BANGUI — Le président congolais, Denis Sassou Nguesso, médiateur de la profonde crise centrafricaine, a estimé que la «priorité» était à l'organisation d'élections, en ouverture hier du Forum de Bangui pour la réconciliation, qui réunit des représentants de tout le pays. «Au sortir du Forum, sans tergiversations, sans atermoiements, la priorité doit être donnée à l'organisation des élections», a affirmé le président congolais. «Il y a le défi des élections. C'est un défi majeur. C'est un défi urgent. En même temps que le peuple centrafricain, tous nos partenaires requièrent que les élections aient lieu dans les délais prévus (au mois d'aout, ndlr). Afin que la transition ne déborde plus de l'ultime terme qui lui a été prescrit», a-t-il insisté. La Centrafrique s'est retrouvée en plein chaos après le renversement en mars 2013 du président François Bozizé par Michel Djotodia, à la tête d'une rébellion à dominante musulmane, la Séléka. Les exactions commises par la Séléka dès son arrivée au pouvoir contre les populations majoritairement chrétiennes ont ensuite débouché sur la création de milices d'autodéfense, les anti-balaka, qui s'en sont alors pris aux civils musulmans, plongeant le pays dans une grave crise, sans précédent. Des violences contre les civils qui ont entraîné l'opération Sangaris des forces françaises en décembre 2013, toujours présentes dans le pays ainsi que la force onusienne Minusca. La présidente de transition Catherine Samba Panza a déclaré quant à elle que le Forum «ne sera pas un tribunal populaire pour juger et jeter l'anathème sur les uns et les autres. (...). Ni, l'occasion de distribuer des primes à l'impunité à travers une amnistie générale des bourreaux du peuple centrafricain». Les travaux, qui se termineront le 11 mai, doivent se dérouler autour de quatre thématiques: paix et sécurité, gouvernance, justice et réconciliation, et développement économique et social. Des consultations ont été menées en 2014 et 2015 dans tout l'arrière-pays avec le concours des forces internationales, pour permettre aux populations de désigner quelque 600 représentants — y compris des principaux groupes armés, la Séléka et les Anti-balaka — pour faire part de leurs attentes. «Les populations attendent du forum, et de l'ensemble des décideurs, l'application de l'accord de cessez-le-feu de Brazzaville (juillet 2014), la refondation des forces de défense et de sécurité, le lancement du processus du désarmement-démobilisation et réinsertion des ex-combattants, des résolutions et des mesures fortes pouvant aider à la refondation de la nation centrafricaine», a souligné le président congolais. «La solution à la crise centrafricaine se trouve dans cette salle. Le chemin est long certes, mais le succès est à votre portée. Je souhaite aussi qu'une place de choix soit accordée à la justice. J'invite les participants à ne pas décevoir des amis et compatriotes (...) en vue d'exorciser les démons de la haine», a-t-il conclu. Depuis l'intervention des forces internationales et la fin des affrontements armés dans la capitale, le pays a retrouvé une certaine stabilité, mais des régions excentrées échappent à toute autorité centrale. Enclavé, il figure parmi les plus pauvres au monde. La Centrafrique, à l'histoire marquée par l'instabilité, les coups d'Etat à répétition et l'incurie de ses dirigeants, a connu plus d'une dizaine d'interventions internationales. Elles ont été conduites principalement par la France, l'ex-puissance coloniale, mais aussi les Nations unies, l'Union africaine et des organisations régionales africaines.