Daech n'est pas uniquement une mouvance terroriste, c'est de loin plus grave. C'est un phénomène sectaire qui opère à la manière des sectes et entraîne une subordination psychologique de ses adeptes Brûlé vif dans une cage. Le jeune pilote jordanien de 26 ans, Moadh Al-Kassasbeh, capturé par l'organisation terroriste Etat islamique, fin décembre, a été exécuté. La Jordanie était prête à l'échanger contre la terroriste irakienne Sajida Mubarak Al rishawhi, femme et sœur de caïds historiques de Al Qaïda, impliquée dans les attentats du 9 novembre 2005 à Amman ; mais revendiquait d'abord une preuve de vie de son ressortissant. Finalement, une mise à mort d'une rare atrocité est balancée via le Net, que les Jordaniens et le monde entier reçoivent avec effroi. Faisant suite à la diffusion de ces images insoutenables, l'Etat de Jordanie a promis une «réponse terrible». Elle a été donnée hier matin à l'aube, Sajida Al Rishawi et l'Irakien Ziad Karbouli un autre responsable d'Al Qaïda, ont été exécutés à 4h locale, 2h GMT. C'est le porte-parole du gouvernement jordanien qui l'a annoncé en ajoutant : «Celui qui doutait de la barbarie de l'organisation, EI, en voici la preuve». Brûlé vif après avoir été aspergé d'essence. Le jeune pilote affrontait son destin debout dans une cage, la tête baissée sous les yeux de ses bourreaux et de leurs caméras, portant un uniforme orangé qui rappelle ceux de la prison américaine Guantanamo. Un meurtre lent et cruel qui représente une nouvelle étape franchie dans la barbarie. Celui-ci intervient après l'exécution de deux otages japonais à une semaine d'intervalle. Une campagne de propagande La torche a été allumée à l'extérieur de la cage où se trouvait Moadh Al-Kassasbeh pour suivre un filet d'essence qui atteint la victime s'embrasant à partir des jambes. Contrairement à plusieurs médias qui n'ont pas montré la vidéo, les chaînes Al Jazeera en premier mais aussi Arabia, ont choisi de la diffuser non pas une fois mais en boucle de longues heures durant. Si ce n'est pas faire le jeu des terroristes, qu'est-ce que c'est alors ? Telle que la séquence de l'horreur a été présentée avec la mise en scène des bourreaux, il s'agit d'une atteinte à la dignité de la victime et un manque de respect envers sa famille. Le groupe terroriste EI a fait précéder l'exécution d'une campagne de propagande en bonne et due forme, en cherchant l'effet d'annonce. L'objectif est atteint. En quelques minutes à peine, les photos du jeune homme en flammes ont fait le tour du monde. Barbarie, atrocité, horreur, cruauté revenaient dans la plupart des commentaires, mais pas seulement. Obama a dû faire une déclaration. Question : que partageons-nous avec ces « Dawechs» ? La race, la religion, l'humanité ? Il ne faudra pas perdre de vue que ces gens s'expriment et agissent au nom de l'islam et croient dur comme fer qu'ils sont sur la bonne voie. La religion est-elle si puissante pour amener des hommes à prendre du plaisir à contempler des êtres humains souffrir de la manière la plus abominable sans frémir. Quels types de manipulations ont-ils subis pour s'ingénier autant à inventer des pratiques atroces en guise de châtiment contre ceux qu'ils considèrent comme apostats ? Par exemple, les homosexuels en terre de l'EI sont jetés du toit des immeubles. Des missionnaires d'un autre type Le choc en plus ! Sur les plateaux de certains médias arabes et même en Tunisie, des internautes osent trouver des explications et des justificatifs à de pareils actes. C'est doublement incompréhensible et dangereux. Pour nous autres Tunisiens, la menace Daech est géographiquement proche. Elle est à nos portes, voire installée dans le pays. Sans vouloir se voiler la face. Et parce que tous les moyens devraient être mobilisés pour éradiquer ce fléau à la racine, à quand donc la promulgation de la loi antiterroriste ? A quand une surveillance plus étroite des sites jihado-terroristes qui pullulent sur la Toile locale ? A quand une reprise en main des mosquées et des quartiers sensibles ? Il ne faut pas s'y méprendre, Daech n'est pas uniquement une mouvance terroriste, c'est de loin plus grave. C'est un phénomène sectaire qui opère à la manière des sectes et entraîne une subordination psychologique de ses adeptes. L'organisation est dotée de grands moyens, elle est très influente, et a de l'impact sur les jeunes, les personnes fragiles et celles cultivant une revanche à prendre sur la vie et les autres. Les «Dawechs», ces jihadistes fanatiques, représentent une nouvelle race à part dont l'humanité a été visiblement ôtée, qui se croient investis de Dieu. Des missionnaires d'un autre type, ensauvagés, lâchés dans les quatre coins de la terre pour saccager, terroriser, tuer. Et, mauvais nouvelle, la graine a germé chez nous.