«Foot Folies», nouveau spectacle de l'Ecole nationale des arts du cirque de Tunis (Enact), met en scène une quinzaine d'artistes entre trapézistes et acrobates. Il s'agit d'un spectacle joyeux et dynamique inspiré de la réalité immédiate des quartiers populaires. Pour Mohamed Driss, directeur du Théâtre National et auteur du spectacle, il s'agit d'un scénario articulé en situations ludiques dansées, permettant des plages de jeu purement circassien : «Portée par la danse, la fiction revêt un caractère plastique et poétique, basé sur l'humour. L'argument du spectacle est une fabulation pure et simple». Gilles Baron, metteur en scène du spectacle, précise, quant à lui, qu'il s'agit plus d'un argument que d'un scénario : un argument pour évoquer un certain nombre de questions liées notamment à la vie de quartier et au quotidien des jeunes dans ces quartiers. «Le cirque est un art populaire et il faut qu'il rencontre son public. Pour cela, il fallait identifier un terrain commun pour s'apprécier mutuellement». Dans ce spectacle, le point commun mis en scène est le foot. En effet, le spectacle mis en scène aurait pour finalité d'offrir une certaine image de la société, permettant une continuité entre le vécu réel et la scène. C'est à ce propos que notre interlocuteur évoque la voiture immobile qu'on voit sur scène, une voiture en panne qui dit, assez bien, le mal généré par l'envie de partir : une envie qui se trouve vite brimée par plusieurs obstacles, notamment économiques et sociaux. S'agissant de «Foot Folies», Gilles Baron souligne qu'il s'intéresse à un phénomène social qui est le foot et se présente ainsi comme un spectacle qui met en avant un point commun entre la société et le cirque, notamment le foot. Ce sport représente «une microsociété», note M. Baron. «Dans ce spectacle, le foot, dans sa conception primaire, est évoqué et proposé pour parler d'autres choses, et notamment des tensions, du besoin de s'exprimer par le sport, de la volonté de se dépasser et de réaliser des performances», souligne-t-il encore. Il ajoute, par ailleurs, que son travail en tant que metteur en scène consiste à identifier et à mettre en œuvre les moyens nécessaires en vue d'amener les techniques du cirque au spectacle. Le résultat final serait, selon lui, «une allégorie, un fantasme de foot, mais aussi une transcription des matchs sauvages qu'on voit dans les rues, avec toute la joie et les tensions qu'ils génèrent». Dans ce spectacle, on pourra aussi voir la façon de s'approprier un territoire abandonné, qui est un autre point commun avec le cirque : «Avant, on plantait un chapiteau dans des terrains vagues et on faisait du cirque», rappelle le metteur en scène. Concernant le message essentiel du spectacle, il précise qu'il n'a point l'intention de proposer des vérités absolues, mais des impressions et des suggestions. Ainsi, «Foot Folies» présente une certaine lecture du quotidien des jeunes des quartiers populaires. La voiture exprime, elle, la volonté d'aller ailleurs. Plusieurs questions relatives notamment à la cohabitation en groupe sont également suggérées dans ce spectacle, qui alterne les moments de solitude et les moments de partage, en communauté. «C'est un spectacle qu'on a voulu très joyeux, ni élitiste ni populiste, car c'est important de donner la qualité à tout le monde», souligne M. Baron, qui relève enfin que les élèves de l'Enact ont cette particularité de vouloir absolument se dépasser et cette rage de réaliser des performances : «Ils ont quelque chose de brutal et d'assez rugueux qui est très intéressant». D'ailleurs, ajoute-t-il, «le cirque peut être très important en Tunisie, car il peut être un vecteur et un lien social». N.C.