Une histoire d'amour italienne sur fond de domination espagnole Les comédiens de la troupe vénitienne «Teataroimmagine» ont joué, sur la scène du Théâtre municipal, mardi dernier, un classique romantique qu'ils revisitent à leur manière. Il s'agit de la pièce signée Alessandro Manzoni I promessi Sposi ou Les fiancés, qui a été publiée entre 1821 et 1842, en plusieurs versions. Leur choix émane, d'abord, de la nature de leur troupe née en 1989. Celle-ci a, en effet, vu le jour grâce à de jeunes comédiens désireux de donner à la tradition théâtrale vénitienne, incarnée principalement par la commedia dell'arte, une vision contemporaine. C'est, ensuite, le texte qu'ils interprètent qui est porteur de cette tradition. I promessi sposi est une œuvre considérée comme un classique de la littérature italienne et du romantisme. Dans la mise en scène de la troupe, il y a l'histoire, et il y a son interprétation. La première se déroule en Lombardie entre 1628 et 1630, où, sur fond de domination espagnole, un petit seigneur local oblige les amoureux Renzo Tramaglino et Lucia Mondella à ne pas se marier, désirant épouser lui-même la jeune fille. Le couple est alors contraint à s'enfuir et leurs chemins se séparent : Lucia et sa mère se réfugient dans un couvent alors que Renzo part à Milan. Les événements se succèdent où le seigneur tente d'enlever Lucia. Finalement, les amoureux se retrouvent à Milan et peuvent célébrer leur union dans une Lombardie qui n'est plus déchirée par la guerre et la peste. Sur la scène du Théâtre municipal, il y avait davantage d'éléments narratifs, imaginés par le metteur en scène Benoit Roland. Le spectateur est face à une salle de classe où la maîtresse donne un cours sur la pièce I promessi sposi, en s'acharnant pour faire participer ses élèves. Seul l'un d'eux, habillé en Pierrot, est capable de répondre à toutes ses questions. Il est regardé de travers par ses camarades qui commencent à lui jouer des tours. Cette partie narrative, qui revient à plusieurs reprises pendant la pièce, est le prétexte d'une adaptation innovante et originale de Les fiancés. C'est une trouvaille qui a permis, par exemple aux comédiens d'interpréter plusieurs rôles, comme dans une répétition. La salle de classe se compose, d'ailleurs, d'une scène, de chaises et de mannequins sur lesquels sont posés les costumes, mis des deux côtés. Cette conception de l'espace comme une scène dans la scène et ce va-et-vient entre la salle de classe et la pièce proprement dite permettent aux comédiens d'émettre un point de vue et une réflexion sur chaque partie de la pièce avant de l'interpréter. Ici donc, Les fiancés est revisitée au sens propre comme au figuré. Les héritiers de la commedia dell'arte questionnent cet héritage, le valorisent et créent en même temps, en s'en inspirant. L'âme de ce genre théâtral traditionnel italien est restée intacte puisque masques, mimes et pantomimes accompagnent la parole. Le tout confère à la pièce sa légèreté et son comique qui ont conquis ceux parmi le public qui comprenaient la langue italienne. Les autres ne pouvaient rester indifférents à l'intelligence de la mise en scène et la brillance de ses comédiens.