Les multiexpositions causent des maladies graves, notamment des cancers, parmi les travailleurs, qui ont besoin d'actions préventives dans le cadre d'une stratégie nationale Les multiexpositions en milieu professionnel peuvent avoir des conséquences fâcheuses sur la santé des travailleurs et causer des cancers. En effet, plusieurs travailleurs ont été obligés d'arrêter le travail définitivement à cause d'expositions à plusieurs substances comme celles qui sont liées aux produits chimiques. D'où la nécessité de moderniser les méthodes d'estimation et d'évaluation des risques pour prendre les mesures pertinentes à temps et protéger les travailleurs. C'est un thème d'actualité, qui a été traité par un atelier de réflexion organisé à Hammamet, les 21 et 22 novembre, par l'Institut de santé et de sécurité au travail, sur «les multiexpositions en santé et sécurité au travail: de la surveillance à la détection des effets». Selon M. Fayçal Ben Salah, directeur de la santé à l'Institut, les multiexpositions — qui peuvent associer le tabac et l'amiante — peuvent être à l'origine d'un cancer. D'autres éléments sont également cités, à savoir le bruit, les solvants, les métaux lourds... «Plusieurs pays considèrent d'ailleurs les multiexpositions comme un problème de santé publique», souligne-t-il. En milieu professionnel, l'on a constaté, cependant, un faible engagement des travailleurs dans la lutte contre les multiexpositions, ainsi qu'un manque de communication entre les médecins du travail et les acteurs de l'entreprise. Le manque de moyens ne permet pas non plus de faire face avec efficacité à ce phénomène. Une certitude est en tout cas dégagée, à savoir que ces multiexpositions causent des maladies dangereuses, dont des formes de cancer et le dérèglement du système hormonal. Multiexpositions : une affaire de santé publique Chaque personne fait face aux expositions mais de façon différente, selon sa vulnérabilité et sa sensibilité. Plusieurs questions demeurent posées par les spécialistes comme, par exemple, le fait de savoir si les transformations des substances se font dans l'environnement ou dans le corps humain. Il s'agit de savoir aussi s'il est nécessaire de revoir certaines normes adoptées pour l'utilisation de certaines matières. La prévention demeure néanmoins la meilleure solution pour atténuer les maladies dues aux multiexpositions. D'où la nécessité, comme l'a précisé M. Ben Salah, «de développer les méthodes spécifiques de surveillance environnementale». C'est un chantier qui est ouvert pour mettre en place cette méthode de surveillance. Il est nécessaire de gérer les multiexpositions selon une approche d'analyse des risques intégrant les nouvelles connaissances scientifiques et techniques afin de réduire la morbidité. Il est même urgent de renforcer la confiance des salariés en la santé au travail tout en maîtrisant les risques liés aux multiexpositions. Une politique active de prévention des risques au niveau national devrait être engagée dans les meilleurs délais. Le renforcement de la recherche est également considéré comme l'une des priorités. Dans ce même ordre d'idées, M. Radhouane Chakroun, expert, a indiqué que les données en matière de multiexpositions ne sont pas suffisantes, ce qui ne permet pas d'avoir une idée assez approfondie du phénomène. La situation est complexe et la prise de décision difficile. Ce qui oblige les parties compétentes à développer la recherche autour de certains axes prioritaires. L'orateur a rappelé que l'Union européenne a lancé un projet de recherche nommé «No Miracle». D'une durée de 5 ans à partir de 2004, ledit projet a impliqué 38 institutions de recherche provenant de 17 pays. Chaque équipe travaille sur un domaine bien précis comme le mélange des substances organiques et non organiques, le mélange des polluants chimiques avec le bruit, les substances chimiques et la radiofréquence (utilisation du GSM). Réseau de vigilance A la fin de l'atelier de réflexion, des recommandations ont été émises par les participants qui ont appelé notamment à adopter une démarche participative et normative pour identifier les sources responsables des maladies professionnelles dues aux multiexpositions pour une meilleure prévention et une réduction des dommages corporels subis par les travailleurs. Il s'agit aussi, lors de l'évaluation, d'intégrer les différentes combinaisons des sources dangereuses, dont les substances chimiques, pour fournir une meilleure protection. Par ailleurs, les participants ont recommandé d'optimiser les moyens de prélèvement dans le cadre d'une bonne évaluation qualitative et quantitative. A ce titre, un appel a été lancé à qui de droit pour favoriser les échanges entre les chercheurs et tirer le meilleur profit des évaluations et des analyses effectuées dans le sens de la complémentarité et de la coordination qui font actuellement défaut. L'implication des associations savantes est aussi vivement recommandée. De nouvelles techniques d'évaluation doivent être également utilisées pour avoir des résultats précis. Cet effort est à compléter par une mise à niveau des laboratoires existants chargés des analyses. Associer la santé environnementale à la santé au travail est nécessaire, estiment les participants, qui suggèrent, en outre, de renforcer la recherche et de développer des outils épidémiologiques pour l'évaluation, tout en créant un réseau de vigilance et des groupes de travail chargés des différents aspects des multiexpositions.