 fois (d'une valeur non définie), et jusqu'à 100 fois pour les autres formules, plus chères. Usurpation de l'identité d'une banque En outre, certaines personnes affirment avoir contracté des crédits à faible taux d'intérêt. L'employé de la société a confirmé l'information, en précisant que Yosr Développement a accordé des micro-crédits d'une valeur pouvant atteindre 25.000 à 30.000DT. Plusieurs clients sont des personnes nécessiteuses, qui ont dû vendre des biens et emprunté de l'argent, dans l'espoir de faire des bénéfices rapidement. Toutes les personnes interrogées ont exprimé leur confiance en la personne de Adel Dridi qui, jusqu'à présent, ne les aurait jamais déçues. Pourtant, certaines informations laissent supposer qu'il est à la tête d'une vaste opération d'escroquerie qui dure depuis le 18 février 2011, date de sa fondation. La société a affirmé dans sa page facebook, via une publication datée du 3 avril 2013, qu'elle était soumise aux contrôles de la Banque centrale de Tunisie, du ministère des Finances et de toutes les autres autorités publiques. La Banque centrale, de son côté, nie tout rapport avec la société et affirme ne lui avoir jamais donné d'agrément pour exercer des activités qui relèvent de la compétence d'une banque. Ces activités sont, entre autres, la réception des dépôts du public, leur rémunération et l'octroi de crédits, tels qu'ils sont définis dans la loi numéro 2001-65 du 10 juillet 2001. Selon une source financière autorisée, Yosr Développement usurpe l'identité d'une banque ou d'une entreprise financière. Dans une publication datée du 14 avril 2013, Adel Dridi a informé ses clients que le «nouveau et fameux système de Cartes développement mutuel» a permis d'augmenter le capital social jusqu'à deux millions de dinars, de créer trois entreprises, respectivement dans le tourisme et loisir, l'immobilier et l'assistance, et d'acheter au comptant des locaux et des bureaux. Tout ceci reste à vérifier. Toujours est-il que personne ne sait comment la société a pu générer autant de bénéfices en deux ans, surtout dans une période où l'investissement est en berne dans le pays. Des observateurs dans le milieu financier supposent que Yosr Développement repose sur le système de Ponzi. Ce système consiste à rémunérer les investissements des clients essentiellement par les fonds procurés par les nouveaux entrants. A un certain moment, les sommes nouvellement déposées ne suffisent plus à payer les clients et là, le système s'effondre. Selon l'article III du contrat d'adhésion à Yosr Développement, «en cas de cessation d'activité de la société pour quelque cause que ce soit, seuls les prix nets des cartes sont dus». Autrement dit, tous les dépôts des clients ne seront pas restitués, et les primes non attribuées.