Rarement beuverie nocturne ou diurne soit-elle se termine sans dégâts pour au moins l'un des participants. C'est ce qui s'est passé dernièrement pour un clochard qui a voulu arroser ses retrouvailles avec un ancien compagnon de cellule, après une longue séparation. Ce dernier, originaire d'un gouvernorat du centre du pays, se décide à l'issue d'une période d'inactivité dans son bled, faute d'emploi même de manœuvre, de retrouver au plus vite les lumières de la capitale où il espère décrocher un poste de veilleur de nuit dans l'un des nombreux établissements industriels de La Charguia. Aussitôt à Tunis, il déambule à travers les principales artères de la ville pour se souvenir des moments délicieux qu'il a passé dans certains bars qu'il avait fréquentés avec des lascars de son acabit. Et comme le hasard fait bien les choses, il rencontre fortuitement son ancien camarade Mohamed H, une vieille connaissance, qui l'accueille chaleureusement et le dissuade de se rendre à La Charguia, avant de fêter comme il se doit ces retrouvailles inespérées. Dans la foulée, Il se propose même d'acheter quelques victuailles et des bouteilles de vin et invite son compagnon à l'accompagner dans la région de Bab Alioua. Accord conclu, ils se mettent rapidement à l'abri des regards dans un coin isolé et entament leur beuverie diurne, ponctuée de forts éclats de rire. Le temps s'écoule sans qu'ils s'en rendent compte et soudain une altercation éclate entre les deux protagonistes. La vieille connaissance ayant vite rappelé à son convive qu'il doit payer sa part du festin. Bien entendu, ce dernier refuse, arguant le fait que ses moyens ne le permettent pas, outre que c'est lui l'invité. La discussion ne tarde pas alors à s'animer au point de dégénérer en véritable bagarre. Mohamed H. brise une bouteille de vin vide, se saisit d'un tesson et lacère le corps de son rival qu'il laisse baigner dans une mare de sang, avant de quitter les lieux. Les gémissements du blessé attirent l'attention des rares passants qui s'empressent de le transporter à l'hôpital Aziza Othmana. Miraculeusement, il est sauvé d'une mort certaine, grâce à une opération chirurgicale d'urgence. Informées par l'établissement hospitalier, les autorités policières recueillent les déclarations de la victime qui leur raconte dans le détail les péripéties de son aventure. Munies de l'identité de l'agresseur, les forces de l'ordre le cueillent rapidement. Il avoue sans tergiverser son acte qui le conduit directement devant la chambre criminelle du tribunal de première instance de Tunis. À l'audience, il clame sur tous les toits qu'il a certes agressé son rival, mais qu'il n'avait aucune intention de lui donner la mort. La cour l'a condamné à six ans de prison ferme, ayant retenu l'accusation de tentative d'homicide volontaire.