C'est dans un théâtre antique archicomble que s'est produit samedi l'auteur-compositeur-interprète britannique Seal, sur la scène de Carthage.Sans suspense, Seal a ramené du monde et a largement réussi le pari de son premier— «et j'espère, pas le dernier», dit-il sur scène – concert en Tunisie. Un public de tous les âges, qui comptait une bonne part d'étrangers, a fait le déplacement pour assister à sa performance en live et entendre vibrer sa voix rauque, que l'on reconnaît entre mille, interprétant les chansons de son répertoire qui jongle avec aisance entre pop, rock, soul et house. Le concert a commencé à l'heure prévue. Sous les applaudissements d'un public prédisposé à «faire du bruit», Seal a investi la scène avec ses huit musiciens et musiciennes. Ils ont rejoint chacun son instrument entre trompette, saxophone, batterie, guitare et guitare-basse. Lui a saisi son micro. Les reprises des standards de la soul, un domaine que le chanteur connaît très bien, ont ouvert le bal. Ce sont celles qui sont contenues dans son album Soul (2008), album qui lui a permis de renouer avec le succès. «Papa was a rolling stone» de The Temptations, «This is a man's world» de James Brown et «I can't stand the rain» de Eruption, ont été les premiers titres de la soirée. Un choix intelligent qui a valu a Seal un tabac auprès du public. Loin de se reposer sur ses lauriers, il a enchaîné avec quelques blagues, histoire de saluer l'audience et de faire fondre les barrières entre chaises et gradins, et ça a marché. Il y a eu des vagues d'un côté comme de l'autre. Puis, un bond vers son nouvel album Commitment dont la sortie est prévue pour septembre 2010, avec la chanson «The way of my mistakes», avant d'interpréter son tube «Love's divine» (2002). Encore des reprises («I've been loving you too long», «It's alright», «Here I am» et «Knock on wood»), un rebond sur son dernier album avec «The way I lie» et un tour de quelques-uns de ses anciens titres à succès: «My vision» (2002), «Kiss from a rose», la bande originale du film Batman forever (1995) qu'il a dédié à Inès, une petite fille du public et «Crazy» (1991). Seal a clôturé sa soirée par un rappel, ça s'impose, de trois titres dont «The way I lie», encore, sur laquelle il a insisté sans doute pour la graver dans la mémoire du public, puisque c'est la chanson phare de son nouvel album dont il prépare déjà le succès. Un show sans aucun faux pas! La réussite du show de Seal, du point de vue audience, démontre le rôle déterminant des médias dans la carrière et la renommée de ce chanteur, et ce, même s'il n'a pas connu que des succès, durant plus de 20 ans de carrière. Car c'est d'abord sa forte présence sur les chaînes télé internationales et francophones, relayées plus récemment par le réseau social favori des Tunisiens, Facebook, qui lui ont donné la cote auprès de notre public et, l'on suppose, auprès des autres. Et ce n'est pas que pour sa voix caractéristique, mais aussi pour son destin hors du commun : abandonné par ses parents qui n'avaient pas les moyens de l'élever ; atteint de lupus érythémateux disséminé, une maladie dont les cicatrices se voient sur son visage, et époux de la célèbre mannequin américaine Heidi Klum. Il faut admettre en même temps que ce qui détermine le succès artistique d'un chanteur dans les pays où l'industrie de la musique est prolifique, et la Grande-Bretagne en fait partie, est du ressort d'une logique purement commerciale, et Seal fait partie des artistes dont le talent est reconnu depuis ses débuts, même si les ventes ne sont pas toujours au rendez-vous. Trêve d'analyses ! Seal est passé par le festival de Carthage et c'est un événement en soi. C'était Seal le déclencheur, le catalyseur, le bon chanteur, animateur et communicateur qui était sur scène. Avec une sonorisation et un éclairage impeccables et un écran qui projetait des images étudiées et en rapport direct avec les chansons, c'est un show sans aucun faux pas que l'artiste a offert au public, qui le lui a bien rendu, d'ailleurs. Au début de son concert, Seal a dit : «Nous sommes dans un pays historique, et dans un endroit historique». Peut-on enchaîner en parlant d'une «soirée historique» ? N'exagérons rien. Mais une chose est sûre : c'était une bonne soirée, où le public de Carthage a bien révisé son anglais et son swing. Un petit regret tout de même. Seal n'a pas chanté «Fly like an eagle», la bande originale du film Space Jam (1996). C'est pourtant grâce à cette chanson, et à son clip qui passait sur Canal 21 à l'époque où la parabole n'était pas dans toutes les maisons, que le public tunisien a pu le découvrir, en même temps qu'un certain R. Kelly, qui chantait «I believe I can fly». Tous deux ont depuis parcouru un long chemin… Que de bons souvenirs pour les ados de l'époque...