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Tourisme - Tunisie: De l'obligation d'une nouvelle gouvernance
Publié dans Leaders le 15 - 05 - 2015

Ce papier-débat, et ouvrir un débat est bien l'objectif premier de ce papier, a été préparé avant le 18 mars 2015, aussi peut-il surprendre par ses propositions alors que la situation est tout autre après l'attentat du Bardo !
Mais laisser la place au vide eut été aller à notre perte. Aussi, faut-il continuer à réfléchir, débattre et préparer l'avenir.
Et en cette période « d'arrêt technique prolongé », il serait judicieux qu'un temps soit accordé à la remise en cause des dysfonctionnements au sein du système touristique. Ces périodes d'incertitude devraient constituer des transitions entre un état de dégradation et une situation ultérieure, offrant ainsi des opportunités de recomposition et d'élaboration d'alternatives.
De 2011 à 2015, le tourisme a touché le fond. À quand le retour à une situation plus conforme aux potentialités de la Tunisie dans le concert touristique méditerranéen ?
Mais bien avant les événements de 2011, le tourisme était dans la tourmente ; depuis les années 1990, plus de stratégie touristique si ce n'est celle du développement de l'offre à l'hébergement sans aucune vision touristique. Ainsi, un produit hôtelier balnéaire a été mis en place, certes enrichi par la thalassothérapie, le golf et les excursions, mais l'unicité du produit a appauvri la destination. Le Sud est resté un produit de passage, la durée moyenne de séjour est de 1,4 jour, et le culturel, «une velléité ou tout au moins un mirage»(1) . La crise est donc très profonde. Aussi,l'objectif des préconisations, outil de travail pour une nouvelle gouvernance, est de lancer un véritable débat national sur le rôle de l'Etat, la place du tourisme dans le développement socio- économique et sur un nouveau mode de développement du secteur. Mais toute réflexion portée sur le tourisme en Tunisie passe par un préalable, la prise en considération du tourisme national. Il est une nécessité absolue de faire en sorte que le citoyen ne se considère pas étranger dans les zones touristiques et se sente touriste en Tunisie.
La perception, que les citoyens ont du tourisme national, qui servirait à compenser les baisses du tourisme international, est tout à fait négative. Le citoyen tunisien doit se réconcilier avec une activité qui contribue au sentiment de marginalisation.
Certes, le tourisme national existe ; il est bien présent dans les statistiques avec, en 2013, 4240000 nuitées, soit 14% des nuitées globales. Mais il ne représente que moins de 20% de la population tunisienne, selon une étude(2) qui a présenté un diagnostic de la situation afin de servir à l'élaboration d'une stratégie, oubliée depuis. Ce travail a permis d'identifier les attentes relatives à l'offre touristique. Ainsi, s'est exprimé un besoin d'animation, de « coins touristiques» (restaurants, centres de loisirs, cinéma,…), de manifestations culturelles. La suggestion se rapportant à l'animation externe a été proposée surtout par les habitants des régions de l'intérieur du pays (Kairouan, Sidi Bouzid, Gafsa et Jendouba) et ceux de la région de Sfax.
Il existe donc un véritable enjeu vis à vis des citoyens auxquels il y a lieu de donner les moyens de partir en vacances. Ces moyens passent par l'instauration du « chèque-vacances » qui réduirait les inégalités d'accès aux loisirs.
Le chèque-vacances est un titre de paiement prépayé qui permet de régler de nombreuses prestations de tourisme, de transport et de loisirs. Sa fonction est d'être un médiateur entre les prestataires et les porteurs du chèque-vacances. Le prestataire, adhérant à cette formule, étant assuré d'être payé. Le financement du chèque-vacances passe par une épargne que le bénéficiaire ferait auprès de son entreprise et qui serait proportionnelle à ses revenus. Cette épargne pourrait bénéficier d'une aide de l'Etat.
L'instauration de ce système est un encouragement pour les couches ayant un revenu modeste à accéder aux vacances et une contribution au développement du tourisme intérieur dans toutes ses composantes en termes d'animation et de loisirs.
Les préconisations
Depuis l'Indépendance, le pouvoir politique a conçu un Etat-nation pour encadrer les forces économiques et sociales où «le national a défini le local»(3) et les décisions en matière de développement du tourisme ont été et sont encore prises à l'échelon d'un département ministériel ; les responsables locaux n'ont fait et ne font qu'entériner les mesures décidées par l'Etat. Malgré tous les efforts, le virage, qui nous aurait permis d'écouter les régions ignorées, n'a jamais été pris. Depuis, nous en sommes toujours au même point, celui du déséquilibre régional, l'étincelle de Janvier 2011. Pour cela, des préconisations, quant à une nouvelle gouvernance, sont à établir à deux horizons : Le premier, celui du court terme et le second, celui du moyen terme.
Le court terme
Compte tenu de la situation socio-économique du pays, la gouvernance des affaires passe par celle de l'immédiateté des résultats pour relancer la machine touristique et celle de l'immédiateté hôtelière pour trouver le plus rapidement possible une réponse à l'endettement des acteurs du secteur et en particulier des hôteliers.
Immédiateté des résultats
L'immédiateté des résultats permettra aux hôteliers de travailler et ainsi de relancer les entrées de devises et la création des emplois. Comme l'a si bien exprimé un fin connaisseur du secteur(4) , il ne s'agit plus de « faire de la broderie » mais de s'appuyer sur 3 partenaires essentiels, les Tour opérateurs (TO) étrangers, les hôteliers et agences de voyages ainsi que les transporteurs.
* Les Tour opérateurs étrangers. Certes, la révolution internet et la crise économique, qui pèsent profondément sur les dépenses des Européens, se conjuguent pour plonger les T.O dans une tourmente historique. Mais la situation en Tunisie a joué également un rôle essentiel dans le marasme qu'ils connaissent. Aussi, pour eux la situation sécuritaire est-elle primordiale pour leur retour en Tunisie ; mais ils reviendront car ils ont besoin de nous comme nous avons besoin d'eux ;
* Les hôteliers et les agences de voyages. Nous devons leur faire confiance car ils sont les pièces maîtresses du dispositif touristique. Il faut être à leur écoute et les associer à la politique de relance du secteur ; l'Office National du Tourisme Tunisien (ONTT) et le ministère n'étant que des supports au développement des activités touristiques ;
* Les transporteurs. La maîtrise du transport aérien est fondamentale pour le développement du tourisme en Tunisie. Certes, les relations entre l'ONTT et le transporteur national, Tunisair, ont toujours été excellentes, mais il va falloir rapidement s'ouvrir à d'autres horizons et « ouvrir notre ciel » avec la libéralisation des routes de l'espace.
Et au-delà des solidarités internationales qui ont été exprimées après le Bardo, faire revenir les touristes passe par l'instauration d'incitations exceptionnelles très fortes vis à vis des T.O étrangers mais également des transporteurs et des hôteliers.
Immédiateté hôtelière
Par immédiateté hôtelière, il faut entendre la résolution des problèmes des hôteliers, à savoir leur endettement qui s'élèverait, selon la Banque centrale de Tunisie, à 3,4 milliards de Dinars. Quelques 300 hôtels sont aujourd'hui endettés, soit 1/3 de l'hôtellerie nationale.
Si les banques attribuent leurs difficultés de liquidité à l'importance des créances impayées du secteur touristique, les hôteliers attribuent leurs endettements à des pratiques bancaires non conformes aux dispositions réglementaires au niveau du taux d'intérêt appliqué aux hôteliers, aux méthodes de calcul et de perception des intérêts entraînant des augmentations exponentielles irrégulières de leurs dettes.
Quelles que soient les responsabilités, il est évident que l'endettement hôtelier est le problème numéro 1 du tourisme en Tunisie.
La résolution de ce problème passe par une collaboration étroite entre le ministère des Finances et celui du Tourisme et de l'Artisanat ainsi que les organisations professionnelles afin de permettre une meilleure visibilité et un meilleur positionnement des problèmes qui se posent aux hôteliers. Aussi, serait-il une priorité d'établir une « feuille de route transversale » qui traduirait les attentes des différents acteurs de l'hôtellerie et de toutes les composantes du tourisme et qui identifierait les actions ayant un impact immédiat sur l'économie du tourisme.
Le moyen terme
La gestion des affaires
A moyen terme, une nouvelle vision de la gestion administrative du secteur passe par trois réformes : celle de l'Administration du tourisme ; celle de la réflexion qu'elle est censée mener ; celle des textes réglementaires à rénover.
* Réforme de l'Administration
Dans le cas des entreprises publiques, dans lesquelles l'Etat reste un agent fondamental de la gouvernance de ses sociétés, il serait nécessaire de:
• Lancer un audit externe de tous les établissements sous la tutelle du ministère du Tourisme et de l'Artisanat ;
• Remplacer les organismes existants par de nouvelles structures qui répondent au développement du tourisme d'aujourd'hui avec :
- Une Agence de Promotion Touristique (ONTT + Transporteurs publics et privés + Fédération Tunisienne de l'Hôtellerie (FTH) + Fédération Tunisienne des Agences de Voyages (FTAV)+ Autres acteurs);
- Une Agence des Métiers du Tourisme (Professionnels du tourisme + Formation professionnelle + ONTT);
- Une Agence de Développement Touristique (AFT + ONTT + ministères du Développement Régional + de l'Environnement + de l'Equipement);
• Rendre autonome ces agences par rapport à l'autorité politique, et ce en prenant en compte les compétences au sein de ces administrations ;
• Remplacer le pouvoir hiérarchique en mettant en place une gouvernance au sein de laquelle les caractéristiques seraient la participation, la responsabilité, et l'imputabilité à savoir, l'acceptation du risque, de la divergence des intérêts et de la négociation ;
• Renforcer la transparence de l'information au sein des commissions touristiques et de l'interaction en mettant en place des collectifs administratifs chargés de veiller au renforcement de la pratique démocratique dans les commissions touristiques ;
• Mettre en place des innovations institutionnelles et technologiques en plus des leviers classiques.
* Réflexion renouvelée
Depuis 2000, de nombreuses études ont été menées et cependant selon Radhi Meddeb(5) , « elles n'étaient jamais suivies d'effets pour des raisons simples: le manque de courage politique des autorités en place face aux puissants lobbies des industriels du secteur »(6) . Certes, c'est tout à fait exact, mais il y aurait lieu d'ajouter que les études parle tourisme alors que les professionnels parlent hôtellerie. Cette confusion, entre tourisme et hôtellerie, a donné l'immobilisme que l'on connaît. Seule, l'étude menée par Ficht Ratings(7) a posé clairement le problème de l'industrie touristique tunisienne, celui « d'un modèle économique à rénover ».
L'analyse d'un domaine touristique quel qu'il soit ne peut se faire uniquement à partir d'une réflexion unidimensionnelle même si des relations entre différents champs d'activité sont mises en évidence. Aussi est-il temps d'être responsable et de déclarer que l'étude de la Banque mondiale(8) , celle de JICA(9) et le « travail » du groupe Berger(10) sont frappés d'obsolescence. Ces études fondent, en effet, leurs analyses sur l'attractivité, sans approche systémique, différente d'une analyse multidimensionnelle. Tous les travaux présentés sont axés sur l'offre que la destination Tunisie peut et doit proposer ; par contre, rien sur les mécanismes qui devraient être mis en place pour programmer un renouveau du secteur.
Il est donc urgent de formuler différemment la question du tourisme, et au lieu de se dire : « Quelle offre allons nous proposer aux touristes ? », disons : « Quels sont les touristes que nous recherchons ? »
* Refondation réglementaire
Pratiquement tous les textes sont à reprendre, en particulier ceux sur la catégorisation des hôtels, ceux concernant le fonds de protection des zones touristiques et le fonds de compétitivité dans le secteur du tourisme ; ces deux derniers devraient être régionalisés, comme cela est demandé par les hôteliers.
Il y a lieu également de revoir celui sur le Programme de mise à niveau des hôtels qui, malheureusement, correspond plus à la rénovation des hôtels qu'à leur mise à niveau et pour laquelle il y aurait lieu d'insister sur les aspects immatériels correspondant véritablement à la mise à niveau.
Une nouvelle gouvernance territoriale
Toujours à moyen terme, il est nécessaire de réfléchir à une nouvelle gouvernance territoriale qui doit s'inscrire dans le cadre défini par la Constitution, et en particulier les articles relatifs à la décentralisation(11) . Cette nouvelle gouvernance territoriale doit permettre:
D'adresser un signal fort aux habitants de l'intérieur afin de leur montrer qu'ils sont prioritaires termes de développement et que toutes les régions doivent bénéficier du développement de l'activité touristique et de ses retombées
De donner une nouvelle visibilité à une Tunisie plurielle. L'attractivité de la destination Tunisie correspond à celle du littoral. La Tunisie n'a pas valorisé ses territoires. La réalité touristique est celle de « lieux touristiques » qui, pour un touriste, sont identiques. Les structures hôtelières et les équipements y afférents, composantes essentielles de l'offre touristique, les ont, en effet, banalisés. Le tourisme doit servir de levier de développement aux régions de l'intérieur, en donnant la possibilité à ces régions de devenir de véritables acteurs touristiques.
De modifier les systèmes en place. Le concept de zone touristique, qui a fait la force du tourisme tunisien, n'a en effet pas su évoluer, il est devenu une contrainte. Il en est de même des structures y afférentes, les Commissariats régionaux du tourisme(12) qui n'ont ni les moyens financiers, ni humains pour résoudre les problèmes qui se posent aux zones touristiques.
Aussi, la multiplication des destinations en Tunisie est-elle une impérieuse nécessité ; elle passe par la création de destinations-territoires et nécessite une réorganisation complète de la gouvernance touristique au niveau régional.
* La destination- territoire
Elle doit correspondre à la notion de district telle que définie dans la Constitution. Les fondements de la destination-territoire sont de deux ordres : Le patrimoine. Le « continuum espace-temps du touriste » est à explorer, en se rapprochant beaucoup plus du vécu du touriste et de l'offre touristique sur laquelle il interagit. La durabilité. Elle doit prendre en compte l'environnement, l'efficacité économique et l'équité sociale.
Chaque destination-territoire doit mettre en valeur ses propres caractéristiques pour permettre leur différenciation et leur identification. La différenciation régionale passe par les potentialités patrimoniales qui doivent mettre en exergue la créativité régionale, l'innovation et la mise en place d'un programme qualité. L'identité régionale a pour objectif la reconnaissance de la destination – territoire à partir du contenu sociétal, culturel et environnemental de l'offre patrimoniale. Pour les touristes, c'est une lisibilité qui est un gage de sécurité et de qualité. Pour les acteurs du secteur, c'est une démarche de partenariat qui leur permet de bénéficier des effets de synergie et des économies d'échelle.
Compte tenu d'une «gouvernoralisation» très forte, des logiques inter-régionales devraient être développées pour permettre une vision plus large et une meilleure organisation du développement touristique. En effet, le développement régional du tourisme ne peut se faire sans décentralisation qui passe par la mise en place:
• D'une Société d'économie mixte touristique (SEMT), outil d'intervention d'intérêt général, à même de définir une stratégie, mais également une progressivité et un pilotage assumés des projets touristiques; elle remplacerait le Commissariat régional au tourisme et permettrait au secteur public d'aménager, d'équiper mais également d'aider à la création de sociétés privées. Elle serait la parfaite synthèse entre les valeurs du service public, à savoir la recherche de l'intérêt général, le souci de la cohésion sociale, l'esprit de probité, la vision à long terme et les valeurs du marché et de l'entreprise privée ;
• D'un ''Programme Régional de Développement Touristique'' (PRDT) qui devrait refléter les réalités touristiques des « destinations-territoires » et jouer un rôle de coordination, de cohérence des projets à l'échelle régionale, en plus d'une aide en termes de signalétique, de communication.
• D'un financement qui passerait par la régionalisation du Fonds de protection des zones touristiques et du Fonds de compétitivité ainsi que par la mise en place d'un Fonds assujetti au label du territoire-destination, à la contractualisation des opérateurs touristiques, à la taxe de séjour prélevée à l'échelon du territoire-destination et à la taxe « hôtelière » assujetti à tous les bénéficiaires de l'activité touristique.
La promotion d'une destination-territoire passe par des campagnes promotionnelles centrées sur la mise en valeur des spécificités territoriales et de leurs atouts distinctifs. Il s'agirait non plus de vendre des lits, mais l'ensemble des composantes du « territoire-destination » qui devraient donc être dynamiques, modelées et présentées comme autant de produits pour autant de clientèles :
• La clientèle nationale sur laquelle toute forme de développement touristique, en particulier le produit patrimonial, doit nécessairement s'appuyer ;
• La clientèle canalisée, qui correspond à celle des séjours tout compris, celle du « tourisme de plage », de détente pour qui, les espaces d'excursion sont des moments forts et donc doivent avoir les mêmes commodités que l'espace d'hébergement, avec la même qualité au niveau des prestations
• La clientèle d'expérience, celle qui est à la recherche d'authenticité. Pour cette cible, il faut définir des séjours « sur mesure », d'une grande flexibilité ; Les associations tunisiennes et internationales, qui « pratique le patrimoine », entrent tout à fait dans ce cadre d'un tourisme de partage.
Compte tenu de l'importance territoriale de la destination, il y aurait lieu, lorsqu'il existe déjà des lieux touristiques, de les réactiver par la création de pôles touristiques d'excellence et, lorsqu'il n'en existe pas, de créer des clusters touristiques. La « destination-territoire » aurait pour vocation de jouer un rôle de coordination dans la programmation et l'exécution des actions de développement et de marketing et ce, sans pour autant exercer de pouvoir de contrainte.
* Le pôle touristique d'excellence
Le pôle touristique d'excellence doit remplacer la zone touristique ; sa mise en place répond à la nécessité de renouveler et d'adapter les zones touristiques aux évolutions des attentes des touristes.
Il doit être un facteur de compétitivité et d'attractivité. Il a pour but d'impulser une stratégie volontariste en termes d'innovation dans toutes les composantes du tourisme, économie, environnement et gestion.
Les éléments qui caractérisent un pôle touristique d'excellence sont : l'identification, l'attractivité, les équipements structurants et le développement durable.
* Le cluster touristique
L'incapacité de développer le tourisme culturel, ou tout autre forme d'activité touristique, est due à l'absence d'un environnement favorable et donc la stimulation des initiatives aux alternatives du tourisme balnéaire nécessite la mise en place d'un cadre spécifique, à savoir le cluster touristique.
Un cluster est une concentration géographique d'entreprises interdépendantes, de prestataires de services et d'institutions associés dans un même secteur, en l'occurrence le tourisme, qui engendrent une dynamique particulière, liée à la fertilisation croisée, à l'émulation, au partenariat ; il a donc pour objectif la mutualisation de l'ensemble des acteurs concernés, autour d'un projet de destination dont le principe doit être la co-construction de l'offre touristique respectueuse des milieux et du patrimoine. Le développement des activités touristiques doit être investi par le débat collectif intégré à un label et suivi par la signature d'une charte.
Alors que les approches, adoptées jusqu'à présent, ont visé à protéger le patrimoine en l'isolant de son environnement ; aujourd'hui, la conservation doit tendre certes à préserver, mais surtout à améliorer, grâce à une attractivité à créer, tout un paysage culturel plutôt qu'un site isolé et à accorder une place plus importante à l'individu.
Dans chaque cluster touristique, il doit être mis en place une antenne de la SMDT. Cet antenne doit coordonner ce qui existe et mettre en place des synergies entre les initiatives publiques et privées. L'antenne doit promouvoir la qualité, l'excellence et coordonner un agenda impliquant toutes les activités.
Le découpage touristique
Il est proposé 5 destinations-territoires, qui correspondraient à 5 districts chacun d'eux présentant une cohérence touristique en termes d'attractivité et de masse critique pour disposer d'une visibilité internationale et ainsi donc accéder au statut de destination à part entière.
Tunis métropole
Dans le cadre de Tunis, tout développement touristique doit s'inscrire dans le contexte d'une métropole méditerranéenne que Tunis aspire à devenir et à ce titre, il faut donc démultiplier la « puissance touristique » de la capitale, en termes de produit culturel, balnéaire, d'activités sportives et de pôles touristiques d'excellence.
Ainsi donc, Tunis métropole doit comprendre les 4 gouvernorats du Grand TunisTunis, Ariana, Manouba et Ben Arous – ainsi que ceux de Bizerte, Nabeul et Zaghouan qui sont des périphéries de Tunis.
Actuellement, il existe 5 Commissariats Régionaux au Tourisme (CRT) dont la gestion des activités touristique est très inégale. Ainsi, le CRT de Tunis-Nord couvre une capacité de prés de 20000 lits alors que celui de Tunis Sud – Zaghouan environ 6000 lits. Ces 5 CRT pourraient être remplacés par une SMDT.
L'identification de Tunis passe par une image culturelle, autour de 3 thèmes : la Médina de Tunis, le musée du Bardo et le site de Carthage : « Tunis, histoire plurielle ».
Par ailleurs, il y aurait lieu d'établir des pôles touristiques d'excellence autour de Bizerte et Hammamet et de constituer des clusters touristiques autour de Zaghouan – Turburbo Majus, de Kélibia - El Houaria, du Jebel Ichkeul - Sejnane.
Le Nord-Ouest
Il est l'exemple même d'une stratégie hôtelière sans vision touristique. Seule une bande littorale, entre la mer et la route principale, GP7 Tunis-Tabarka, est touristique, alors que la région se caractérise par un riche potentiel touristique naturel, humain et historique. De multiples activités pourraient être développées, alors que jusqu'à présent, elles le sont trop peu.
Il représente 4 gouvernorats, Jendouba, Béjà, El Kef et Siliana. Actuellement, le CRT de Tabarka couvre les activités touristiques des gouvernorats de Jendouba et du Kef ; celui de Bizerte est en charge du gouvernorat de Béja. Une SMDT pourrait couvrir l'ensemble des 4 gouvernorats.
Le gouvernorat de Jendouba avec la zone de Tabarka et à un degré moindre celle de Aïn Draham et celle du Kef présentent des activités touristiques. Mais compte tenu de la richesse du Nord-Ouest, « Entre Terre et mer », la multiplication de clusters touristiques s'impose.
De Sousse à Gabès
Il s'agit du littoral déjà occupé par des zones touristiques, celles de Sousse, de Monastir, de Mahdia, de Sfax et de Gabès et qui correspondent aux 5 gouvernorats du même nom.
Actuellement, il existe 5 CRT, à Sousse, Monastir, Mahdia, Sfax et Gabès. Une seule structure, une SMDT, devrait resituer ces différentes zones dans un cadre d'excellence.
Dans ce contexte, il y aurait lieu de replacer ces lieux touristiques dans le cadre de leur environnement, « La mer » et de faire de Matmata un pôle touristique d'excellence.
Le centre Ouest
Le Centre Ouest (Kairouan, Kasserine, Sidi Bouzid et Gafsa), malgré tous ses atouts, connaît un rythme de développement économique insuffisant. Le centre-ouest de la Tunisie offre une alternative des plus séduisantes au tourisme de masse de la côte avec une forte concentration de cités en ruine attestant de sa prospérité passée. Le patrimoine archéologique représente 35% des vestiges archéologiques recensés dans toute la Tunisie, le Centre-Ouest constitue « Les Chemins de l'histoire »
Il existe 2 CRT, à Kairouan et à Sbeitla ; la notoriété de ces deux sites nécessite qu'ils soient des pôles touristiques d'excellence.
La faiblesse des équipements touristiques nécessite une lourde intervention de l'Etat au sein de clusters qu'il y aurait lieu de multiplier.
Le Sud
Pourquoi un Sud, territoire vaste aux potentialités multiples ? Parce qu'il existe une grande complémentarité entre les différentes régions qui constituent le Sud et qu'elles ont manifestement un exotisme commun pour les marchés européens qu'il aurait lieu de mettre en évidence, en proposant une approche intégrée du patrimoine culturel et naturel du Sud.
De plus, les 4 gouvernorats de Tozeur, Médenine, Tataouine et Kébili sont une véritable mosaïque qu'il aurait lieu politiquement de « cimenter ». Ils constituent des entités avec des CRT à Tozeur, Kébili, Jerba-Zarzis et Tataouine qui gèrent des activités touristiques très différentes.
Il y aurait lieu de créer des clusters en particulier dans les zones délaissées telles que les délégations de Béni Khedache, Médenine et Sidi Makhlouf mais également dans les régions de Tataouine et des ksour.
Zarzis tout comme Tozeur et Nefta doivent redevenir des pôles touristiques d'excellence et Jerba, une île touristique.
* Routes touristiques
Les Routes Touristiques ou l'élargissement territorial. Les tendances actuelles du tourisme vont vers la découverte des « routes thématiques ». Elles sont importantes pour le développement de nouvelles formes de tourisme, centré sur le respect de l'environnement, des cultures et des populations. Elles permettent de renforcer le sens des valeurs et du patrimoine commun et de dynamiser le développement économique et social des territoires. La création des routes patrimoniales oblige à une ouverture vers d'autres composantes en dehors du gouvernorat des limites des destination-territoires. Elles seraient un plus dans l'offre touristique tunisienne.
Savoir avancer, c'est savoir changer, aussi, est-il temps de réfléchir à un nouveau cadre touristique qui devrait ainsi favoriser :
• La diversification de l'offre touristique de la « destination-territoire » en s'ouvrant obligatoirement à un tourisme de qualité qui optimise les ressources matérielles et immatérielles ;
• L'allongement de la période touristique ce qui permettra d'accueillir des touristes en basse saison, sur un territoire plus large puisqu'il ne se développe pas nécessairement autour de lieux emblématiques ;
• La capacité à se combiner parfaitement avec d'autres segments et de générer des synergies tout en permettant de réaliser des économies d'échelle.
Jean Mehdi Chapoutot
Ancien directeur de la Qualité
Office National du Tourisme Tunisien
(1) Smaoui (Ahmed), 2001, « Tourisme et patrimoine : change ou mirage », in Patrimoine et co-développement durable en Méditerranée occidentale, Tunis.
(2) Le marché touristique interne, 2005, ACC, ONTT.
(3) Baduel Pierre Robert, 1995, « Approches socio-politiques du local », Contacts et échanges culturels en Méditerranée, Aix-en-Provence.
(4)Hamdi Hédi – « DESTINATION tunisie.info »
(5) PDG du groupe « Comete Engineering » et président de l'association « Action et Développement Solidaire ».
(6) webmanagercenter.com du 9 septembre 2014. Interview réalisé par Moncef Mahroug.
(7) Ficht Ratings, 2007, « L'industrie touristique tunisienne : un modèle économique à rénover », Tunis.
(8) Banque mondiale, 2003, « Stratégie de développement touristique en Tunisie », Ministère du Tourisme, Tunis.
(9) JICA, 2001, « Développement du tourisme en Tunisie à l'horizon 2016 », Ministère du Tourisme, Tunis.
(10) Berger, 2012, « Stratégie touristique à l'horizon 2016 », Tunis.
(11) Constitution, 2014, Chapitre VII, articles 131 à 142.


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