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Bourguiba avait de l'estime pour les journalistes
Interview de abdelhakim Amor belkhiria, ancien PDG de La Presse, au magazine « Regards de femmes », publiée en avril 2012
Publié dans La Presse de Tunisie le 08 - 07 - 2014

Sadikien, il faisait partie d'une élite qui a longtemps fourni à l'état tunisien ses meilleurs cadres, Abdelhakim Amor Belkhiria, militant et haut cadre destourien et de l'Uget, est passé d'abord par la diplomatie avant d'être invité par le président Bourguiba, séduit par son esprit de synthèse, à se convertir au journalisme. Le jeune responsable, en parfait bilingue, a dirigé d'abord les informations à la radio tunisienne, poste des plus délicats à l'époque où la jeune République faisait face à bien des défis. Mission réussie, il assura un certain temps l'intérim de la direction du journal « L'action », lancé par Bourguiba avant qu'il ne crée le Néo-Destour en 1934. L'attention de Bourguiba fut à nouveau attirée par la plume de ce jeune responsable qui se voit, dans les années soixante-dix, confier la périlleuse mission de diriger le journal « La Presse », alors menacé de disparition. Le journal a été sauvé moyennant des efforts sans précédent de son directeur. Il réussit à en faire non seulement le premier quotidien de la place mais a pu lui assurer des assises financières solides et créer, surtout, une véritable équipe de professionnels qu'on appela plus tard « l'école de La Presse», un journalisme favorisant le professionnalisme et le respect de la diversité ; il créa la Snipe, société éditrice de La Presse, dont la réputation est reconnue de tous, avant de mettre fin à une carrière professionnelle des plus brillantes. Ouvert, d'une humilité désarmante et d'un grand savoir, il s'attachera par la suite, en tant que député puis maire de Jemmal, sa ville natale, à la promotion de la vie locale et régionale. Depuis 1987, il s'est retiré pour se consacrer à l'écriture.
Regards de femmes : en tant qu'homme de médias et l'un des principaux responsables du secteur à l'époque, quel accès aviez-vous auprès de Bourguiba ? Quels étaient ses rapports avec la presse, lui qui avait commencé son combat politique à travers le journalisme ?
Amor Belkhiria : en tant que directeur de l'Information à la télévision et à la radio, puis directeur du journal La Presse, j'étais convié à assister à toutes ses parutions publiques et à ses discours prononcés au palais présidentiel. Les journalistes étaient présents en force dans les délégations officielles lors de ses voyages à l'étranger. Il tenait à ce que les médias fussent présents lorsqu'il traitait de sujets importants pour le devenir du pays. Il croyait en leur pouvoir pour transmettre son message et sensibiliser la population à tout ce qui la concernait. Indépendamment de cela, il avait une réelle sollicitude pour les journalistes et même une attention pour tous les organes de presse. Nous étions en majorité tous encore jeunes, il croyait cependant en nos capacités. Même quand il lui arrivait d'être contrarié, il était toujours le premier à pardonner, bien plus, il nous trouvait même des excuses et des justifications. Cette magnanimité nous touchait beaucoup. Il considérait et savait que c'est un métier pénible d'autant plus que nous avions vraiment très peu de moyens et des conditions matérielles de travail fort difficiles. C'est ce qui renforçait son estime pour les journalistes et la presse en général. Nombre des hauts responsables de l'Etat partageaient avec lui ce sentiment. Tel était le cas de feu Bahi Ladgham ou encore feu Hédi Nouira.
Une revue de presse quotidienne pour commencer la journée, est-ce le témoignage d'un intérêt pour les quotidiens ou la recherche d'autres sons de cloche de la réalité du pays ?
Bourguiba faisait sa propre revue de presse. Il cherchait l'information à la source, aussi bien dans les journaux locaux qu'étrangers. Il donnait toujours l'impression d'être au courant de tout. A cette époque-là, les journaux représentaient une source fiable quant à la situation générale du pays. Il parcourait même la rubrique nécrologique. C'est ce qui lui a permis d'ailleurs de rendre un dernier hommage à l'un de ses anciens professeurs français qui l'avait soutenu dans son combat pour l'indépendance ; personne ne lui avait rapporté le décès, il en a découvert la nouvelle dans une annonce parue sur les colonnes du journal Le Monde. Bien plus que l'écho d'une situation locale, c'est un regard sur la vie internationale qu'il cherchait. S'agissant des questions internationales, il se basait, entre autres, sur les réactions de la presse pour orienter et affiner ses prises de position.
Bourguiba suivait de près les émissions de la radio. En tant que directeur de l'Information à cette époque-là, comment avez-vous géré l'attention présidentielle ?
Il arrivait fréquemment qu'on reçoive des appels de la présidence ; c'était Bourguiba en personne qui était au bout de la ligne. Je me souviens de l'une des périodes où il suivit de très près les diffusions sur antennes, à savoir celle de la controverse créée par le plan qu'il a proposé pour la libération de la Palestine et le désaccord qui s'en est suivi avec le président Jamel Abdelnasser. Nos médias répondaient avec beaucoup de verve aux attaques lancées par les autres radios arabes, surtout la fameuse « Voix des Arabes ». Il arrivait parfois que les propos de nos commentateurs soient très virulents. Cela nous a valu à la radio un rappel de Bourguiba demandant à ce que nous modérions notre discours, car, désaccord ou pas, il s'agissait quand même d'un chef d'Etat à qui nous devions respect. Cet intérêt de sa part créait réellement un stimulus pour nous tous étant entendu que nous cherchions professionnellement la perfection et nous voulions toujours être à la hauteur de nos responsabilités.
En vous référant à votre expérience personnelle, quelle était la réaction de Bourguiba à l'égard de ce que formulait le journal La Presse comme reportages, enquêtes, analyses ou informations jugées à l'époque critiques à l'égard des autorités ? Avez-vous senti à un moment ou un autre de l'exercice de vos fonctions qu'une censure vous était imposée ? Avez-vous des souvenirs précis ?
Bourguiba n'intervenait jamais dans le choix du contenu du journal. Même ses observations n'étaient émises qu'à postériori. Le journal La Presse était le porte-parole de l'Etat et de sa politique. Mais cela n'avait pas empêché pour autant des journalistes connus pour être de gauche ou ayant des convictions philosophiques diverses d'y travailler et d'émettre leur opinion en toute liberté. Bourguiba était un grand libéral. Personnellement, je ne me suis jamais senti soumis à la censure. Tout ce que nous écrivions et nous publions à l'époque était le fruit de nos convictions personnelles et de l'exercice strictement professionnel de notre métier. Elles allaient certes dans le même sens que celles du gouvernement, qui était dans une optique de construction d'un Etat souverain et indépendant mais en aucun cas édictées par qui que ce soit. Nous avions toute la liberté d'émettre nos critiques et même si cela nous valait une quelconque réprimande de la part de Bourguiba, il n'y avait aucune répercussion sur nos prises de position.
Pour l'anecdote, feu Hédi Nouira, Premier ministre à l'époque, me demandait un jour de lui révéler le nom d'un journaliste de La Presse, auteur d'un article sur l'accord tuniso-italien, sur la pêche et l'achat d'huile d'olive. Avec tout le respect que j'ai pu mettre dans mes propos, j'attirais son attention sur ce qui était écrit sous le titre du journal : « directeur responsable de la publication ». M. Hédi Nouira a purement et simplement raccroché le téléphone. Il ne m'en a gardé par la suite que plus d'estime.
Avez-vous un souvenir particulier de Bourguiba ?
Avant d'intégrer le domaine du journalisme, j'étais diplomate en poste à Dakar. Je l'ai rencontré la première fois lors de sa visite en Afrique de l'Ouest. J'étais tenu de le briefer sur le contenu des différents accords de coopération qu'il devait signer. De retour en Tunisie, j'ai remplacé pendant quelques temps le directeur du journal «L'Action », M. Moncef Jaâfer, un ami, en signant l'éditorial sous un pseudonyme. Un de mes écrits a suscité l'attention de Bourguiba qui a demandé à en connaître l'auteur. Il s'est rappelé de notre première rencontre, ce qui m'a beaucoup touché, c'est comme ça que j'ai intégré — officiellement — le domaine du journalisme. Quelque temps après, lors de la visite du ministre de l'Information sénégalais en Tunisie, j'ai été contacté par le protocole de la présidence qui m'informait que Bourguiba exigeait ma présence immédiate. J'ai rejoint le palais présidentiel dans la précipitation et je l'ai trouvé avec ses hôtes en train de m'attendre avant de passer à table. Il s'est alors adressé à son invité de marque pour lui demander s'il se souvenait de moi et de la période où j'étais en mission dans son pays. Et lorsqu'il a répondu par une affirmation, Bourguiba lui a dit : «Voilà de quoi la jeunesse tunisienne est capable : s'acquitter des responsabilités qu'on lui a confiées et toujours donner le meilleur d'elle-même. C'était pour moi émouvant ».


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