«La femme tunisienne est une compétence nationale». Plus qu'une campagne de sensibilisation, une réalité. La Dynamique Femmes relevant du Forum social mondial a organisé, hier, au siège du Forum tunisien des droits économiques et sociaux (Ftdes), une conférence de presse visant à pointer du doigt l'injustice qu'endure la femme candidate aux élections dans une société à dominante culturelle machiste par excellence. Cette rencontre concoctée quatre jours avant le scrutin législatif constitue une alerte quant à cette discrimination sexiste et à l'irrespect flagrant du principe de la parité, exigé pourtant par la nouvelle Constitution. Prenant la parole, Mme Emna Aouadi, syndicaliste représentant Dynamique Femmes, rappelle à l'assistance le rôle incontournable de la femme en tant que citoyenne de première ligne. Une femme d'une compétence confirmée qu'il convient de soutenir afin qu'elle puisse surpasser les obstacles qui entravent son parcours et contribuer ainsi à la construction d'une Tunisie nouvelle, démocratique, équitable et moderne. Jusqu'à nos jours, et en dépit de la dynamique révolutionnaire que l'on veut progressiste, la place de la femme reste au second rang, car devancée par celle de l'homme. Loin d'être une conséquence logique, cette méfiance vis-à-vis de la femme revient, essentiellement, à une mentalité discriminatoire. Et pour preuve : la femme, qui représente 50,5% de la population tunisienne, prime son alter ego, l'homme, dans bien des domaines. Selon les statistiques relatives au baccalauréat pour l'année 2013, la femme compte 63,6% des bacheliers admis. Sur le plan professionnel, elle représente 49% des cadres. Aujourd'hui, le nombre des femmes actives sur le plan politique s'élève à 5.600, ce qui dénote de sa volonté insoupçonnée à aller de l'avant. Cependant, et malgré son mérite indéniable, la femme tunisienne ne représente que 7,85% des membres du gouvernement, 6% des postes de décision et 13% du corps syndical. D'autant plus que 43% des diplômées de l'enseignement supérieur sont au chômage. «C'est pourquoi, indique Mme Aouadi, nous soutenons les candidates aux élections et les femmes têtes de liste afin qu'elles aillent de l'avant. Nous lançons un appel à tous les partis, à la société civile, au peuple tunisien afin qu'ils aient confiance en le mérite de la femme et lui permettent d'exercer son droit en tant que citoyenne à part entière, dans le respect d'ailleurs de l'article 21 du deuxième chapître de la Constitution, intitulé ‘‘Droits et libertés''». De son côté, Mme Hajer Habchi saisit l'occasion pour commémorer le premier anniversaire du décès de Mme Aljiya Jedidi, l'une des militantes du bassin minier de Gafsa. L'oratrice souligne que la présente conférence s'inscrit dans le cadre d'une campagne de sensibilisation ayant pour slogan : «La femme tunisienne est une compétence nationale», et d'un projet régional sur la consolidation des rôles des partis, des syndicats et de la société civile dans la promotion de la participation féminine à la vie politique. Mme Kalthoum Kenou, juge et candidate aux présidentielles est l'invitée d'honneur de la conférence. Pour elle, se porter candidate aux présidentielles dépasse la seule ambition individuelle. Ce choix vient d'ailleurs en réaction quant à la suggestion du Mouvement Ennahdha de s'entendre sur un président consensuel. «Cette proposition a pour finalité d'amadouer le peuple et d'instaurer un système politique rétrograde auquel le peuple serait contraint à consentir. Aussi, ai-je décidé de me lancer dans un combat pour prouver aux courants obscurantistes que nous sommes là, nous les progressistes, et nous ne lâcherons pas prise» indique-t-elle. Mme Kalthoum Kenou a choisi d'être parrainée par les gens du peuple et non par les membres de l'ANC. Elle a réussi à obtenir 19 mille parrainages. «Je trouve que ce nombre est très significatif. Cela prouve que les Tunisiens n'ont aucune objection à être présidés par une femme», conclut-elle.