«L'idéal pour moi serait de pouvoir acheter un paquet de biscuits chez l'épicier du coin, avec la certitude qu'aucun individu n'a souffert pour le produire», voilà pourquoi Azyz Amami, jeune activiste de gauche s'est engagé dès 2002 dans le combat contre la dictature, notamment sur la Toile. Brillant étudiant et dévoreur de livres, il renonce, en raison de ses activités, à son diplôme d'ingénieur. Inconnu du grand public, l'homme n'a cessé de titiller le système en compagnie de plusieurs de ses copains, à l'instar de Slim Amamou. Un militantisme qui lui vaut une arrestation le 06 janvier 2013, où il retrouve son ami Slim. Libérés le 13 janvier 2013, à la veille de la chute de Ben Ali, les amis reprennent la lutte...séparément. Azyz se souvient, et avec le recul, il évalue. «Ce qui s'est passé le 14 janvier est une grande protestation et uniquement les prémices d'un processus révolutionnaire non mené à son terme. Ce qui a manqué ce jour-là, c'est un peu de sagesse de la part de ceux qui étaient en première ligne», explique-t-il. Au travers d'une métaphore, Azyz explique que la Tunisie, au lendemain du 14 janvier, était à l'image d'un bébé qui se tient debout pour la première fois, mais au lieu de marcher, il reste planté, se contemplant dans la glace, fier de lui. Le tableau n'est pourtant pas complètement noir pour Azyz, car ces trois années, depuis le départ de Ben Ali, ont permis à la Tunisie de se révéler à elle-même, de se voir comme elle est en réalité, avec ses côtés peu reluisants. «Grâce au 14 janvier, nous sommes maintenant capables de voir le vrai visage de notre classe politique. Lorsque je vois leur niveau d'amateurisme et leurs querelles qui s'inscrivent hors du temps, je me dis que nous nous étions trompés sur son compte», regrette-t-il. Malgré la crise économique qui se poursuit, ce jeune militant, qui rêve en secret d'épingler définitivement le système avec une vraie révolution, se réjouit de voir émerger une nouvelle génération de jeunes, décidée de continuer le combat. «Un des rares bienfaits du soulèvement du 14 janvier est le regain d'intérêt pour la chose publique, un réapprentissage de la culture de citoyenneté. Les jeunes bougent et ça se traduit par une créativité qui me surprend de jour en jour. Je reste donc optimiste, car l'avenir est en cours», termine-t-il.