Le secrétaire général du Parti des travailleurs, Hamma Hammami, appelle les Tunisiens à «essayer» le Front populaire au pouvoir. Elle était archicomble, mercredi dernier, la salle des fêtes de l'hôtel d'Ez-zahra, à l'occasion de la tenue du congrès national du Parti des travailleurs qui se poursuivra aujourd'hui. De l'ambiance festive aux petites querelles idéologiques, lorsqu'on pénètre dans la salle, on comprend très vite que l'on est du côté gauche de l'échiquier politique: «C'est de la discrimination de classes sociales», s'amuse ainsi un des congressistes qui se voit refuser l'accès à des chaises réservés aux invités. Au milieu de la foule d'adhérents, de sympathisants ou simplement de curieux, on retrouve Leïla Toubel, auteur-comédienne, notoirement de gauche. Elle se dit pourtant indépendante de toute adhésion à un parti quelconque: «Je milite pour l'union des forces démocratiques». Une union qui semble mal partie à quelques mois seulement des élections législatives et présidentielles. Mohammed Jmour, un des dirigeants du Front populaire, estime désormais utopique le souhait du secrétaire général du parti Al-Massar, Samir Taïeb, d'unir la famille démocratique de gauche à droite. Pour lui: «Pas question de former un front électoral avec Nida Tounès». Des propos confirmés quelques instants après par le porte-parole du Parti des travailleurs, Jilani Hammami. «Le parti des travailleurs est une entité du Front populaire (FP), qui a décidé de mener seul les élections», a-t-il déclaré. De son côté, Hamma Hammami, secrétaire général du parti, a affirmé que «rien n'a encore été décidé en ce qui concerne le nom du candidat du Front populaire aux élections présidentielles». Mais selon les congressistes, «HammaHammami reste le candidat naturel du FP». «Essayer» le Front Populaire Il s'agit du quatrième congrès après ceux de 1991 et de 1998 (organisés dans la clandestinité) et enfin celui de juillet 2011. Ce nouveau congrès à l'issue duquel sera sans aucun doute reconduit Hamma Hammami en tant que secrétaire général du parti, est également une occasion pour les congressistes d'évaluer le rendement du parti, et peut-être de « s'expliquer » avec les dirigeants du parti sur les choix qu'ils ont faits. «Nous allons, lors de ce congrès, évaluer la situation interne du parti, et travailler à améliorer son rendement, a expliqué Jilani Hammami. A plusieurs reprises, en effet, et au vu de l'évolution très rapide de la situation politique, nous avons parfois manqué de réactivité ». Une sorte d'audit interne sera donc fait lors de ces trois jours de congrès et se traduira par le vote d'une motion politique qui guidera le parti jusqu'au prochain congrès. A l'ouverture du congrès, le secrétaire général du parti Hamma Hammami, a rendu hommage à Mohammed Bouazizi, qui s'est immolé par le feu le 17 décembre 2010, insistant sur l'impératif de ne pas oublier ce nom. Hamma Hammami a également déclaré que le « sentiment général des Tunisiens est que la situation n'est pas bonne». «Le peuple tunisien s'est révolté contre la corruption, pour un nouveau modèle économique, pour un meilleur système éducatif et pour une amélioration du système de santé. Cependant, rien n'est conforme à leurs aspirations, a-t-il dit. Si cette situation s'éternise, l'Etat et la société seront menacés d'effondrement». Pour lui, la solution serait de bâtir une économie nationale basée sur le travail comme principale valeur. Une économie qui n'exclut pas les chefs d'entreprise patriotes respectant les intérêts de leurs salariés. Le gouvernement transitoire, selon lui, n'aide pas à sortir le pays de la crise en «déviant de la feuille de route», tracée par le dialogue national. Il tient d'ailleurs le gouvernement pour responsable, tout comme l'Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie), pour responsable du bon déroulement des scrutins. «Déjà nous voyons que la constitution des instances régionales est problématique, que des financements douteux visant à truquer les élections continuent à affluer et que le gouvernement ne fait pas grand-chose pour garantir des élections transparentes, libres et indépendantes», a-t-il martelé. Il a appelé à cette occasion les électeurs, à «essayer» le Front Populaire, comme ils ont «essayé» Ennahdha et la Troïka.