Ils sont capables de se chamailler, de pavoiser et de pérorer durant de longues heures, simplement, pour montrer qu'ils sont là et qu'ils ont quelque chose à dire. Mais, lorsqu'il s'agit de choses sérieuses, ils se plantent comme des gamins ignares. La journée d'hier a été, encore une fois, la preuve de l'incompétence et de l'insouciance de ces représentants du peuple qui n'ont même pas été capables du mal qu'ils sont en train de faire au pays, en reportant le vote sur la délégation des pouvoirs au président du gouvernement. Prémédité ou non, le report de la plénière de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) à aujourd'hui est un signe révélateur de l'incompétence de ces députés et du bureau de l'Assemblée qui n'a même pas été capable d'organiser de bonne manière un vote à distance, alors que de nombreuses compétences tunisiennes auraient répondu à l'appel, pour permettre ce vote, de la meilleure des manières possible. Et, comme le dit l'adage tunisien, ils ont préféré « mettre les tapis, avant la construction de la mosquée », privilégiant passer, en premier, le deuxième projet de loi sur le transfert de l'emprunt obligataire émis par la Banque centrale de Tunisie (BCT) sur le marché financier international au profit de l'Etat L'ARP devait, en principe, examiner la proposition de loi n°30-2020 sur la délégation de pouvoir au chef du gouvernement, en matière de publication des décrets lois, et ce, en application de l'alinéa 2 de l'article 70 de la Constitution, surtout que c'est la sécurité et le bien-être du citoyen qui sont concernés. Pourtant, le projet de loi, proposé par le gouvernement et soumis au parlement depuis le 25 mars, vise à lutter contre l'épidémie du coronavirus et à tenter de limiter ses répercussions, en hâtant la mise en place des mesures nécessaires à la gestion de cette crise. Mais, nos députés s'en tapent. Cela traine, depuis bien avant, puisque le 22 mars dernier, dans une adresse aux Tunisiens, le chef du gouvernement Elyès Fakhfakh a appelé à l'application de l'article 70 de la Constitution au regard du contexte sanitaire crucial et exceptionnel que vit le pays. L'article 70 de la Constitution habilite le chef du gouvernement à légiférer, pendant un délai limité, par ordonnances. Il dispose que "l'Assemblée des représentants du peuple peut, au trois-cinquième de ses membres, habiliter par une loi, le chef du gouvernement, pour une période ne dépassant pas deux mois et, en vue d'un objectif déterminé, à prendre des décrets lois, dans le domaine relevant de la loi. A l'expiration de cette période, ces décrets lois sont soumis à l'approbation de l'Assemblée". Mardi dernier, la commission de Règlement intérieur, de l'Immunité et des Lois parlementaires a approuvé, dans sa version amendée, le projet de loi n°30-2020 portant délégation au chef du gouvernement le pouvoir de publier des décrets lois pour lutter contre la crise du Covid-19. Dans son rapport, la commission a limité le temps de la délégation de pouvoir à un mois au lieu de deux. Le rapport de la commission a été, ensuite, soumis au bureau de l'ARP qui a fixé la date du 3 avril pour la discussion du projet de loi en question. Jeudi 2 avril, une réunion de consensus au sujet du projet de loi sur la délégation de pouvoir au chef du gouvernement a lieu, au Palais du Bardo, entre les présidents des groupes parlementaires et une délégation gouvernementale. Au cours de cette réunion, il a été décidé de d'annuler les amendements, décidés en commission, et relatifs au temps de délégation de pouvoir et à la contestation de la constitutionnalité des décrets lois promulgués par le chef du gouvernement.