Par Noureddine Dougui - Mohamed Hédi Chérif, historien de renommée internationale et ancien doyen de la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis, vient de s'éteindre. Né à Tunis, le 23 juillet 1932, il a fait ses études au Collège Sadiki puis à l'Institut de Hautes études de Tunis. C'est là qu'il a pris conscience des enjeux coloniaux en assistant à la répression du mouvement national. D'où son engagement dans la lutte nationale en adhérant la Jeunesse scolaire et en collaborant au Journal néo-destourien « Mission ». Agrégé de la Sorbonne en 1963, il a été sollicité officiellement pour inscrire l'histoire du Mouvement national dans ses projets de recherche ; mais déçu par les dérives autoritaires du régime et craignant l'instrumentalisation politique de ses résultats de recherche, il se retourna vers l'histoire moderne en préparant une thèse d'Etat intitulée : « Pouvoir et société dans la Tunisie de H'usayn Bin Ali (1705-1740) ». Nommé en 1967 au département d'Histoire de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, il a contribué à la formation de plusieurs générations de chercheurs et d'enseignants. Fidèle à ses engagements de jeunesse, il milita dans les rangs de l'UGTT et fut l'un des fondateurs du Syndicat général de l'enseignement qui a échappé à la dissolution lors de la crise syndicale de janvier 1978. Mohamed Hédi Chérif fut par ailleurs, professeur visiteur en France, en Algérie, au Maroc et en Maurétanie. Mais par suite de la crise de l'université tunisienne en 1968, il obtint son détachement au CNRS de Paris, où il s'initia aux méthodes de l'Ecole des Annales et fut le premier historien tunisien à les intégrer dans l'approche de l'histoire de la Tunisie moderne et contemporaine. Auteur à succès, ses travaux font autorité dans le monde universitaire et ailleurs. Ses anciens disciples gardent de lui le souvenir indélébile d'un professeur attentionné et consciencieux. La mémoire universitaire retiendra de lui, outre son action inlassable pour rapatrier en Tunisie les archives françaises afférente à notre pays, ses qualités de cœur et d'esprit et son immense humilité intellectuelle.