LE TEMPS - C'est un affrontement à couteaux tirés qui se déroule entre le Parti destourien libre (PDL) d'Abir Moussi et de son groupe parlementaire, pour venir à bout du président actuel de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), Rached Ghannouchi, pour le déloger de son perchoir. Ce parti est optimiste et croit pouvoir atteindre son objectif. Toutefois, il doit rallier davantage de partisans pour le faire, sachant que rien n'est clair, actuellement, dans l'Hémicycle et que les ennemis d'hier peuvent devenir des alliés d'aujourd'hui et vice-versa. Abir Moussi a indiqué, vendredi, avoir rencontré cette semaine (mercredi) des représentants de quatre groupes parlementaires qui ont appuyé les revendications de son parti pour coordonner leurs positions. L'objectif étant, selon elle, de retirer la confiance au président de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), Rached Ghannouchi, de constituer une nouvelle majorité parlementaire et de présenter un projet pour l'amendement de la Constitution. S'exprimant au cours d'une conférence de presse tenue ce vendredi à l'ARP, Abir Moussi a précisé qu'elle a contacté des représentants des blocs la Réforme, Tahya Tounès, Al Mostakbal et Qalb Tounès. Elle a indiqué avoir également pris contact avec des représentants du bloc El Watania et le bloc démocrate dont le président Hichem Ajbouni a promis d'en débattre avec les structures de son parti. Le congé de l'Aïd El Fitr a été l'occasion de préparer la séance plénière prévue le 3 juin prochain, a-t-elle ajouté. Le but étant, selon elle, de mobiliser un maximum de soutien au projet de motion présenté par le groupe PDL en vertu de l'article 141 du règlement intérieur de l'ARP. Le projet de motion "rejette toute ingérence étrangère dans les affaires libyennes ainsi que la politique des axes faisant de la Tunisie une plateforme logistique pour faciliter une intervention étrangère en Libye". Le bloc PDL avait demandé d'auditionner le président de l'ARP Rached Ghannouchi sur ses déplacements non annoncés à l'étranger et sa rencontre avec le président turc Recep Tayyip Erdogan. Réagissant à la déclaration d'Abir Moussi ce vendredi lors de la conférence de presse, le président du groupe la Réforme, Hassouna Nasfi, a déclaré que la rencontre avec le PDL était l'occasion de soutenir son projet de motion. Il a ajouté avoir soumis des propositions pour l'amendement du projet de motion de manière garantissant son adoption à la majorité absolue en plénière le 3 juin prochain. Pour ce qui concerne le retrait de confiance au président de l'ARP, Nasfi a indiqué que son groupe n'a pas exprimé une position officielle à ce sujet, estimant qu'il était prématuré de trancher la question. Il s'agit pour lui d'attendre la séance plénière consacrée à un dialogue avec Rached Ghannouchi. Le président du groupe parlementaire Tahya Tounès, Mustapha Ben Ahmed, a déclaré, quant à lui, qu'aucune coordination officielle n'a été menée entre les deux blocs sur ces questions. Il a rappelé que le soutien de son bloc aux revendications du PDL "n'est pas de l'ordre de la coordination, mais constitue un point de recoupement autour d'une demande". De son côté, le président du groupe El Watania, Hatem Mliki, a indiqué qu'il s'était mis d'accord avec l'un des députés PDL de se rencontrer bientôt pour le tenir au courant des issues de la rencontre entre quatre groupes parlementaires et de la vision du PDL pour la prochaine étape. Le groupe PDL a observé un sit-in au siège annexe de l'hémicycle au Bardo du 13 au 23 mai pour demander l'audition du président de l'ARP Rached Ghannouchi sur ses déplacements non annoncés à l'étranger et sa rencontre avec le président turc Recep Tayyip Erdogan. Le 22 mai dernier, le bureau de l'ARP a décidé la tenue, le 3 juin prochain, d'une plénière pour l'examen de la motion du PDL et l'organisation d'un dialogue sur la diplomatie parlementaire, en rapport avec la situation en Libye. Le 21 mai dernier, quatre groupes parlementaires : Qalb Tounès, la Réforme, Tahya Tounès et Al Mostakbal ont appelé, dans une déclaration conjointe, la présidence de l'ARP à respecter les usages diplomatiques et à éviter d'interférer dans les prérogatives des autres pouvoirs. Ils ont également demandé à la présidence du parlement à ne pas impliquer l'ARP dans la politique des axes, et à rester cohérente avec les principes et constantes de la diplomatie tunisienne, réclamant de soumettre cette question en plénière. Le bras-de fer est arrivé à un point de non-retour et qu'importe qui sera le gagnant. Ennahdha se croit tout permis, se croit très influente, malgré les scissions internes et la contestation de son chef historique appelé à céder la place qu'il croyait qu'elle lui était éternelle. Le PDL ne fléchit pas et d'autres vont le suivre, certainement. Mais, le résultat quel qu'il soit portera un coup dur au pays qui a besoin de cohésion et de compréhension, entre des partenaires d'un gouvernement fragile.