Un lieu magnifique, cette huilerie Mahjoub. Elle trône en plein milieu de Tébourba, juste en face de la Municipalité. Rachetée par l'arrière grand-père des propriétaires actuels dans les années 30, elle date du début du 19° siècle. Parfaitement maintenue en état, tuiles d'origine, peinture vert olive évidemment, préaux entourant les bassins où sont déversées les olives à presser, le vieux moteur diesel, un mastodonte, est toujours là, mais remplacé par un moteur électrique. Les présents à la fête pouvaient voir toutes les étapes de « cette pression à froid ». La vie, le travail continue..... C'est dans cet espace, le Moulin Mahjoub, que s'est tenue une manifestation assez particulière, « Olivier généreux et corps poète », en partenariat avec l'ATEP, l'Association de Sauvegarde de Tébourba, et Handicap International, dans le cadre de sa campagne « Kif-Kif ».
Une fête originale, l'art en première ligne : musique, poésie, peinture. Le thème étant « Kif-Kif dans la création ». Les œuvres accrochées aux murs de l'huilerie, sous les préaux, partout où le regard porte. Déambuler à travers les bassins remplis d'olives, discuter avec tous ces peintres, handicapés pour la plupart. Abderrahman El Moudni le marocain, Kader Bentir l'algérien, Jamel Litayem de Médenine ( ayant eu un Prix à Moscou en 2002 , reçu des mains de M.Poutine). Etaient là aussi, Megdiche, M'Hamed Ressaïssi, Abderrazak Sahli. Beaucoup de têtes connues étaient là.. Au hasard, le Père Dominique Tommy-Martin, Zsa-Zsa, Fatma Saïdane, Mohamed Driss, Hichem Rostom, Lotfi Bouchnak, accompagné du peintre japonais Hideyuki Ozawa. Des mécènes, des industriels, des commerçants, des journalistes, la société civile, des représentants d'associations, des médecins, des éducateurs. De la musique aussi, en trois moments. Dans le Patio Mahjoub, Khaled El Waghleni, a accompagné les premiers instants de la fête, avec « Maya et les Etoiles ». Plus tard, dans la Zaouia de Sidi Issa, siège de l'Association de Sauvegarde, Fawzi El Gharbi et la troupe Amel ont charmé les assistants. Puis Adel Bouallègue et la troupe Ajrass ont pris le relais. Une réception d'une grande finesse, petits pâtés salés, boulettes de viandes épicées à point, et la fameuse « madmouja » locale. Thé vert à volonté. Un bon moment de fraternité partagée. Petits groupes de réflexions. Lotfi Bouchnak est très sollicité par les participants algériens et marocains. « Il faut rendre hommage à l'initiateur de cette idée : utiliser cet espace, l'huilerie, si ancrée dans notre patrimoine, pour permettre à tant d'artistes, des handicapés surtout, d'exposer leurs œuvres. Permettre surtout aux citoyens de percevoir autrement les handicapés et de comprendre qu'on est réellement Kif-Kif », me dit-il. Un Trophée d'Or sera attribué à chacun des participants. « Ici, il n'y a pas de compétition, ni de concurrence », précise M.Abdelwahab Mahjoub, « ce n'est pas de l'or bien sûr, mais du bois, de la terre et de la pierre. Tous les deux ans, nous mettons le Moulin à la disposition de l'ATEP, cette fois-ci, on a dédié notre « kaâda » au projet d'Handicap International, pour que l'olivier, avec toute sa symbolique, apporte sa bénédiction à la campagne Kif-Kif, afin que l'autre soit notre bonheur » Il m'est impossible ici de ne pas reproduire un des textes accompagnant les peintures de Kader Bentir, l'algérien : « « Je vous fais donc peur à ce point, quand vous vous cachez derrière la pitié, cette charité ?? Je te tends la main pour que tu y mettes la tienne. Je n'ai pas besoin de ton argent, j'ai besoin d'amour et d'amitié. Ta charité t'empêche de me voir comme je suis... » Changer le regard sur le handicap et sur le handicapé et fêter l'Olivier avec les poètes, les musiciens, les peintres : la « kaâda » du Moulin Mahjoub a atteint son objectif.