Il y a comme un air de Djurdjura. Et sur les hauteurs, peu importe que passent les jours et les semaines ; les mois et les années, du côté de Tizi-Ouzou, le « Mont des Genêts », l'ascension est toujours de mise. « Tazdayt », chantait Idir. Il n'y a pas si longtemps… Un palmier regarde toujours les cimes. Et ne baisse pas la tête, jamais ! Debout et inébranlable. Fier et altier, il garde ses blessures toujours secrètes, mais n'oublie pas. Idir n'a jamais oublié sa Kabylie natale, et jamais il ne lui a tourné le dos ! Et quand il a quitté un jour, son Algérie natale pour la France, il a emporté dans son cœur de poète, toute la musique de sa Kabylie. Et tout son cœur chantant. Tout comme sa tenace mélancolie. C'est peut-être pour cela que son souvenir, éternellement, maintenant qu'il a rejoint les « Grand Ailleurs », restera inéluctablement lié à sa poésie. La même qui a irrigué les veines d'un Jean Amrouche, la même qui circulait, comme un cœur battant, dans les mots de Mouloud Feraoun, les incantations lancinantes d'un Mouloud Maameri, les merveilleuses balades d'un Ait Menguellet, et tant d'autres encore, pour qui une langue : « Tamazight », c'est une terre, une mère, et une « colline oubliée », qu'ils n'ont jamais voulu quitter du regard, parce qu'elle les porte, autant qu'ils la portent, autant qu'ils l'ont porté, et autant que la porteront encore, ceux qui sont venus après eux, et ceux qui les suivront, parce qu'ils seront fidèles à un héritage, qui, pour eux, était, indiscutablement, plus précieux que la prunelle de leurs yeux. Idir, c'était tout cela mêlé. Et il pouvait chanter en français, parce qu'il était poète, et parce qu'il était « troubadour », à sa façon, et croyait à l'universalité des Hommes, ce que l'on entendait, derrière des mots, qui véhiculaient une autre langue, qui était aussi la sienne, comme on est un enfant d'adoption, c'était toujours le vent qui soufflait dans les plaines. Et dans les montagnes abruptes, et splendides, du Djurdjura. Qu'il n'avait, au fond, jamais quitté du regard…